Le président Bouteflika aujourd’hui à Addis-Abeba

Le président Bouteflika aujourd’hui à Addis-Abeba

Les moyens logistiques de l’UA en toile de fond

Par : Salim Tamani, Liberté, 27 janvier 2007

Si l’Algérie n’a jamais failli à ses engagements régionaux et internationaux en apportant son aide même en temps de crise, il n’en reste pas moins que la problématique de l’Union africaine se pose aujourd’hui en termes de moyens financiers et logistiques. Ce qui, du coup, place cette organisation dans une position qui ne lui permet pas de peser sur les évènements.

Le président Bouteflika se rend aujourd’hui à Addis-Abeba, en Éthiopie, pour prendre part à la 16e session du Comité des chefs d’État et de gouvernement chargé de la mise en œuvre du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (Nepad) et à la 6e session du Forum du mécanisme africain d’évaluation par les paires (MAEP), a indiqué hier un communiqué de la présidence de la République. Le président Bouteflika prendra part ensuite à la 8e session ordinaire de l’Assemblée des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine (UA) qui se tiendra dans la capitale éthiopienne, les 29 et 30 janvier en cours. En procédant à l’examen du rapport du président de la Commission africaine, Alpha Omar Konaré, la 10e session du conseil exécutif de l’UA a réitéré son soutien au droit à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental. Dans ce contexte, le Conseil exécutif de l’UA a pris acte des derniers développements de la question du Sahara occidental pour souligner l’appui de la communauté internationale, à travers la résolution 1495 du Conseil de sécurité, au droit à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental. Messahel Abdelkader, qui conduit la délégation algérienne à cette session ministérielle, est intervenu dans le débat pour rappeler l’engagement et la contribution constants de l’Algérie pour promouvoir la paix, la sécurité et la résolution des conflits en Afrique. Dans ce cadre, le ministre s’est félicité des développements positifs enregistrés en République démocratique du Congo, en Côte d’Ivoire et en Somalie, qui appellent un effort concerté de tous les pays africains pour consolider ces acquis et tout mettre en œuvre en vue de la finalisation des processus de paix dans ces pays sous la supervision du Conseil de paix et sécurité de l’Union africaine, auquel l’Algérie continuera d’apporter toute sa contribution. Cependant, si l’Algérie n’a jamais failli à ses engagements régionaux et internationaux en apportant son aide même en temps de crise, il n’en reste pas moins que la problématique de l’Union africaine se pose aujourd’hui en termes de moyens financiers et logistiques. Ce qui du coup place cette organisation dans une position qui ne lui permet pas de peser sur les événements qui surviennent sur le continent et qui créent des drames insoutenables. « Il faut être réaliste, la Commission de l’UA n’a pas en l’état les moyens de gérer deux missions de maintien de la paix (Darfour et Somalie). Il est déjà irréaliste pour l’UA de déployer une mission comme celle du Darfour sur une période longue », a reconnu le commissaire à la paix et à la sécurité de l’organisation, Saïd Djinnit, cité hier par l’AFP. Et d’ajouter que le « manque de capacités financières, logistiques et institutionnelles, reste le principal obstacle à la résolution des conflits par l’UA, notamment par le déploiement de force de paix ».
Cependant, pour le commissaire à la paix et à la sécurité, « il y a aussi des limites politiques qui rendent difficile la prévention des conflits, ce qui aurait permis pourtant d’éviter les coûteux déploiements de forces et la reconstruction postconflit ».
Il faut savoir que l’Union africaine, qui tient un sommet ordinaire aujourd’hui et demain à Addis-Abeba, est déjà intervenue directement au Burundi et entretient une mission de paix dans la province soudanaise du Darfour (l’Amis) d’environ 7 000 hommes, sous-financée et mal équipée. Déployée au Darfour grâce aux moyens aériens de l’OTAN, l’Amis doit passer le relais à une force de l’ONU, ce à quoi s’oppose Khartoum. La mission africaine a connu de nombreuses difficultés matérielles et des retards de paiement, malgré un soutien financier de l’Union européenne (UE).
Le 19 janvier, le Conseil de paix et de sécurité de l’UA a néanmoins décidé de déployer « dans les plus brefs délais » une autre mission de paix d’importance, en Somalie. Mais l’UA se heurte à un manque de moyens de projection pour cette force, ainsi qu’à des soucis de financement, alors que peu d’États membres se portent volontaires pour envoyer des contingents. L’UA peut-elle être le gendarme de l’Afrique ? Si la plupart des partenaires et observateurs de cette organisation doutent de ses aptitudes à intervenir dans les conflits, malgré une volonté politique affichée, il ne faudrait pas perdre de vue non plus les difficultés d’ordre économique, notamment que vivent les États composant cette entité. Cependant, dans le cadre du programme de Renforcement des capacités africaines de maintien de la paix (Recamp) initié par la France dans les années 1990, l’UA a développé le concept de « brigades en attente ». Une fois effectivement mises en place, ces forces, prépositionnées dans les grandes sous-régions du continent, devraient permettre à l’UA d’intervenir plus vite et plus efficacement. Mais, avertit, M. Djinnit, « nous pensons fortement que lorsqu’on déploie une opération de maintien de la paix, l’ONU devrait nous soutenir financièrement et logistiquement ».
Pour lui, il s’agit d’une même condition impérative, « compte tenu des montants en question, des centaines de millions de dollars » que coûtent ce genre de missions. Face à cette situation, M. Djinnit affirme que l’UA « essaie en Somalie un modèle différent qui appelle moins de gestion de la part de la Commission, mais suscite des réticences des États membres, selon le principe de l’autosuffisance des contingents pour six mois ». Et de conclure : « Nous sommes dans un processus et nous essayons de développer les outils pour prévenir les conflits. Le problème pour trouver les contingents se posera toujours. »

Salim Tamani