Alger pouvait-elle refuser une aide logistique à l’UA ?

Alger pouvait-elle refuser une aide logistique à l’UA ?

par Kharroubi Habib, Le Quotidien d’Oran, 2 février 2014

La secrétaire générale et porte-parole du Parti des travailleurs Louiza Hanoune n’a pas apprécié le soutien que l’Algérie a décidé d’apporter en transport aux troupes africaines en République centrafricaine (RCA). Pour elle qui dit la regretter, cette décision annoncée au dernier sommet de l’Union africaine par le Premier ministre Abdelmalek Sellal traduirait « un fléchissement de la politique extérieure du pays dû à l’existence d’une pression étrangère ».

De fait, il apparaît en l’occurrence qu’il a été quelque peu dérogé à la doctrine suivie par l’Algérie interdisant la participation de ses forces armées à des confits hors du territoire national. Les autorités du pays ont-elles été contraintes de s’y résoudre sous une « pression étrangère » ainsi que Mme Hanoune le soupçonne ou pour d’autres considérations ?

Rappelons d’abord que l’Algérie plaide la cause que les conflits en Afrique doivent être traités par les Africains et dans cette logique elle est partisane de la création d’une force d’intervention continentale sous égide de l’Union africaine capable d’exécuter les missions que celle-ci lui assignerait. Elle est également des pays qui ont préconisé la constitution d’une force de projection rapide constituée de contingents militaires fournis volontairement par les Etats qui en ont les moyens, en vue de faire face aux crises qui viendraient à secouer le continent avant que sa force d’intervention africaine envisagée ne soit opérationnelle.

Il nous semble que c’est son engagement en faveur de l’une et de l’autre préconisation qui l’a fait consentir à opérer « un fléchissement » à sa doctrine de refus d’engagement de l’armée nationale dans les conflits régionaux. Peut-être en effet s’en tenir strictement à cette doctrine et prôner dans le même temps la constitution de forces d’intervention africaines auxquelles elle refuserait la moindre contribution. Que l’Algérie se refuse à y contribuer sous la forme d’envoi d’un contingent militaire soit, mais elle ne peut en faire de même s’agissant d’un soutien logistique (ce qui est le cas annoncé par Abdelmalek Sellal) et financier. Les Africains ne le comprendraient pas et l’influence algérienne dans le continent en pâtirait sérieusement.

Le contexte régional et africain dicte à l’Algérie, non pas de changer de doctrine, mais de réfléchir aux formes de contributions qu’elle peut apporter en tant que puissance pole africaine aux actions qui se décideraient dans l’Union africaine pour faire face aux crises surgissant sur le continent. A se retrancher systématiquement derrière sa doctrine, l’Algérie donnerait du grain à moudre aux puissances étrangères extracontinentales qui s’arrogent le rôle de gendarmes en Afrique au prétexte que ses Etats qui en ont les moyens ne font rien qui rende possible des solutions africaines.

A des degrés divers, l’Algérie, l’Afrique du Sud, le Nigeria et quelques autres Etats africains ne peuvent faire l’économie de leur contribution à la création et à l’entretien d’une force d’intervention africaine. A eux d’en trouver la forme et d’en faire accepter le principe. Faute de quoi, ils favoriseront le « penchant » qu’ont d’autres Etats africains à solliciter l’intervention extra-africaine dont on sait que derrière elle se profilent toujours des intérêts et desseins inavoués.