Relance de l’Economie: Les dix «commandements» d’Ouyahia
par Z. Mehdaoui, Le Quotidien d’Oran, 19 octobre 2017
Pour ceux qui ont toujours reproché au gouvernement son manque de communication à l’égard des opérateurs économiques, le Premier ministre Ahmed Ouyahia a innové hier, en s’adressant, directement, aux concernés, sans passer par les «rapporteurs» classiques.
C’est, peut-être, une première en Algérie, un pays qui cherche encore un modèle économique qui allie, à la fois, capitalisme et socialisme. Le premier pour mettre fin à la dépendance aux hydrocarbures et le second pour préserver la paix et les acquis sociaux.
En effet, Ahmed Ouyahia, a été, hier, le pionnier à lancer directement, le débat avec les opérateurs économiques à l’occasion de l’Université d’été qu’organise le Forum des chefs d’entreprises (FCE) du 18 au 20 octobre, au Palais des Expositions à Alger.
Le Premier ministre ne s’est pas contenté de lire un discours et repartir comme c’est la coutume, chez tous les membres du gouvernement, mais a consacré toute la matinée à écouter les questions des industriels et autres entrepreneurs, en répondant à toutes les interrogations soulevées. Pour ceux qui l’ont sévèrement critiqué, ces dernières semaines, à cause des mesures qu’il a décidées, dès son installation à la tête du gouvernement, Ahmed Ouyahia a été très clair. « Le gouvernement a évité un arrêt cardiaque au pays » a-t-il déclaré, en rappelant les décisions qu’il a jugé nécessaires pour éviter une véritable catastrophe à l’Algérie depuis, notamment, l’épuisement du Fonds de régulation des recettes (FFR) en février dernier, sous l’ère de Abdelmalek Sellal, alors Premier ministre. Ahmed Ouyahia, dans la perspective de sortir de la crise et surtout de relancer la machine économique qui grince a fait état d’une dizaine de mesures qui devraient être prises, dès les semaines prochaines. Il s’agit, notamment, selon lui, premièrement de la relance de l’investissement public, avec la dotation du budget de l’équipement en 2018 de 4.000 milliards de DA, en hausse de 1000 milliards par rapport à l’année 2017. «Ces crédits comporteront près de 250 milliards de DA, directement destinés au développement local», a annoncé le Premier ministre, ajoutant que, le budget pour l’année prochaine comprendra, également, plus de 260 milliards de DA, destinés à la bonification des taux d’intérêt.
La deuxième mesure prévue dans le programme du gouvernement réside dans la relance de l’Agriculture avec la remise en activité de l’intense programme de soutien au secteur, tel que décidé par le chef de l’Etat, en 2009 et qui a été arrêté du fait de la crise financière.
La troisième mesure décidée réside dans l’allègement, au niveau des établissements bancaires, du poids des créances détenues par l’Etat sur des organismes économiques, à l’image de Sonatrach ou de Sonelgaz, mais aussi, du poids du financement du logement promotionnel. Ahmed Ouyahia, dans le même cadre, a déclaré que des « montants très importants » de liquidités seront, de nouveau, disponibles pour les crédits bancaires à l’investissement. La réactivation du Fonds national de l’Investissement (FNI) pour accompagner les gros investissements figure en quatrième position, alors que la cinquième mesure réside dans le fait de maintenir l’ensemble des mesures de soutien à l’investissement et à la bonification des crédits liés, également à l’investissement.
Le Premier ministre, pour ce qui est de la sixième mesure, a annoncé la création d’une cinquantaine de nouvelles zones industrielles, dans un délai n’excédant pas une année. La nouveauté, dans la création de ces nouvelles zones, tant réclamées par les industriels, réside dans le fait qu’elles seront placées sous la responsabilité du wali, en décentralisant la décision d’attribution qui intervient, désormais, au niveau local.
La septième mesure que le gouvernement s’apprête à appliquer, dans les semaines à venir, est une ancienne promesse qui peine à être concrétisée du fait de la bureaucratie et de certains fonctionnaires, peu soucieux de la loi et de la réglementation. Il s’agit d’une « décentralisation accrue » au niveau des wilayas, de tous les actes et procédures liés aux investissements, qu’il s’agisse des démarches au niveau des guichets uniques locaux ou de l’accès au Foncier industriel.
Le rétablissement de la priorité à la production nationale, dans le cadre de la commande publique est la huitième mesure que compte mettre en œuvre, le Premier ministre au moment où, en neuvième position le gouvernement compte, pour toute réalisation publique, recourir aux appels d’offre nationaux. Enfin, en dixième position, le Premier ministre Ahmed Ouyahia, a annoncé la mise en place de mesures de sauvegarde du marché national, pour, explique-t-il, réduire le volume des importations et préserver les réserves de change mais, aussi, pour permettre à la Production nationale et à l’Entreprise nationale de se réapproprier le marché local.
En contrepartie, Ahmed Ouyahia a exhorté les opérateurs économiques à aider le gouvernement, notamment, à «connaître la Production nationale», «travailler en collaboration avec l’Administration, notamment locale, pour établir une carte économique du pays», «contribuer à la réalisation ou la réhabilitation des zones industrielles», «investir dans le développement de chaînes de distribution locales de la Production nationale, manufacturée et agricole», «participer à la formation d’une main-d’œuvre qualifiée» et enfin, «prendre part à la recherche et développement en entreprise pour améliorer la qualité des produits et des prestations, de manière à aller vers les marchés extérieurs. Interrogé par le modérateur des débats sur le poids du commerce informel, le Premier ministre a affirmé que la lutte contre l’informel est une affaire politique. Même s’il ne le dit pas, l’on aura compris, dans la salle archicomble, qu’il faisait allusion aux milliers d’emplois générés dans le secteur et qui contribuent, en quelque sorte, à la paix sociale, en assurant un emploi, même précaire, aux jeunes en dépit du manque à gagner du Trésor public mais aussi de la concurrence déloyale dont souffrent les entreprises qui paient leurs impôts.
UGTA et FCE avec le gouvernement Ouyahia
L’Union générale des Travailleurs algériens (UGTA) ainsi que le Forum des chefs d’entreprise (FCE) ont affiché, clairement, leur soutien au gouvernement Ouyahia et par ricochet au président de la République, Abdelaziz Bouteflika.
Le secrétaire général de l’UGTA, Abdelmadjid Sidi Saïd a été à ce sujet, très clair. «Nous nous engageons à relever le défi en coordination avec le gouvernement pour pérenniser le dialogue et la concertation», a déclaré le patron de la Centrale syndicale qui ajoute que son organisation et le FCE sont déterminés à accompagner l’exécutif pour le développement et la croissance économique mais, aussi, pour préserver la paix sociale. Dans une motion de soutien signée par l’UGTA et le FCE et lue par Sidi Saïd, les deux organisations ont, clairement, fait état de leur «soutien indéfectible» au chef de l’Etat pour mettre en place «une Economie durable».
Le président de Jil FCE, Mohamed Skander a déclaré, pour sa part, que l’Organisation patronale que dirige Ali Haddad, restera, toujours, mobilisée aux cotés du président de la République et du gouvernement, afin de trouver des «consensus économiques».