Bouteflika ordonne d’assouplir la loi de finances 2017
IL A INSTRUIT SELLAL DANS CE SENS
Bouteflika ordonne d’assouplir la loi de finances 2017
Le Soir d’Algérie, 21 septembre 2016
La copie préliminaire du gouvernement portant avant-projet de loi de finances pour 2017 devrait subir de significatives modifications. Selon une source sûre, Abdelaziz Bouteflika aurait instruit le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, dans ce sens. «Le Président a ordonné à Abdelmalek Sellal de bien maturer le projet pour amortir ses impacts sur le front social», nous confie-t-on.
Kamel Amarni – Alger (Le Soir) – «D’ailleurs, c’est ce qui explique le report, à la dernière minute, de la réunion du Conseil des ministres restreint qui devait être consacrée, dimanche dernier, essentiellement à cet avant-projet de loi de finances».
Cet avant-projet, pour rappel, préparé par le ministère des Finances a été examiné en réunion du gouvernement mais n’a toujours pas été encore soumis à la seule autorité qui compte : celle du Conseil des ministres et donc, de Abdelaziz Bouteflika. Rien n’est, en effet, «officiel» avant les arbitrages décisifs de Bouteflika. Mais les grandes orientations de ce dernier sont déjà assez claires : il faut, à tout prix, éviter de «provoquer» le front social.
Il faut dire que le texte préliminaire du gouvernement prévoit une série de nouvelles taxes telles que, à coup sûr, il provoquerait des augmentations des prix en chaîne, et touchant quasiment tous les produits. Ce qui provoquerait une brutale érosion du pouvoir d’achat, avec tous les risques que cela comporterait sur la stabilité du front social, voire sur la sécurité nationale tout court ! Le front social justement qui constitue la véritable hantise permanente de Bouteflika. Toute la politique du gouvernement de ces dernières années est imaginée, menée et dirigée dans ce sens, quitte à faire des concessions ou à renoncer à des réformes nécessaires parfois.
Un état d’esprit que résume si bien la fameuse phrase de Ahmed Ouyahia et avec laquelle il expliquait les mesures d’urgence et extrêmement coûteuses prises par Bouteflika en 2011 pour anticiper toute contestation de rue dans le sillage de la tempête qui s’abattait sur les pays de la région. «La paix sociale n’a pas de prix», répondait tout bonnement Ouyahia, alors Premier ministre.
Cette année encore davantage, c’est le front social qui préoccupe le plus le régime Bouteflika. A deux reprises, il était intervenu personnellement pour ordonner de «calmer le jeu», sur deux sujets distincts. D’abord au sujet de la fracassante sortie de l’actuel ministre du Tourisme, de l’Artisanat et de l’Aménagement du territoire, Abdelwahab Nouri, qui, en marge d’une visite de travail à Tipasa, dénonçait ce qu’il appelait «un crime au sens propre du terme» s’agissant d’attributions de parcelles de terrain au niveau de Dounia Parc à Alger. «Cette déclaration, et contrairement à ce que d’aucuns avaient compris, ciblait non pas l’ancien ministre, Amar Ghoul, mais le Premier ministre, en vue de l’affaiblir», nous confie-t-on. C’est d’ailleurs Sellal qui réagira en premier pour désavouer carrément son ministre du Tourisme, «sur ordre venu d’en haut», c’est-à-dire Bouteflika.
C’est également ce dernier qui a donné instruction ferme, pour cesser la tapageuse polémique autour de la participation de l’Algérie aux derniers Jeux olympiques de Rio. «Il ne faut prendre aucun risque sur le front social, aucun foyer d’incendie, le plus insignifiant soit-il ne devrait être toléré avec un front social déjà assez fragile, qui manifeste des résistances très fortes par rapport au projet de réforme des retraites. Avec autant d’ingrédients assez détonants, on ne va tout de même pas en rajouter avec des augmentations des prix traumatisantes, à plus forte raison en cette année 2017 qui, ne l’oublions pas, sera celle des élections», nous révèle notre source. En clair, il est demandé au gouvernement Sellal d’amortir au maximum le choc d’une loi de finances qui, il est vrai, devrait, par ailleurs, tenir compte de la réalité peu reluisante des capacités financières du pays.
Avant même les arbitrages décisifs de Bouteflika, les premiers signes sont déjà là : par divers canaux, le gouvernement lance quelques messages de nature à rassurer les ménages en excluant toute nouvelle augmentation sur les prix de deux produits vitaux que sont l’eau et l’électricité.
C’est dans cette même case qu’il faut insérer l’annonce faite lundi dernier par le ministre du Commerce, Bakhti Belaïb, et relative à lever l’interdiction d’importation de véhicules âgés de moins de trois, instaurée depuis 2005. Une manière pour le gouvernement d’alléger un peu la pression sur le citoyen dans ce domaine.
D’autres mesures similaires sont à prévoir avant que le projet de loi de finances ne soit soumis à une Assemblée populaire nationale dont tous les membres sont déjà en précampagne électorale…
K. A.