Bouteflika et Lamari enterrent leurs divergences

[Aps 3/7/03] Alger – Le président de la république, M. Abdelaziz Bouteflika a prononcé,
jeudi, un discours à l’occasion de la célébration du 41-eme anniversaire de la fête de
l’indépendance et de la jeunesse. En voici le texte intégral.

 »Nous célébrons aujourd’hui notre fête de l’indépendance et de la jeunesse, et c’est pour moi
l’occasion de m’adresser aux Algériennes et aux Algériens et en particulier à notre jeunesse
que nous entourons de notre affection et qui est au centre de nos préoccupations. C’est aussi
l’occasion pour moi de m’adresser aux officiers et aux djounoud de l’armée nationale populaire dignes successeurs des combattants de notre glorieuse armée de libération nationale qui ont arrache l’indépendance de l’Algérie par leur lutte et par leurs sacrifices.
C’est enfin l’occasion ou, traditionnellement, sont annoncées les promotions dans les rangs
de l’armée, je tiens à féliciter chaleureusement tous ceux qui ont bénéficie de ces promotions,
leur souhaitant plein succès dans leur nouveau grade pour une carrière toujours plus brillante
et pour le plus grand bien du pays.
Algériennes, Algériens,
Officiers supérieurs,
Officiers,
Sous-officiers,
Djounoud,
Le peuple algérien célèbre chaque année avec toute la solennité que requiert un tel
événement national, la fête de l’indépendance et de la jeunesse. Cette célébration établit un
lien solide entre la lutte de libération nationale menée par des générations de militants et de
moudjahidine et l’espoir porte par les générations montantes de l’Algérie libre et
indépendante. Elle comporte, bien au-delà de sa valeur symbolique, une densité historique
dont il convient, chaque année, de bien mesurer la portée.

La célébration de la fête de l’indépendance et de la jeunesse c’est bien sur, d’abord et avant
tout, un devoir national de reconnaissance a l’égard de nos glorieux martyrs, mais c’est aussi,
un témoignage renouvelé de confiance en l’avenir pour notre jeunesse qui, fidèle aux idéaux
de la révolution et a son message, porte en elle l’espérance de la nation.

Cette commémoration est, a tous égards, un moment privilégie de réflexion nationale, car il
est des moments dans la vie d’une nation ou il devient opportun et nécessaire de faire le point, de s’interroger sur le parcours emprunte, de mesurer le chemin parcouru, d’évaluer les
enseignements du passe par rapport aux objectifs et aux aspirations légitimes du peuple. A cet égard, cet anniversaire prend, cette année précisément, une signification et un relief
particuliers au moment ou notre pays traverse une douloureuse épreuve qui vient s’ajouter
encore a celles que nous avons subies durant ces dernières décennies.

Pendant de longues années, notre pays a souffert de maux divers dont la précarité sociale, la
détresse de larges couches de la population, le désarroi de la jeunesse victime de l’échec
scolaire ou confrontée au chômage et sans perspective d’avenir. Cette situation persistante et
difficilement supportable a exacerbe les contradictions, les frustrations et les antagonismes au
sein de la société, laissant la porte ouverte aux démons de la haine et de la division qui ont
affaibli la conscience nationale, fissure la cohésion sociale et ébranle l’unité nationale. C’est
dans un tel contexte que les événements dramatiques de la dernière décennie ont révélé et
accentue le mal profond qui affectait l’ensemble des institutions du pays.

Fragilisé, l’état déjà en crise s’est, de ce fait, trouvé dans l’incapacité d’assumer la plénitude
de ses missions et de ses responsabilités particulièrement délicates dans un moment aussi
grave pour l’avenir du pays.

Face a cette situation, les Algériens et les Algériennes se sont ressaisis et l’armée nationale
populaire répondant a l’attente angoissée de la nation a, dans ces circonstances dramatiques,
assume pleinement ses responsabilités historiques en préservant la sécurité et l’intégrité du
territoire, l’unité du peuple et le caractère républicain de nos institutions tout en sauvegardant
le processus démocratique en cours. Quelqu’un a dit :  »l’armée garde la nation jusqu’au
moment ou elle la sauve ». En vérité, l’armée nationale populaire a sauvé la patrie et la
république.

Elle a tenu avec dignité, sang-froid et lucidité, a préserver son unité, sa cohésion et sa
discipline et à manifester sans équivoque son attachement aux principes de notre constitution.
L’institution militaire a su, également, se montrer au niveau de sa mission sacrée durant
toutes les épreuves qui ont frappe la société algérienne.
L’armée nationale populaire a enfin contribue a réunir les conditions objectivement
favorables a l’accomplissement du processus engage pour conduire démocratiquement le pays vers un état de droit, républicain, moderne et au service exclusif des citoyens.
Aussi, dois-je, aujourd’hui, saisir cette occasion pour renouveler, solennellement, au nom de
la collectivité nationale, notre reconnaissance et notre solidarité à l’égard de l’armée nationale
populaire et de toutes les forces de sécurité qui ont, bien mérite de la patrie en ces moments
particulièrement difficiles.

Au nom du peuple algérien, je m’incline avec émotion a la mémoire des martyrs du devoir
parmi les officiers supérieurs, officiers, sous officiers, djounoud tombes au cours de la
tragédie nationale, dans l’accomplissement de leur mission.

Officiers supérieurs,
Officiers,
Sous-officiers,
Djounoud,
Vous avez combattu avec courage, énergie et détermination les forces obscurantistes et de
destruction qui ont tente de s’imposer à la société, en piétinant nos valeurs les plus sacrées et
portant atteinte a la dignité et a la conscience des hommes et des femmes de ce pays. Dans
cette lutte qui nous a été imposée, vous avez mené sur le terrain et au péril de votre vie, un
combat toujours difficile, souvent périlleux mais, de toute évidence a la mesure de vos
capacités, de vos convictions et de votre sens du devoir.

Mais vous avez du aussi, plus péniblement, affronter avec un égal courage les formes les
plus sournoises de ce combat par lesquelles on a tente, en vain, de ternir l’image et l’honneur
de notre institution militaire. Alors que la population algérienne était livrée à la violence et au
terrorisme sanguinaire dont les traces marquent encore profondément toutes les couches de la société, alors que vous combattiez cette barbarie au nom d’un état de droit dont la mission
première est d’assurer le droit a la vie et a la sécurité de tous les citoyens, votre combat
héroïque a donne lieu a des attaques inqualifiables contre l’armée nationale populaire et les
services de sécurité, attaques insidieuses, ignorant délibérément les crimes odieux que vous
combattiez au nom de la liberté et de la dignité du peuple algérien. Ces accusations
infamantes et l’exploitation politique qui en a été faite, voulaient se donner pour fondement la
défense des droits de l’homme.

Faut-il rappeler que l’Algérie a subi dans son âme et dans sa chair la mutilation de la
domination coloniale et les épreuves d’une guerre de libération nationale particulièrement
atroce et meurtrière comme l’opinion internationale commence seulement aujourd’hui a le
découvrir ? Cela suffirait a faire comprendre pourquoi nous sommes, nous les Algériens
beaucoup plus que d’autres, attentifs aux problèmes des droits de l’homme et au respect de la personne humaine.

C’est dire aussi combien nous avons péniblement vécu ces accusations qui ont soulevé
l’indignation unanime de tous les Algériens.
En nous prêtant aux contrôles internationaux les plus divers, nous avons d’ailleurs tenu a
traduire concrètement l’extrême sensibilité du peuple algérien aux questions touchant aux
droits de l’homme, sous tous leurs aspects. Nous avons accueilli, sans réserve et sans
restriction, toutes les organisations non gouvernementales qui ont manifeste le désir de
s’informer sur la situation des droits de l’homme dans notre pays. Nous leur avons accorde
toutes les facilites pour le bon déroulement de leurs missions d’information, nous avons même
rendu publics leurs rapports et nous avons tenu le plus grand compte de leurs conclusions et
de leurs observations chaque fois qu’elles nous ont paru pertinentes et compatibles avec
l’exercice de notre souveraineté et de notre responsabilité.

Aujourd’hui, l’Algérie se félicite que, depuis les événements du 11 septembre 2001, la lutte
contre le terrorisme soit devenue une préoccupation universelle, que la communauté
internationale ait, enfin, pris conscience du danger que ce fléau représente et du bien-fondé du combat que nous avons soutenu pendant plus d’une décennie, seuls et dans l’indifférence
générale. L’opinion publique internationale découvre aujourd’hui seulement le sens et la
nature de la lutte anti-terroriste que nous avons menée avec nos propres moyens et l’injustice
de la campagne qui a été dirigée systématiquement contre notre pays et nos institutions. Ces
attaques inadmissibles et grotesques ont été rigoureusement dénoncées et continueront à l’être sans relâche. Notre vigilance a ce sujet ne se relâchera pas car nous nous voulons permettre a l’armée nationale populaire et aux services de sécurité de continuer à accomplir sans complexes, avec la même foi et le même dévouement leur mission au service du peuple
algérien.

L’Algérie est maintenant sortie du tunnel, mais elle porte toujours en elle-même les traces
du traumatisme qu’elle a subi. Le terrorisme, directement responsable de la crise qui a secoue
le pays tout entier, doit être éradiqué. C’est une condition nécessaire pour que la sécurise soit
définitivement assurée sur l’ensemble du territoire national et pour que l’autorité de l’état soit
totalement restaurée.

Mais il est aussi nécessaire pour nous de tirer les leçons de cette tragique épreuve. Nous
devons prendre conscience de la profondeur du mal, analyser rigoureusement les causes de
cette crise nationale, évaluer ses conséquences sur la vie politique, institutionnelle,
économique et sociale du pays et envisager, les dispositions a prendre pour que notre pays ne connaisse plus, a l’avenir, de tels déchirements et que nous puissions tous ensemble oeuvrer pour le rétablissement définitif de la sécurité, de la paix et de la concorde.
A vrai dire, les causes réelles de la crise sont, aujourd’hui, très largement identifiées. J’ai
déjà eu, a maintes reprises, l’occasion de les développer et d’indiquer que seules les
transformations profondes de nos institutions et de notre société peuvent nous permettre de
résoudre les problèmes de fond auxquels notre pays est confronte, qu’il s’agisse des structures et des missions de l’état, de la justice, du système éducatif ou de notre organisation
économique et sociale.

La réforme de l’Etat, la reforme de la justice et la reforme du système éducatif, qui occupent
une place prépondérante dans le programme de renouveau national que je me suis engagé à
réaliser, sont désormais en chantier. Il s’agit la d’une œuvre de très longue haleine. Pour
préparer ces grandes reformes qui engagent l’avenir du pays, nous avons adopte une approche privilégiant l’action réfléchie et responsable et excluant toute démarche hâtive et improvisée car il nous faut être a la mesure des défis que nous nous sommes engagés à relever. La portée de ces reformes et les attentes légitimes qu’elles suscitent sont telles que leur réalisation doit s’appuyer sur une volonté politique forte et durable, perçue comme telle par l’ensemble des responsables et des citoyens. Les reformes doivent donc se traduire concrètement par une mise en œuvre certes graduelle, mais effective et transparente, en harmonie avec la vision globale qui les a inspirées.

La réforme de l’Etat conditionne, en grande partie, tous les autres chantiers entrepris. Par
son ampleur et ses enjeux elle concerne la société toute entière. Il est donc nécessaire qu’elle
procède d’une claire vision des réalités économiques, sociales, politiques et institutionnelles
du pays et d’une bonne perception des attentes réelles de la société qui manifeste, à juste titre, des exigences de bonne gouvernance et de moralisation de l’action publique. Cette réforme s’articule autour d’une certain nombre de principes novateurs et d’axes porteurs qui définissent un nouveau type de rapports avec la société en constante évolution. La finalité de cette réforme vise l’instauration d’un état de droit dont l’action doit être soutenue par une pratique réglementaire et institutionnelle bien définie. Un état démocratique, moderne et efficace capable d’accomplir ses missions et d’assumer ses responsabilités, retrouvant ainsi la
considération, l’adhésion et la confiance des citoyens. La réforme de l’état, n’aura, en effet,
accompli sa finalité que si elle parvient a promouvoir une nouvelle culture du service public et
a rétablir des relations saines et confiantes entre l’état et le citoyen.

La reforme de la justice qui constitue avec la réforme de l’état le socle sur lequel doit se
construire l’état de droit, nous permettra d’élaborer un modèle de justice conforme a nos
valeurs, a nos principes et a nos idéaux, charge de protéger a la fois les intérêts de la société et les droits et libertés individuelles et de reconquérir la confiance des citoyens. La reforme de la justice, pierre angulaire de l’édifice que nous voulons mettre en place, sera conduite de
manière déterminée et résolue mais avec la sérénité nécessaire car elle constitue la clé de
voûte de l’équilibre et de la stabilité de notre société.

De son cote, la reforme du système éducatif représente le plus complexe et le plus
ambitieux des défis que nous devons relever parce qu’il engage a la fois les générations
futures, l’évolution et l’équilibre de notre société et parce qu’il conditionne le développement
économique, scientifique et technologique de notre pays ainsi que son rayonnement dans le
monde.

Cette importante reforme demeure une priorité nationale. Sa réalisation désormais
programmée, et sa mise en œuvre progressive intégreront d’une manière cohérente tous les
éléments éducatifs et culturels constitutifs d’une véritable politique novatrice de l’éducation
nationale fondée sur les principes et les valeurs de notre société et de plus, résolument
engagée dans le mouvement vers le progrès, ouverte sur le monde et déterminée a relever les
défis de la modernité.

La réalisation de ces trois grands chantiers ne peut, bien entendu, être dissociée de la mise
en oeuvre de notre politique économique et sociale qui demeure une de nos préoccupations
constantes. La restructuration de l’économie qui se poursuit doit être nécessairement
accompagnée de mesures visant a préserver et a promouvoir l’emploi et le progrès social en
prenant en charge les besoins essentiels des citoyens. Nous accordons le plus grand intérêt a la promotion du dialogue et de la concertation avec les partenaires économiques et sociaux.

Les récentes épreuves que le pays a douloureusement et courageusement affrontées ont permis de prendre la mesure de cette cohésion a travers l’élan de solidarité nationale qui s’est
spontanément manifeste dans tout le pays et qui témoigne, par-delà les difficultés de la vie
quotidienne de chacun et, en dépit de la fragilité du tissu social, de la réalité et de la solidarité
de notre unité nationale.

Chacun peut constater maintenant que l’Algérie a reconquis sa place sur le plan
international, et qu’elle a repris le rôle qu’elle a toujours joue, notamment, en Afrique, dans le
monde arabe et en Méditerranée.

Le rayonnement de notre pays a travers le monde est réel et on a pu en mesurer l’ampleur
par l’élan de sympathie internationale dont nous avons été entourés lors du tremblement de
terre, particulièrement meurtrier que nous avons subi. Cette image en tout point honorable de
l’Algérie sur la scène internationale est le fruit d’un long travail d’information et d’explication,
qui a du affronter une campagne de dénigrement particulièrement odieuse qui nous a porté un
lourd préjudice pendant plus d’une décennie. Cette image doit maintenant être confortée par
un redressement rapide de notre situation intérieure, démontrant notre capacité à assumer
pleinement le développement de notre pays dans tous les domaines.

La réalisation des grandes réformes que nous avons entreprises doit nous permettre, à terme,
d’atteindre nos ambitieux objectifs.

L’armée nationale populaire, qui a toujours participe activement a la reconstruction
nationale, à l’édification et au développement du pays, a sa place dans ce grand mouvement
rénovateur ou elle mettra son immense potentiel au service de la construction de la société
algérienne nouvelle.

Notre politique de défense nationale doit désormais tenir compte des impératifs de la
sécurité internationale et, de ce fait, elle est indissociable de notre action diplomatique. Or,
des incertitudes continuent de peser sur l’évolution du monde. L’environnement stratégique
international, dans son ensemble, n’est pas exempt de dangers et l’instabilité dans certaines
régions africaines menace toujours la sécurité de notre continent. Devant une situation aussi
inquiétante et dont l’évolution est a bien des égards, imprévisible, l’Algérie doit pouvoir, en
toute circonstance, garantir sa propre sécurité et son indépendance nationale et exercer
pleinement ses responsabilités internationales et régionales notamment en Afrique et en
Méditerranée. C’est l’un des grands enjeux de la professionnalisation et de la modernisation de notre armée, c’est même un défi que l’armée nationale populaire sera, encore une fois, j’en suis profondément convaincu, en mesure de relever.

Officiers supérieurs,
Officiers,
Sous-officiers,
Djounoud,
L’armée nationale populaire est la digne héritière de notre glorieuse armée de libération
nationale. Fidèle aux idéaux de la révolution de novembre, aux principes fondamentaux de
notre république et au serment qui la lie à la nation elle est plus que jamais prête à prendre
part a notre grande œuvre de rénovation nationale et a y participer avec une conscience aigue
de ses potentialités et de ses obligations et un sens élevé de son devoir, car notre pays se
trouve à la croisée des chemins pour le choix de son devenir.

N’oubliez pas que ce sont les servitudes de sa mission qui font la grandeur de l’armée.
A l’occasion d’une commémoration aussi solennelle que celle de notre fête de
l’indépendance et de la jeunesse, vous devez savoir définitivement que le président de la
république, garant de l’unité de l’Algérie et responsable suprême des grands choix qui
engagent le destin de la nation, considère que la défense de l’honneur de l’armée et de son
unité est, en toute circonstance, l’un de ses devoirs les plus sacrés et l’une de ses missions les
plus élevées. Du reste, ce n’est pas sans raison que, comme les années précédentes, il a tenu à procéder à cette commémoration dans votre environnement et avec votre pleine participation.
Vive l’Algérie et gloire à nos martyrs.