Les militaires déployés sur la frontière
Bande frontalière ouest
Les militaires déployés sur la frontière
El Watan, 7 février 2016
Il y a 15 mois, l’armée algérienne avait entrepris le creusement de tranchées sur la bande frontalière ouest pour, officiellement, lutter contre les trafics en tout genre.
Une barrière s’étalant sur 170 km, de Marsat Ben M’hidi (extrême ouest du pays) jusqu’aux limites avec la wilaya de Naâma. Quelques semaines plus tard, le royaume chérifien a riposté en érigeant, parallèlement, un grillage haut de 3 mètres pour, selon la version du gouvernement marocain, barrer la route aux migrants subsahariens irréguliers.
Curieusement, ni les tranchées et encore moins le grillage n’ont réussi à éradiquer, ou du moins atténuer, la contrebande et le crime organisé. Au contraire, aussi paradoxal que cela puisse paraître, jamais les trafics en tout genre n’ont été aussi importants.
A titre d’exemple, concernant la drogue seulement, pas moins de 120 tonnes de résine de cannabis ont été introduites sur le territoire national pendant cette période où, apparemment, les frontières étaient hermétiquement fermées.
Autant dire que les narcotrafiquants, en dépit des «obstacles» décidés par les deux pays, ont eu tout le loisir d’acheminer leurs marchandises prohibées vers les wilayas limitrophes (Aïn Témouchent, Sidi Bel Abbès, Oran) et celles du Sud-Ouest.
Et de nous interroger : comment cette frontière fermée officiellement en 1994, puis renforcée par des fossés, un mur métallique, des postes avancés des gardes-frontières et des patrouilles des services de sécurité, est demeurée une frontière passoire ?
Plusieurs jours d’investigations sur les lieux nous ont permis de découvrir le «pot aux roses». Sur le tracé frontalier, il existait, il y a à peine quelques semaines, 25 passages qu’on ouvrait temporairement en faveur des trafiquants «autorisés» à conclure leurs transactions, un «import-export» dont tout le monde est au courant.
Des passages qui suscitent mille et une questions. Une sorte de postes frontaliers faussement légaux dont tout le monde savait la présence et dont personne ne semblait se préoccuper. Trêve de complicités et de plaisanterie, serions-nous tentés de dire. Devant cette ampleur, l’armée a entrepris, il y a une quinzaine de jours, l’élargissement des tranchées à 7 mètres et leur approfondissement à 11 mètres.
Cette opération d’envergure ne passe pas inaperçue dans la région, puisque des véhicules militaires, «encadrés» du ciel par un hélicoptère, ces derniers trois jours, suscitent la curiosité et donnent libre cours aux conjectures et autres hypothèses.
Sur le terrain, cette nouvelle opération, qui consiste à cadenasser réellement nos frontières avec le royaume chérifien, a donné ses fruits : aucune goutte de carburant (essence et gasoil) ne passe de l’autre côté.
Les stations-service des 53 communes de la wilaya dservent les automobilistes sans chaîne et en un temps record. Une véritable bouffée d’oxygène pour les autochtones. Un rêve dont les automobilistes ont été privés depuis de longues années dans cette partie de l’Algérie.
Le visiteur de la bande frontalière a tout le loisir de remarquer les tentes des militaires déployés en grand nombre sur le tracé frontalier. Des véhicules militaires sillonnent en permanence les lieux. Quand on veut, on peut.
Chahredine Berriah