Le général Touati répond à Belaïd Abdesselam

Le général Touati répond à Belaïd Abdesselam

Le Soir d’Algérie, 30 juillet 2007

Lorsque les hasards de l’existence hissent un homme au poste le plus élevé lui confiant, même provisoirement, l’honneur de gouverner ses semblables, cette dignité lui impose la retenue dans l’expression, la mesure dans ses jugements, un vocabulaire digne de sa haute fonction et le rejet de l’allégation diffamatoire. Loin de respecter les limites imposées par sa haute fonction, Monsieur Belaïd Abdesselam, dans l’outrage au bon sens commis sur Internet, a cru plus aisé d’imputer à d’autres les raisons de ses médiocres performances.

Trahissant une fixation obsessionnelle sur ma personne, il me charge de tous les péchés de la création ou plus précisément de toutes les causes précipitant la chute de son gouvernement. Et, tout au long des 321 pages de ce « réquisitoire », il me cite à 368 reprises, selon la presse. Qui veut trop prouver, ne prouve rien. Ce n’est pas en répétant une ineptie des centaines de fois qu’elle devient vérité. Pour ma part et par respect de mon pays et de l’uniforme que j’ai porté pendant plus de 45 ans, je n’utiliserai pas ce langage vulgaire dans ma réplique. Pour reprendre les termes mêmes usités par mon détracteur, je ne « cracherai » (sic) sur personne car je n’ai aucune « bile à broyer » (resic) et n’aurai donc pas à « pisser du vinaigre » (reresic) n’ayant de haine contre quiconque.

Je me limiterai aux propos dignes d’un dialogue avec un chef de gouvernement, abstraction faite de l’individu, qui en a exercé momentanément la charge. Bien entendu, je ne voudrais lasser personne par 368 réponses. Apporter des éclaircissements ou des rectifications aux allégations avancées pourrait paraître comme des justifications. Cependant, quelques points méritent d’être relevés et traités. Ils sont, pour partie, d’ordre personnel et, pour partie, d’ordre professionnel.

Aspects d’ordre personnel

A propos de patriotisme : Monsieur l’ex-chef du gouvernement découvre que mon patriotisme n’est pas à son goût. J’aurais aimé ne pas avoir à parler du tout de ce sujet. Mais il faut bien que ce « patriote de référence » entende des vérités qui s’éloignent de ses certitudes et de ses « a priori ». Auprès des gens de ma région et des villages avoisinants, il aurait appris qu’en matière de lutte de libération, dans nos montagnes, les femmes, les hommes, le cheptel, les vaches et les chèvres,… les maisons et même les oliviers ont contribué par leur apport à la guerre de Libération nationale y compris quand les villages ont été évacués ou rasés sous le régime des « zones interdites » qu’il n’a jamais connu, lui, et encore moins subi. Par fidélité à la mémoire des miens, aux Chouhada et aux Moudjahidine, notamment ceux de ma région, je ne peux manquer de préciser à l’adresse de ce parangon du nationalisme pur et dur, que durant la guerre de Libération, alors que mon père en avait les moyens et les locaux, il a refusé d’aller habiter en ville, malgré mes demandes. Il s’est interdit tout autre sort que celui des gens du douar. Le 11 juin 1958, le bombardement quasi à vif de mon village en « zone rebelle » laissa maisons en ruine, cheptel éventré, provisions ensevelies ou volatilisées, familles sur les sentiers de l’exode terrorisées par les vrombissements des straffings aériens. Ce jour-là, mon village et le village voisin devaient enterrer quarante (40) victimes. Je me donne, ici, l’occasion de rendre hommage à une grandmère courage et à des dizaines de femmes comme elle. Alors que les maisons étaient évacuées, fumantes et en ruine, elle conduisit sa nombreuse nichée par monts et par vaux, les habits déchirés par les ronces, fourbue de fatigue, portant entre ses bras un jeune bébé, l’enfant de son fils au maquis depuis 1955. Excédée par les piqués incessants des aviateurs qui s’amusaient à les effrayer par des tirs d’encadrement, elle s’est redressée et tournée vers l’avion en piqué, et levant très haut son petit-fils, elle cria à tue-tête « Aouitheth ma tsouthem dhagroudh a yaguhi »; disant : « Tapez tant que vous voulez. C’est un enfant que je protège et non autre chose que je cache ». Ce maquisard a survécu après sept ans de maquis en Wilaya 3. C’est mon frère. Ce n’était pas le seul parent engagé dans la lutte. Il y eut même, bien avant le 1er Novembre 1954, un compagnon d’Ouamrane et d’Amar Naït Chikh. J’ai connu et vécu ce que des milliers de familles algériennes ont connu et vécu. La peur des ratissages, des fouilles et contrôles, de la descente ou d’encerclement quand une section de l’ALN est à la maison avec l’inévitable « Asselagh » pour effacer toutes traces de pataugas sur le sol. La hantise de ne pouvoir obtenir le bon de ravitaillement pour l’alimentation familiale, le braquage par des militaires hyper-excités après un attentat, les attentes angoissantes devant les bouchkaras, etc. Ce sont des notions inconnues par cet «accusateur public» à partir de son maquis de «Lausanne» au lendemain de la grève. Il est vrai qu’il s’est quand même rapproché des zones de lutte pour servir au sein du ministère des Affaires sociales du GPRA dans la capitale tunisienne. Faut-il rappeler que mon détracteur, le membre du Comité central du vénérable PPA/MTLD, ne s’est exercé à jouer les foudres de guerre qu’une fois l’indépendance acquise. Membre fondateur de l’UGEMA, ayant appelé étudiants et lycéens à la grève illimitée, pour rejoindre les maquis parce « qu’avec de meilleurs diplômés, on ne fera pas de meilleurs cadavres », l’activiste qui appelle les jeunes à rejoindre les maquis se garde bien de suivre l’exemple des Allaoua Ben Batouche (chahid), Yahia Lyès Kalache (chahid), Lamine Khène, Ali Lounici, Boualem Oussedik, Djillali Rahmouni, Arezki Harmouche et bien d’autres ! La formule «armons-nous et partez» a toujours de courageux adeptes ! Les souffrances, l’endurance, les sacrifices des uns et des autres, y compris parmi mes proches, imposent modestie et humilité. Je rappellerai simplement mon arrestation avec neuf de mes camarades à Paris le 26/01/1957 et mon transfert à Alger. C’était le jour où les trois bombes explosaient à la Cafétéria, à l’Otomatic et au Coq Hardi. La grève des huit jours, je l’ai passée au Centre d’internement de Béni Messous à Alger. Cela me donna l’occasion de constater l’extraordinaire adhésion populaire à notre cause, celle du FLN .

Aspects d’ordre professionnel

A propos des allégations au sujet de mes contacts avec le Trésor français : En 1993, mes seuls contacts avec les fonctionnaires français se limitaient aux formalités de police et de douane à Orly. Penser un seul instant qu’une structure technique comme le Trésor français puisse un jour dialoguer avec un général étranger quel qu’il soit, relève à l’évidence de l’ignorance ou du seul désir de nuire sans crainte du ridicule. A propos de confusion, l’actuel vice-gouverneur de la Banque d’Algérie Ali Touati, se rappelle parfaitement bien de toutes les missions accomplies de 1991 à 1996, lorsqu’il était directeur général des changes, et à ce titre, interlocuteur privilégié du Trésor français. Comme quoi, on peut être de la même famille et porter le même nom sans pour autant occuper les mêmes fonctions ! Ce même Ali Touati se souvient du scepticisme des spécialistes provoqué par les contorsions tendant à inventer des montages financiers inédits, spécifiques et atypiques, et inévitablement hypothétiques. Résultats ? Ce chef du gouvernement a laissé l’Algérie en cessation de paiement larvée obligeant la Banque d’Algérie à recourir à la pratique périlleuse des «suspens». Cette méthode consiste à cumuler des arriérés de paiement «par roulements » sans dépasser une périodicité de soixante jours et éviter d’être déclaré en sinistre, échappant ainsi à de très lourdes sanctions financières. Grâce à quoi et par cumulation des arriérés de paiement, on a pu «gonfler» notre niveau de réserves de changes à 2 milliards de dollars US au moment de la cessation de fonction du chef du gouvernement. Signalons qu’un milliard relevait des dépôts privés et qu’il ne pouvait rien rester en caisse si les factures avaient été honorées à échéance. Ces informations émanaient d’une rencontre d’experts algériens invités à se prononcer sur l’opportunité ou non d’un rééchelonnement de la dette. Le Conseil consultatif national a eu droit aux critiques les plus acerbes pour avoir osé demander ce qu’il adviendrait de l’Algérie si le prix souhaité du pétrole n’était pas au rendez-vous. Ainsi, l’alternative au rééchelonnement de la dette extérieure n’était qu’une forme de pari hasardeux à très court terme sur un baril à 22 $ pendant cinq ans ! Pour un nationaliste, engager ainsi et pour si longtemps son pays comme on engage une mise au poker n’est certainement pas prudent ! C’est même exagérément risqué ! Quant à accuser le gouverneur de la Banque d’Algérie de «trahison » pour avoir été «incapable» de remplacer toute la monnaie fiduciaire en circulation en quelques mois, ceci relève bien de l’incompétence en la matière, de l’irresponsabilité et de l’ingratitude. – De la protection ouverte que j’aurais apportée à de gros importateurs : C’est précisément ce genre d’ineptie qui m’a décidé à répondre à la série d’allégations proférées par cet ancien dignitaire de l’Etat. Je n’ai jamais eu, à ce jour, le moindre rapport avec les milieux d’importation. J’ai même interdit à mes enfants de s’y engager pour éviter toute interférence regrettable dans mes fonctions et les mettre ainsi à l’abri d’approches intéressées et peu fiables. Je pense pouvoir deviner un des deux importateurs auxquels il est fait allusion. Il avait la réputation d’être proche du RCD. Moi-même, pour mon accusateur, je le suis également et la boucle est bouclée : je suis donc protecteur de cet importateur. Un tel raccourci illustre la légèreté de jugement de son auteur. Monsieur Abdesselam en est venu à cette interprétation (protection d’importateurs) lorsque je lui ai dit dans son bureau et en face, qu’un des rédacteurs du code des investissements m’a dit être dépité et déçu par l’ajout de sa formule finale. Elle vidait de sa substance novatrice le texte élaboré. Je l’ai fait très spontanément comme on le fait dans l’armée vis-à-vis de ses chefs, sans penser un seul instant que ceci pouvait donner lieu à une interprétation mettant en cause ma probité. Ainsi, la moindre réserve à l’endroit de son point de vue est synonyme de trahison. – De ma prétendue rencontre avec M. Juppé : Je n’ai jamais rencontré personnellement M. Juppé. La seule et unique fois où je l’ai vu, ce fut au cours d’une réception à Djenane El Mithaq (établissement officiel) au cours d’un déjeuner auquel j’ai été invité, me semble t-il, par feu M’hamed Yazid, directeur général de l’INESG. M. Juppé était encore au RPR. Il est curieux de relever que « notre révolutionnaire intransigeant » évoque souvent les autorités françaises. C’est à croire que ce qu’elles peuvent penser de lui, le préoccupe davantage que ce que peuvent en penser les Algériens.

– Cessation d’activité au cabinet du chef du gouvernement : Dans le cabinet de M. l’ex-chef du gouvernement, a été constitué un groupe de travail dont lui-même a arrêté la nature et les tâches « groupe de réflexion et de proposition » devant suivre particulièrement la situation des atteintes à l’ordre public et à la sécurité. J’ai cessé de travailler avec ce groupe depuis, je crois, la fin mars 1993. Motif : bien que le chef du gouvernement l’ait approuvée, la mise en place du programme de protection des DEC que j’avais proposée, non seulement n’avait pas été réalisée, contrairement à ce qu’on nous disait, en réunion, mais en réalité, ni le ministre de l’Intérieur, ni celui de la Sécurité n’en voulaient. Nous étions ce jour-là au 39e DEC assassiné. J’ai cessé depuis cette séance de travailler avec cette équipe en disant que «je n’étais pas là pour tenir les statistiques des assassinats». Depuis cet incident, je n’ai jamais remis les pieds au cabinet du gouvernement, bien qu’il m’ait fait parvenir un rapport du ministre de l’Intérieur préconisant d’opérer un choix entre les stratégies politique et sécuritaire exposées dans le document. Daté du 12 mai 1993, ce document, curieusement, présente et propose des choix à opérer entre les options sécuritaires. Les options soumises au choix évoquent toutes les conséquences prévisibles par rapport à la question du rééchelonnement de la dette par le FMI. Malgré le contenu de ce rapport qu’il a tenu à m’adresser, sans y être destinataire, le chef du gouvernement me reproche, après coup, une immixtion dans ses prérogatives économiques alors que lui-même, dans les annotations de l’inventaire des tâches à consentir au groupe de travail sécuritaire, précise que le groupe est essentiellement un groupe de réflexion et de proposition ayant pour tâche de rassembler tous les éléments susceptibles de permettre au gouvernement de prendre les décisions qu’impose la situation. Or peut-on raisonnablement dissocier au plan stratégique la solution sécuritaire, des données financières qui conditionnent la qualité et le volume des moyens tant humains que matériels à y affecter ? En quelque sorte, le problème du nerf de la guerre. S’il n’y avait pas eu le moratoire (différé de paiement) suite à l’accord avec le FMI, la situation sécuritaire aurait pu se révéler autrement plus grave qu’elle ne le fut les années 1995-96-97.

Monsieur le chef du gouvernement considérait comme une immixtion dans ses prérogatives le fait qu’un collaborateur aux questions sécuritaires se soucie des ressources financières nécessaires à la lutte contre le terrorisme. – De la lutte anticorruption : L’ex-chef du gouvernement fait grand cas de sa préoccupation pour la lutte anticorruption. Lorsque je participais encore au «groupe de réflexion et proposition » du cabinet cité plus haut, je n’avais pas voulu, il est vrai, me joindre à l’élaboration d’un texte de portée législative relatif à cette question. D’abord, parce que cela sortait du cadre initial des missions retenues pour ce groupe de travail. Ensuite, je ne croyais pas et ne crois toujours pas qu’il suffit d’envisager seulement des mesures plus répressives pour pouvoir enrayer le phénomène de la délinquance y compris celui de la corruption. Je me souviens de ma boutade : «Avec les textes actuels, on peut pendre bien des gens.» Je pensais au délit de mauvaise gestion de triste mémoire. De plus, mon expérience d’officier de la Gendarmerie nationale m’avait enseigné que le phénomène de la corruption relevait également de causes sociales et économiques. La généralisation du régime du monopole à toutes les sociétés nationales et offices publics entraîna une impéritie administrative. Conséquence, il y eut une multiplication de blocages de dossiers. Les requérants furent ainsi placés souvent à la merci de nouveaux centres de décisions. Des fonctions régaliennes de l’Etat venaient d’être transférées à des organismes commerciaux. Cette confusion des genres a eu des effets très néfastes dont notre ex-chef du gouvernement semble être loin de s’en douter. De plus, à ce sujet, l’absence de voies de recours en bien des domaines, le déni de justice parfois, la stagnation des salaires,… tous ces facteurs étaient à mes yeux des éléments favorisant la corruption. Il ne peut y avoir de lutte sérieuse contre ce fléau si on exclut leur prise en charge dans toute recherche de solution. – Ma dernière entrevue avec l’ex-chef du gouvernement : C’est sur insistance du général Khaled Nezzar, fin juin 1993 me semble-t-il, que j’ai accédé, à la demande de M. Abdesselam, d’aller le voir à Djenane-El-Mufti, sa résidence d’alors. Il me propose alors le poste de ministre de l’Intérieur. Je déclinai la confiance et l’honneur pour des raisons politiques et une raison économique, précisant :

– Au plan politique :

1- «Je suis fidèle à la proclamation du 14/01/1992 et au mandat restant du HCE tel que prévu.» Mon interlocuteur voulait sa prolongation.

2- «Il y a trois pôles de pouvoir : le HCE, le gouvernement et dans une mesure discrète, l’ANP. Il faudra absolument sortir de ce schéma.»

3- Je ne voulais pas le froisser en mettant aussi en cause aussi sa façon despotique de gouverner. Je me suis gardé de signaler ce dernier point.

– Au plan de l’économie : Je répondis clairement que s’il avait mis au point un plan d’économie de guerre comme annoncé, peut-être que son programme d’austérité avait des chances de succès. Or, ce n’était plus le cas. En courant derrière des crédits commerciaux à court terme et à des taux de 12 à 13%, on ne pourra certes pas faire face à la crise financière. Pour ma part, je serai favorable pour aller au rééchelonnement. Dire ceci franchement et nettement à M. Abdesselam équivalait à mettre en cause ma confiance en lui et en ses aptitudes de « dirigeant éclairé ». Malgré cela, ce jour-là, nous nous sommes quittés plutôt aimablement. Au sujet de ce poste de ministre de l’Intérieur que j’ai refusé à M. Abdesselam, je l’ai accepté quelques semaines plus tard pour M. Réda Malek. Mais avec ma désignation au sein de la Commission du dialogue national, ce poste a échu à M. Salim Saâdi qui l’a assumé avec détermination. Voilà donc, l’ex-chef du gouvernement qui, aujourd’hui, dit de moi pis que pendre et qui me propose pourtant un poste aussi sensible que celui de ministre de l’Intérieur ! Les lecteurs jugeront de la cohérence des jugements de chacun.

Dogmatisme et raccourcis

Quand j’ai décliné à l’ex-chef du gouvernement sa proposition du poste de ministre de l’Intérieur au motif qu’il n’y avait pas d’autres solutions que le rééchelonnement, il me répondit :  »Tu es donc pour le blanchiment d’argent ! » Rien que ça ! Voyez le genre de raccourci ! C’est certainement ce genre de propos tenus à Monsieur l’ex-chef du gouvernement qui me vaut aujourd’hui une suspicion derrière je ne sais quel plan de braderie de l’économie nationale ? Lorsqu’il s’agit de la sauvegarde du dogme, notre censeur est d’une rigidité absolue. Par contre, il est très imaginatif pour rejeter tout ce qui ne s’y inscrit pas. Ainsi, selon lui, j’aurais été favorable à la perspective d’une privatisation hors contrôle de tout cadre législatif. Durant la période transitoire, après son départ du gouvernement,  »la plate-forme » de cette transition, parue au Journal Officiel, stipulait que seules quatre lois pouvaient être de la compétence du CNT. Les dossiers de portée nationale et sensibles devaient être laissés à l’appréciation d’une assemblée élue.

C’est ce à quoi a veillé le président Liamine Zeroual notamment pour le foncier agricole de l’Etat. S’il y a aujourd’hui une législation en ce domaine, je ne crois pas me tromper en disant que c’est sous les mandats du président Abdelaziz Bouteflika. Remarque Comme me l’a fait observer un ami qui a lu M. Abdesselam sur Internet : « Pour lui, le mur de Berlin n’est pas tombé. » J’ajouterai sur le même registre : ni l’URSS et le pacte de Varsovie, effondrés, ni la Chine de Mao devenue hyper-dragon du libéralisme économique,… Qui sait ce qu’il serait advenu du pays s’il n’y avait pas eu le rééchelonnement ? Ce qui est regrettable avec l’ex-chef du gouvernement, c’est qu’il n’est pas en mesure d’apprécier les résultats hautement positifs de l’équipe d’experts algériens qui ont négocié avec le FMI. Je tiens à mentionner ic ces résultats obtenus grâce à quoi l’Algérie a pu faire la jonction avec la reprise de la production des hydrocarbures et de la remontée des prix du baril suite à l’accord avec le FMI. Le cumul des dettes non versées a permis à la Banque bentrale algérienne de virer au Trésor l’équivalent de quatorze milliards de dollars. Somme avec quoi l’Algérie a vécu et a lutté contre les difficultés de toutes sortes y compris sécuritaires, bien sûr. Pour tout expert économique et financier, les conditionnalités fixées par le FMI sont des mesures que tout pays devrait prendre pour passer à l’économie de marché. Il est curieux que M. Abdesselam dise approuver la politique du président Bouteflika. Le soir de sa déclaration de candidature à la candidature aux présidentielles de 1999, il (Abdesselam) lui demande, du haut de la tribune et devant ses supporters, de retirer la sienne (celle de Bouteflika) au motif qu’elle est soutenue par l’ANP oubliant qu’il s’en est réclamé lui-même en 1993, par une foucade contre le HCE ; il s’écriait alors : « El djeich li djabni, gadjit maâ laâskar ». Il faut espérer que l’approbation de la politique du président de la République dont il fait état n’est tout simplement pas liée à des raisons «terre à terre».

Conclusions

Enfin, toutes les autres allégations, assertions, divagations, imputations, — et j’en passe — sont faites dans le but de nuire et d’assouvir une frustration inconsolable. Sans doute, procèdent-elles chez leur auteur d’un inconscient cherchant à exorciser les fantasmes qui l’assaillent, depuis la faillite avérée de son «programme d’austérité » mis en œuvre de juillet 1992 à août 1993. Trente ans après l’indépendance, il ne suffisait plus d’arborer le «grand guennour» du patriotisme comme argumentaire économique et politique pour espérer mobiliser et convaincre une opinion désabusée et désenchantée en attente d’innovations prometteuses. Dans une situation économique et politique extrêmement précaire, je me devais en ma qualité de conseiller et de représentant du ministre de la Défense nationale, au sein du groupe faire preuve d’engagement certes mais aussi de circonspection, voire aussi de vigilance. La solution sécuritaire recherchée ne pouvait être dissociée des aspects socio-économiques ni des possibilités financières. En un mot, l’ex-chef du gouvernement n’est victime de personne d’autre que de lui-même et de son dogmatisme. Souhaitons-lui un prompt retour à la sérénité. Epiloguer davantage sur de pareils sujets reviendrait à se complaire dans le rôle d’amuseur public. Pour ma part, je n’en ai ni le goût, ni les dispositions. Exercer une fonction du niveau de celle de chef de gouvernement requiert dignité, pondération, altruisme et grandeur d’âme. Si le censeur que se croit être M. Abdesselam en a été peut-être pourvu dans le passé, il ne semble pas que ce soit le cas aujourd’hui. Cela est bien regrettable.

Mohamed Touati Général à la retraite