Qui est derrière l’arrestation de Mohammed Samraoui?
Djameleddine Benchenouf, http://esperal2003.blogspot.com/, 31 octobre 2007
« Pourquoi la justice algérienne a-t-elle attendu octobre 2007 pour émettre un mandat d’arrêt contre un ex-officier dont la désertion date de février 1996 et dont les premières déclarations remontent à l’année 2003 ? » Cette question du journaliste Samy Ousi-Ali, dans son article remarqué d’El Watan, est une question qui en dit long. Et qui laisse croire que derrière ce coup fourré, il y a une histoire, bien compliquée, de clans qui se règlent les comptes par opposants interposés. Comme ils l’ont fait, pendant des mois, par scandales financiers interposés. La justice est là pour obtempérer et la presse pour relayer. « Tu jettes un élément de ma clientèle en pâture à l’opinion, je te renvoie l’ascenseur » Tu me tiens, je te tiens, par la barbichette. Et c’est ainsi qu’on a vu défiler devant la justice, des milliardaires, des banquiers, des élus, des serviteurs de l’état en tous genres, et jusqu’à un ex-président de l’APN et un Conseiller du chef de l’Etat. L’un et l’autre clan n’en finissaient plus de se porter des coups. L’échiquier était jonché de pions.
Avec l’affaire Samraoui, qui sonne comme une réponse à l’attentat de Batna, il semble que l’un des adversaires ait décidé de s’attaquer aux pièces maîtresses. Un initié des jeux d’échecs vous dirait que c’est un coup de maître. C’est la fin des préliminaires. L’un des deux rois va être échec et mât. Mais le jeu est subtil. Et les adversaires tellement retors. Dans un jeu de massacre, où la seule règle, est l’absence de règles. Seuls les initiés du premier cercle parviennent à déchiffrer les tactiques complexes auxquelles se livrent les maîtres du jeu. Comment comprendre, en effet que le clan de Bouteflika, qui prône la réconciliation à tout prix, qui louvoie et compose avec les barons de la junte, parfois jusqu’à la compromission, qui a tout fait pour soustraire les généraux janveristes aux poursuites pour crimes contre l’humanité, puisse leur asséner un coup aussi dur, en « arrangeant » l’arrestation de Mohamed Samraoui ? Je fais cette lecture, parce je n’en imagine pas une autre qui se tienne.
L’implication du DRS dans cette affaire me paraît peu probable. A moins que ce ne soit l’initiative d’un imbécile qui ne recherchait qu’une vaine vengeance. Car, cela équivaudrait à rechercher sa propre perte. L’arrestation de Samraoui ne sera d’aucune utilité pour le DRS. D’abord, parce qu’il est tout à fait exclu que Samraoui soit expatrié vers l’Algérie. La justice Espagnole, qui a de toutes façons, les mains liées, ne dispose pas, même si elle en avait la volonté, ce qui n’est pas le cas, malgré l’incarcération de Samraoui, des latitudes juridiques et morales pour le faire. Ce qui revient à dire que l’arrestation de Samraoui n’aura servi à rien d’autre qu’à redynamiser la question des crimes contre l’humanité commis par les généraux et leurs alliés. Le DRS, qui est impliqué au premier chef, n’a aucun intérêt à se mettre sous les projecteurs. A moins, et c’est là une supposition très alambiquée, qu’il ne recherche à rameuter autour de lui les généraux qui ont fait défection et qui ont rallié Bouteflika. En recréant le climat de menace qui pesait sur eux tous, avant que Bouteflika ne passe adopter les lois d’autoamnistie, pompeusement qualifiées de réconciliation nationale. Les choses ont sont là ! C’est la purée de pois politique. Si tant est que ce vocable puisse encore convenir à des manipulateurs froids et impitoyables. En attendant, Mohamed Samraoui est toujours privé de sa liberté. Mais enfermé, encore plus qu’en liberté, il va servir, plus qu’il ne l’aurait jamais imaginé, la cause de la justice. Tous ceux qui ont attendu de pouvoir s’exprimer, et livrer leurs témoignages sur l’affreuse vérité des généraux, vont pouvoir le faire. Les langues vont se délier. D.Benchenouf