Détention arbitraire des dirigeants de la CNAN

DÉTENTION ARBITRAIRE DES DIRIGEANTS DE LA CNAN

Le RCD vilipende une «justice instrumentalisée»

Le Soir d’Algérie, 2 décembre 2010

Les annales judiciaires, notamment les chroniques toutes fraîches, ne consignent pas de quoi tailler des couronnes à la justice algérienne. Seul parti politique à avoir la lucidité de réagir au jugement rendu il y a quelques jours dans l’affaire de la Cnan, le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) met, non sans en dénoncer au passage les travers, le doigt sur la plaie béante d’une justice dévitalisée et soumise.
Dans un communiqué daté du 30 novembre, le RCD a réagi à l’acquittement des dirigeants de la Cnan, après un emprisonnement long de six années. Le parti a estimé cette détention arbitraire. «Après six ans d’une détention arbitraire, les dirigeants de la Cnan ont enfin recouvré la liberté. Le citoyen qui a suivi avec compassion et indignation le calvaire de ces dirigeants ne peut que se réjouir de cette libération». S’en réjouir certes mais, pour le parti, il est toujours nécessaire, voire primordial, de s’attarder sur cette affaire qui est loin d’être exempte de dessous. «Il reste que cette affaire, qui n’a pas dévoilé tous ses secrets, interpelle la conscience de tous nos compatriotes et, a fortiori, ceux d’entre eux qui sont en charge d’un mandat électif ou d’une responsabilité dans le service public», a jugé le parti. D’autant que l’affaire Cnan ne constitue pas, en la matière, une exception. «D’autres éminents cadres de l’Etat, à l’instar de ceux de Sider ou de l’EGT-Centre ont connu humiliation et privation de liberté avant d’être relaxés. Des citoyens anonymes sont broyés par la justice, transformés en instrument d’exécution des intérêts de clans qui parasitent et soumettent l’Etat et ses lois», a rappelé le RCD, ajoutant que «dans cette même semaine, des Algériens se sont retrouvés, une fois de plus, devant les tribunaux en violation de la Constitution pour n’avoir pas observé le jeûne». Les exemples d’une justice hors orbite du droit ne manquent pas, et le parti de Saïd Sadi en cite une bonne brochette. «A Aghribs, la communauté villageoise qui a déposé près de cent plaintes contre un groupe salafiste a été systématiquement ignorée par la justice. A l’inverse, ces activistes sont accueillis aujourd’hui encore à bras ouverts par les tribunaux à chaque sollicitation», ou encore «les femmes osant braver le tabou des harcèlements sont niées dans leur douleur quand elles ne sont pas carrément invitées, voire sommées de retirer leurs plaintes par les magistrats chargés d’instruire leurs dossiers», a souligné le RCD pour qui la justice sert de cache-misère à la faillite du pouvoir en place. C’est, pour le parti, ce qu’atteste fort bien le drame des harraga mais aussi des ripostes que le pouvoir lui a opposées. «C’est aussi la justice qui sert de cache-misère à la faillite du pouvoir dans la gestion du marasme qui affecte la jeunesse. En effet, à ce jour, le drame des harraga, réduit à une ‘‘sortie illégale’’ du territoire national, ne rencontre qu’une sanction pénale comme réponse de la part du régime». Le RCD, pour qui la crise algérienne a pour cause originelle le déni de justice qu’il soit commis dans les tribunaux ou dans les bureaux de vote, a estimé que «l’état de la justice est un signe majeur de la santé morale et politique de l’Etat et de la cohésion d’une nation» et que «les quelques fois où le jugement a suivi le cours de la loi et l’intime conviction des magistrats montrent qu’il est encore possible de répondre à l’attente légitime du peuple au nom duquel est rendue la justice.» Le parti de Saïd Sadi a promis d’imposer le sujet dans le débat public.
S. A. I.