Droits et libertés : Consacrés dans les textes, violés dans la pratique

Les promesses de la nouvelle Constitution

Droits et libertés : Consacrés dans les textes, violés dans la pratique

El Watan, 10 février 2016

Réunions, associations, expression, exercice des cultes, activité politique… ces droits et libertés sont consacrés et garantis par la Constitution. Une formule revient dans toutes les lois et législations algériennes pour affirmer ce principe : «Les droits et les libertés individuelles et collectives sont garantis.» Toutes les Constitutions algériennes, de 1989 à 2016, consacrent effectivement des chapitres entiers à cette question. Plusieurs articles évoquent des droits universels qui sont théoriquement inviolables.

La Constitution qui vient d’être validée par le Parlement ne déroge pas à la règle. Dans son préambule, un paragraphe est inclus pour souligner le caractère «sacré» des droits et des libertés. «La Constitution est au-dessus de tous, elle est la Loi fondamentale qui garantit les droits et libertés individuels et collectifs», lit-on dans ce texte. Comme les précédentes, la nouvelle Constitution consacre également son chapitre IV aux droits et aux libertés. Tout est mentionné dans une trentaine d’articles.

De la liberté de manifester pacifiquement à celle de l’exercice des cultes. Le législateur a brassé large. Il insiste fortement sur le respect des droits de l’homme qui est un domaine où le pouvoir algérien est un mauvais élève. Deux articles s’étalent sur ce sujet. «Les libertés fondamentales et les droits de l’homme et du citoyen sont garantis. Ils constituent le patrimoine commun de tous les Algériens et Algériennes, qu’ils ont le devoir de transmettre de génération en génération pour le conserver dans son intégrité et son inviolabilité», stipule l’article 32 de cette Constitution.

L’article 33 met l’accent également sur «la défense individuelle ou associative des droits fondamentaux de l’homme et des libertés individuelles et collectives». La nouvelle Constitution reprend également, dans son article 36, le principe de la liberté de conscience et la liberté d’opinion qui sont, selon cette disposition, «inviolables». «La liberté d’exercice du culte est garantie dans le respect de la loi», ajoute le même article. Les articles 41, 41 bis et 41 ter confirment également le caractère garanti «des libertés d’expression, d’association, de manifestation pacifique et de la presse». De même pour le droit de créer des partis politiques, des associations et des syndicats qui est «reconnu et garanti», comme le stipulent les articles 42, 43 et 56.

En somme, tous les droits sont garantis aux citoyen algérien. Un étranger qui lirait cette Constitution, et même les précédentes, ne trouverait rien à redire tant tous les ingrédients nécessaires à l’édification d’une réelle démocratie y sont transcrits. Mais le problème de l’Algérie, comme l’affirment de nombreux responsables politiques et juristes, ne réside pas dans les textes ; ce sont les pratiques qui annihilent toute avancée. Des responsables du pouvoir, parfois même des subalternes de l’administration, contournent les lois et violent la Constitution pour remettre en cause ces droits. Les exemples sont légion.

Durant les 16 dernières années, le même pouvoir qui tente aujourd’hui de montrer une façade démocratique a fait de la violation de tous les droits contenus dans la Constitution son sport favori. La création de partis politiques a été gelée pendant plus de 10 ans, les syndicats ont été malmenés, la presse a été constamment harcelée et les manifestations sont interdites. Ces exemples confirment, on ne peut plus clair, que la Constitution ne change rien sans une volonté politique de respecter ses dispositions.

Madjid Makedhi