Tibéhirine: un ancien du GIA dément la thèse de la bavure

Tibéhirine: un ancien du GIA dément la thèse de la bavure

lefigaro.fr avec agences, 09/07/2009

Un ancien chef du Groupe islamique armé affirme que les moines ont bien été tués par son mouvement, contrairement à ce qu’affirme un ancien officier français qui a mis en cause l’armée algérienne. Nicolas Sarkozy s’engage à lever le secret défense sur cette affaire.

Le massacre des moines de Tibéhirine a été commis par le GIA et c’est la France qui en porte la responsabilité. Quatre jours après les révélations du Figaro, qui a relaté la déposition d’un ex officier français mettant en cause l’armée algérienne, le témoignage d’un ancien chef du Groupe islamique armé vient totalement contredire la thèse d’une bavure pour redonner du crédit à la théorie officielle : en mai 1996, les assassinats des sept moines trappistes français auraient été «commis par Djamel Zitouni, alors chef du GIA, à la suite des tergiversations du renseignement français».

Ce témoignage, recueilli par le quotidien algérien El Khabar, émane d’Abdelhak Layada, qui était alors au cœur des tractations entre l’Algérie et la France. «Les négociations concernaient ma libération contre la libération des moines. Les Français ont tardé à répondre s’ils acceptaient de négocier ou non avec le GIA. C’est la cause de l’échec», affirme-t-il. A l’origine, les moines avaient été pris en otage pour «flagrant délit de prosélytisme», selon Abdelhak Layada. «Ce n’est qu’après les avoir capturés que l’idée de monnayer ma libération avec la leur a germé», soutient Layada, condamné à mort en 1993 par la justice algérienne et libéré en 2006.

De fait, le GIA a tout de suite revendiqué l’enlèvement puis l’assassinat des moines, en expliquant ce massacre par le refus du gouvernement français de négocier. Face à la thèse officielle, la complicité de l’armée algérienne a été évoquée à plusieurs reprises. Mais pour François Buchwalter, attaché militaire de l’époque aujourd’hui général à la retraite, il s’agit d’une bavure de l’armée algérienne. Les moines auraient été tués dans un raid d’hélicoptères militaires sur ce qui semblait être un bivouac de djihadistes. «Les corps des moines étaient criblés de balles», a rapporté le général au juge Trévidic. Seules les têtes ont été retrouvées.

Pas de secret défense

Ces révélations venues de France, contestées par le témoignage d’Abdelhak Layada, ont été mal accueillies en Algérie cette semaine. Le quotidien El Watan a ainsi qualifié le témoignage du général Buchwalter «de délire». «Pourquoi a-t-il gardé aussi longtemps son prétendu secret pour le sortir à la fin du mois dernier», a questionné le quotidien francophone. «C’est un général d’opérette qui veut réveiller une affaire qui s’est essoufflée. C’est inconcevable», a commenté le président de la Commission nationale consultative pour la promotion des droits de l’Homme (CCPDH), Farouk Ksentini, dans le quotidien L’Expression

Jeudi soir, lors du G8, Nicolas Sarkozy a assuré qu’il n’y aura «pas de secret défense sur cette affaire». Quant à Jacques Chirac, président à l’époque, il a indiqué jeudi qu’il n’entendait pas faire de «commentaire à ce stade». Le même jour, Michèle Alliot-Marie a indiqué au Sénat que des commissions rogatoires avaient été adressées en Algérie, pour permettre au juge d’instruction de mener des enquêtes et des auditions sur place. «Ce n’est pas une question de défiance ou de provocation à l’égard d’un pays ami. C’est un devoir de transparence et de vérité que nous devons à ces victimes, à leurs familles, à l’ensemble du peuple français», a expliqué la ministre de la Justice.