Restée en Algérie, une famille « inquiète »

Algérie : Alors qu’une plainte a été déposée à Paris par des proches des moines de Tibéhirine, un « témoin-clé » nous livre sa vérité

Restée en Algérie, une famille « inquiète »

Lakhdar Belaid, France Soir, 25 février 2004

LORSQU’IL A QUITTÉ précipitamment l’Algérie en 1999,Abdelka-derTigha a dû laisser sa famille derrière lui. Son épouse, Fouzia Mendil, et les deux enfants de l’ancien agent des services secrets algériens sont restés à Blida. En décembre dernier, des proches des moines de Tibéhirine déposent plainte contre X en France.

Depuis, la famille Tigha est inquiète. Selon des associations de défense des droits de l’homme comme Algeria Watch ou Justicia Universalis, « le 10 février dernier, Mme Tigha a trouvé dans son appartement 26 photos montrant des maisons détruites ou incendiées, et des cierges allumés, ce qui lui est apparu comme une menace ». Des proches l’auraient également mise en garde. Elle serait maintenant « suivie » et son téléphone placé « sous écoute ».

La famille Tigha vit dans une cité HLM dont les logements sont essentiellement occupés par des membres du Centre territorial de recherche et d’investigation, dépendant du Département de renseignement et de sécurité (DRS). Elle serait désormais « placée en quarantaine ». « Depuis le 18 février, et jusque ce jour, Mme Tigha est harcelée jour et nuit par des •coups de téléphone, poursuit Justicia Universalis. Des interlocuteurs anonymes lui tiennent des propos obscènes, la menacent de la violer, ainsi que ses enfants. » Fouzia Mendil entretient des contacts permanents avec plusieurs organisations de défense des droits de l’homme comme Amnesty International.

Abdelkader Tigha, lui-même, fait part de « manœuvres » de la part des autorités algériennes. «Alors que j’avais déjà quitté le pays, ma femme a cherché à obtenir un passeport, se souvient l’ex-agent. Par courrier, je lui ai adressé l’autorisation paternelle nécessaire pour placer nos deux enfants sur le passeport. » La réponse de l’administration ? «Votre mari doit se rendre au consulat algérien le plus proche. » « Bien sûr, je ne l’ai pas fait, poursuit Tigha. Ma femme a eu son passeport. Mais nos enfants n’y figurent pas. Ils ne peuvent donc pas quitter l’Algérie. » Et de poursuivre : « Quand j’étais en Jordanie, on m’a prié de quitter le pays. Il m’a été rapporté que les services secrets algériens avaient demandé mon renvoi en Algérie », conclut Tigha.

L. B.