La femme peut faire appel au tuteur de son choix pour le mariage

Projet de loi sur le code de la famille

La femme peut faire appel au tuteur de son choix pour le mariage

Par Faouzia Ababsa, La Tribune, 6 mars 2005

Alors qu’il a été abrogé par le conseil de gouvernement le 19 août dernier, l’article 11 du code de la famille encore en vigueur a été amendé, mais pas dans le sens de la concrétisation totale de l’égalité entre la femme et l’homme devant le mariage. L’article 11 stipule en effet que «la conclusion du mariage pour la femme incombe à son tuteur matrimonial qui est soit son père, soit l’un de ses proches parents. Le juge est le tuteur matrimonial de la personne qui n’en a pas». L’abrogation de l’article avait suscité la satisfaction des femmes et particulièrement le mouvement féminin. Mais la joie a été de courte durée. Et pour cause ! Arrivé en Conseil des ministres, la notion du tutorat a été reconduite. Même avec la nuance qui fait que la femme redevient un sujet de droit. Cela, dès lors que la femme majeure conclut, selon les termes de l’article, elle-même son mariage en présence de son «wali qui est soit son père, soit l’un de ses proches parents, soit toute autre personne de son choix». C’est cette obligation de tuteur qui a suscité le mécontentement des femmes, lesquelles ont estimé que le président de la République, même si c’est le chef de l’Etat qui avait osé casser le tabou sur le statut personnel, a ménagé les islamistes en leur faisant de nouveau «des concessions sur le dos des femmes sous prétexte qu’il faut respecter la charia de laquelle s’inspirerait ce code». Les partis islamistes non plus ne sont pas satisfaits de l’amendement de cet article, en dépit de la satisfaction annoncée par Bouguerra Soltani, lors de sa dernière sortie médiatique. Ils s’estiment piégés par le fait que le président de la République ait rajouté «ou toute personne de son choix». Des députés du MRN et du MSP nous ont indiqué en marge de l’ouverture de la session de printemps de l’APN que le Président aurait mieux fait de l’abroger. «Parce que, rédigé ainsi, cela signifie que la femme peut très bien s’en passer.» En parallèle, le mariage par procuration a été totalement aboli. Un changement notable dès lors qu’il mettra fin aux «unions forcées». Par contre, la répudiation a été maintenue. Ce qui contredit quelque part l’article relatif au divorce et qui dispose que celui-ci peut intervenir avec l’accord des deux conjoints ou à la demande de l’un d’eux. Celui-ci contredit également les conditions énoncées pour que l’épouse ait le droit de demander le divorce. Si elles ne sont pas remplies, elle a le droit de recourir au «khol». Ce qui revient à dire que la femme n’a pas le droit au divorce au même titre que l’homme. Et tout cela bien sûr, sous le prétexte qu’il ne faut pas toucher à la charia. Toutefois, celle-ci n’a pas été brandie dans la disposition relative à la garde. Même si l’amendement en question est accueilli avec satisfaction par tous. La garde des enfants est dévolue à la mère puis au père, selon la nouvelle disposition. Or, dans la charia, c’est la lignée maternelle qui est de mise. Par contre, dans le nouveau texte de loi, le travail de la femme ne peut en aucun cas être présenté comme argument pour la garde des enfants. A contrario, l’autorité parentale n’est pas consacrée. L’épouse supplée à son conjoint dans l’exercice de la tutelle uniquement quand celui-ci a un empêchement (il faudra encore le déterminer et préciser qui décide de l’empêchement) ou encore lorsqu’il est absent. D’où la conclusion que la citoyenneté de la femme, en dépit de quelques petits aménagements, est loin d’être consacrée.

F. A.