Les associations féminines s’organisent en réseau informel

REVISION DU CODE DE LA FAMILLE

Les associations féminines s’organisent en réseau informel

Le Quotidien d’Oran, 8 janvier 2005

Les associations féminines s’organisent en « réseau informel » pour défendre la révision du code de la famille et les amendements proposés par la commission Zeghloul Bouterna. C’est ce qui ressort de la rencontre qui a réuni une dizaine d’associations et d’organisations, jeudi, à la Bibliothèque nationale d’El-Hamma sous le parrainage de Nouara Djaafar, ministre déléguée auprès du chef du gouvernement chargée de la Condition féminine et de la Famille.

Cette réunion a regroupé des représentantes de la commission de la femme au sein de l’UGTA, de l’Union nationale des femmes algériennes, de l’association des femmes algériennes pour le développement, de l’association algérienne du planning familial, de l’association AFCARE des femmes cadres, de Rachda. D’autres organisations étaient également présentes. Le réseau informel des associations interpelle les pouvoirs publics sur l’autorité parentale. La commission présidée par Mohamed Zeghloul Bouterna avait proposé une co-tutelle parentale, chose qui semble avoir été écartée, selon les présentes, du texte soumis en conseil du gouvernement.

La maturité vient avec l’âge, les associations pour la défense de la femme et de la famille, adeptes de l’abrogation du code de la famille, mettent de côté leur revendication initiale pour les besoins de la cause. Exit, donc, le débat qui a prévalu pendant plus de 20 ans, entre partisans de l’abrogation et ceux d’un amendement de la loi de 1984. « Ce code porte atteinte à la femme en tant qu’être humain, il porte atteinte à la société. Nous devons défendre ces amendements et revendiquer ensuite. Commencer par accepter et aller de l’avant », a estimé la représentante du planning familial. Les femmes du réseau informel ont décidé de se battre pour que l’avant-projet de loi ne finisse pas dans un tiroir comme cela a été des amendements proposés en 1996.

« La réalité est amère, l’application du code de la famille a meurtri la femme, les enfants et la société. Cette situation a interpellé l’Etat. Aujourd’hui, il y a un homme qui a entendu ce cri de détresse, c’est le courage politique du président de la République sachant qu’il y a des entraves importantes. Même si nous considérons que ces amendements sont insuffisants, nous devons saluer cette initiative parce que c’est une première étape. C’est celle des femmes et des hommes de progrès », a indiqué Mounira Haddad, présidente de l’AFAD. Le réseau veut marcher dans « le chemin tracé » en gardant « l’union, la solidarité et la fraternité » pour atteindre l’objectif. La commission des femmes de l’UGTA part de « la conviction que l’amélioration de la condition de la femme passe obligatoirement par la révision des textes législatifs et du changement des mentalités ancrées et sert de support au discours salafiste en vigueur ». D’où le soutien des syndicalistes aux amendements proposés. « Nous considérons que les propositions du gouvernement sont positives même si nous estimons que l’abrogation du code est nécessaire. Nous considérons néanmoins que les dispositions restrictives doivent être écartées. Ce n’est qu’une étape transitoire en attendant l’abrogation. Le combat continuera, c’est une avancée », a indiqué Mme Salhi. Les associations estiment, en effet, que le temps des revendications passe par celui de la responsabilité. Elles ne peuvent rejeter en bloc ce qui a été présenté au nom de l’abrogation. « Il faut saisir cela au vol de façon à faire progresser et avancer ce code vers plus d’égalité et d’équité. Il faut faire pression pour que ce texte arrive au niveau de l’assemblée », a indiqué la présidente de séance, Mme Barki. Certaines n’ont pas hésité à demander à ce que le « président de la République légifère par ordonnance en cas de blocage à l’APN ». Ce qui fera réagir l’assistance. « C’est dangereux et anti-démocratique. Qu’est-ce qu’on fait de l’APN ? Cela ouvre la voie à des conséquences importantes. Dans cinq ans, un autre président pourrait légiférer par ordonnance, mais contre les acquis des femmes, qu’est-ce qui l’en empêcherait puisque vous le demandez cette fois ci ? », dira une participante.

Il n’y avait pas que des femmes à la réunion, il y avait également des hommes dans l’assistance. Un, en particulier, prendra la parole. « La femme et le code de la famille sont intimement liés au projet démocratique. Ce dernier est en construction, ce débat permettra de changer les choses. L’Algérie a changé ses constantes. Je pense que le combat permettra d’arranger le code, de l’enlever. La réussite de la femme et de l’homme arrive. Notre citoyenneté s’édifiera et se parachèvera avec l’abrogation de ce code, avec la construction du projet démocratique », estimera Amine Zaoui, directeur de la BN d’El-Hamma. Nouara Djaafar, ministre déléguée chargée de la Condition féminine et de la Famille, a précisé que la valorisation de la condition de la femme dans la société ne s’arrête pas à la réforme du code. « Nous devrons continuer le chemin. Les décennies futures seront féminines en Algérie », a-t-elle indiqué.

Samar Smati