Les chefs de police africains se concertent à Alger

Violences à l’égard des femmes

Les chefs de police africains se concertent à Alger

El Watan, 7 mars 2016

Les chefs de police africains se réunissent aujourd’hui et demain, à Alger, pour discuter des stratégies de lutte contre les violences à l’égard des femmes. Un fléau planétaire, qui touche particulièrement l’Afrique mais aussi l’Algérie qui peine, depuis plus d’une décennie, à concrétiser, sur le terrain, sa stratégie de lutte contre ce mal.

Alger abritera, à partir d’aujourd’hui, la 5e assemblée générale de la Conférence de la Déclaration de Kigali sur «Le rôle des services de sécurité dans la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles». Y prendront part les chefs des services de police africains qui se sont assigné comme objectif la sensibilisation sur ces violences, mais aussi le partage des expériences en matière de lutte contre ce mal qui cause des traumatismes profonds chez les victimes. Seront présent à cet événement, le secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon, ainsi que les responsables de l’ONU-Femme, du PNUD, de l’OMS, du Fnuap ainsi que de nombreuses personnalités africaines et internationales et des représentants de la société civile.

Le choix de la date (7 et 8 mars) et du lieu (Alger) n’est pas fortuit. Même si depuis quelques années, le 8 mars, Journée internationale dédiée à la femme, n’incarne plus les luttes pour les droits de celle-ci, il permet néanmoins de faire une halte pour rappeler au monde que le combat pour la dignité des femmes n’est pas encore terminé pour les pays africains, qui souffrent des guerres, des conflits armés et du sous-développement, mais aussi pour l’Algérie où les pesanteurs sociales et les mentalités islamo-conservatrices continuent à se dresser en obstacles contre toute émancipation des Algériennes. L’opposition violente contre la loi sur la criminalisation des violences à l’égard des femmes a suscité le blocage du texte pendant des mois au niveau du Conseil de la nation sans aucune explication officielle.

Constitués en puissants lobbys, ces courants réfractaires aux droits à la citoyenneté et à la dignité ont également pesé de tout leur poids pour empêcher la révision du code de la famille, notamment son volet lié au divorce, puisque à ce jour le gouvernement n’a pas ouvert ce dossier, alors que le président de la République, dans son message du 8 mars 2015, avait donné «ordre» au gouvernement Abdelmalek Sellal «de charger un comité ad hoc de la révision et du réaménagement des articles dudit code relatifs au divorce et qui prêtent à interprétation, en vue d’y introduire les clarifications et précisions nécessaires, de combler les lacunes et de garantir la protection des droits des deux conjoints et des enfants».

Tous les spécialistes s’accordent à dire que la plupart des violences à l’égard des femmes trouvent leurs sources dans le code de la famille que certains n’hésitent pas à qualifier de «code de l’infamie» en raison des graves iniquités et inégalités qu’il comporte. A chaque occasion, chercheurs, universitaires, militants de droits de l’homme et experts alertent sur l’ampleur de la violence, le nombre de plus en plus important de femmes victimes de violence et les plus exposées sont les épouses, dont les maris sont les premiers agresseurs.

Le foyer familial est devenu le théâtre des pires agressions, souvent couvertes pour des considérations purement familiales. Réalisée en 2005, l’enquête du ministère de la Santé avec les associations et le ministère de la Justice, sur les violences contre les femmes a levé le voile, pour la première fois, sur ce fléau qui touche une moyenne annuelle de 9000 à 10 000 femmes, dont la prise en charge est loin d’être réelle sur le terrain à ce jour.

Lors de la conférence africaine qui s’ouvrira aujourd’hui à Alger, si les experts de la Sûreté nationale évoqueront leur expérience en matière de prise en charge des victimes de ces violences, le ministère de la Solidarité, de la Famille et de la Condition féminine devra aborder la stratégie du gouvernement de lutte contre ce fléau, qui depuis près de 10 ans peine à se concrétiser sur le terrain, alors que le nombre aussi bien des victimes que des agresseurs ne cesse de prendre de l’ampleur.

Salima Tlemçani