Industrie pharmaceutique: Saïdal dans tous ses états

Industrie pharmaceutique: Saïdal dans tous ses états

par Ghania Oukazi, Le Quotidien d’Oran, 25 mars 2012

Le groupe pharmaceutique s’active à corriger sa grille des salaires dont les incohérences et les distorsions ont généré un désordre de sa nomenclature et une absence de règles de gestion de ses classifications.

« Le système en vigueur depuis les années 90 est apparu inadapté et inefficace par ses incohérences et les inégalités entre catégories et entre employés qu’il générait dans les classifications, les salaires, les primes et les indemnités», estiment ses concepteurs. Présenté à l’ensemble des personnels de la société mère et de ses filiales, le nouveau système salarial devrait entrer en vigueur au plus tard cet été avec effet rétroactif à partir du 1er janvier 2012. Ceux qu’ils l’ont élaboré l’appellent «Projet de refonte du système de rémunération du Groupe Saïdal» tant il a revu en profondeur le système actuel qui, affirment-ils, «ne répondait plus aux cinq principes fondant une politique et un système salariaux à savoir Equité, Stimulation, Compétitivité, Flexibilité et Simplicité».

«Les incohérences et les distorsions» du système en question ont été exposées hier aux délégués médicaux du groupe pharmaceutique activant sur l’ensemble du territoires national après l’avoir été à ses employés au cours de quatre regroupements nationaux tenus en décembre dernier. C’est par un data show que ses concepteurs ont tenu à partager avec l’assistance un travail pédagogique par lequel ils ont expliqué même ce que sont un travail et un salaire. Ils notent ainsi que «le salaire est la contrepartie d’un travail et de la compétence qui lui est nécessaire». Ils indiquent que le système salarial actuel à Saïdal est construit sur la structure SGT (Statut général du travailleur) de 1978 et comporte «une classification des postes de travail par niveau de qualification et catégorie socioprofessionnelle, une nomenclature, répertoire des postes de travail par filière et famille professionnelle, une grille de salaires et enfin un régime indemnitaire composé des éléments liés aux conditions de travail, des remboursements de frais et des avantages sociaux».

LES CAUSES DE LA DEFORMATION DU SYSTEME NORMATIF

Son cadre réglementaire repose sur la convention collective de 1993 adoptée avant organisation du Groupe mais modifiée en 1999, 2002 et 2004 par des accords collectifs jusqu’en 2006 où intervient la modification de la convention collective à travers «l’aménagement du régime indemnitaire par modifications des critères, des taux et montants, nouvelles primes et indemnités, extension des bénéficiaires et des conditions d’ouverture des droits». Lancée en 2010, la refonte du système salarial préserve, disent ses concepteurs, «les avantages acquis par accord collectif» mais consacre «une nouvelle grille des salaires et un nouveau régime indemnitaire». Il a été relevé que «les glissements progressifs et la déformation du système normatif ont été causés par une restriction des ressources financières des entreprises publiques, des contraintes institutionnelles (réorganisation du secteur public), des pressions sociales sur les salaires et le pouvoir d’achat et le renvoi de la négociation collective aux autorités gouvernementales». Les conséquences sont «l’écrasement de l’échelle des salaires et leur réduction dans la rémunération de 60 à 45%». Les systèmes de classification sont de fait «dénaturés» par «un surclassement individuel, des promotions sans changement de poste, ripage des classifications, institution de catégories intermédiaires, extension des primes et indemnités et ouverture du droit».

DESORDRE ET ABSENCE DE REGLES DE GESTION

Résultat selon les experts: «la nomenclature des emplois explose alors qu’aucun dispositif ne gère la création d’emplois». Ils indiquent que «pour 4056 salariés recensés, le système comporte 726 intitulés dont 450 sont utilisés pour 3020 agents». «1044 autres agents sont, ajoutent-ils, positionnés sur 533 intitulés inexistants dans la nomenclature». Ils constatent qu’il a été donné plusieurs appellations différentes pour un même poste (chargé de, responsable de, assistant de). Il y a eu aussi en parallèle «étirement de la ligne hiérarchique (directeur, sous-directeur, chef de département, de service, de section) doublé de niveaux intermédiaires (assistant, responsable). Plus encore, ils ont relevé un dédoublement des postes par produits (contremaître, opérateur, chefs forme pâteuse, stérile, liquide), ainsi qu’une parcellisation des tâches par suppression de la polyvalence ou le refus au travailleur d’effectuer les 8 heures quotidiennes.

Jugée «arbitraire», cette classification ne couvre pas, selon eux, le type de travail effectué ni la position véritable dans la hiérarchie des emplois. La grille Saïdal en vigueur affiche 65 niveaux de salaires de base avec 20 échelons chacun «soit 1300 possibilités de salaire». Il est noté que 14 agents seulement sont positionnés dans les catégories 5-6-7.

13 catégories avec 57 niveaux sont utilisées pour le positionnement des agents. Les primes et les indemnités sont jugées multiples et dénaturées. Il en existe 27 dont la mise à jour figure dans l’accord collectif de 2010 «avec révision des conditions de leur octroi et de leurs montants». 35% de la masse salariale est constituée par les primes spécifiques dont les principales sont l’IEP (indemnité d’expérience professionnelle, 18%), de nuisance (4,5%), PRD (prime de responsabilité et de disponibilité, 3%) et de panier (7,5%). Ceci, sans compter une autre multitude de primes et indemnités dites «particulières». Comme dernière remarque, il est souligné que «les personnels de la sécurité sont régis par une multiplicité de primes au titre du décret 93-322 qui déséquilibre le régime indemnitaire». 98% des entreprises publiques fonctionnent selon un système de rémunération «déformé, désordonné et incohérent», affirment les experts.


Boumediene Derkaoui : «Le plan de développement de Saïdal est très bien engagé»

par G. O.

Le PDG du groupe pharmaceutique nous a précisé hier, en marge de la rencontre de ses délégués médicaux à Zéralda, que le plan de développement du groupe bénéficie de 16,7 milliards de dinars pour sa réalisation et s’étale sur 4 ans (2010-2014). «Il prévoit la réalisation de 6 nouvelles unités et la modernisation des 5 unités existantes», nous a-t-il précisé. Boumediene Derkaoui estime que «le plan est bien engagé puisque les cahiers des charges de réalisation des projets de partenariat dont les études sont déjà réalisées vont être remis en avril prochain aux entreprises présélectionnées». Il précise d’ailleurs que «les actions de partenariat sont finalisées pour ce qui est de la production d’insuline et de l’oncologie». Il affirme que «les discussions sont closes et le processus d’approbation est déjà engagé auprès des instances compétentes». Interrogé sur la pléthore d’effectifs, le PDG note que «le groupe employait, il y a près de deux ans, plus de 4.600 personnes, il y a eu depuis une diminution de plus de 500 d’entre elles». Il estime en outre que «la faiblesse des salaires est à l’origine du départ des compétences de Saïdal». Il relève «une stabilisation relative après l’annonce du projet de refonte du système salarial engagé depuis 2010». Le PDG fait savoir aussi que le groupe a entrepris l’assainissement de son fichier fournisseur «avec une orientation prononcée vers une diversification des fournisseurs pour avoir une traçabilité des achats». Saïdal, dit-il, a amélioré sa trésorerie «grâce à l’assainissement de ses stocks et le blocage du gaspillage par des investissements inutiles». Le groupe a relevé «sur fonds propres» à 60% ses quotes-parts au sein de la société privée de production d’injectables où il détenait seulement 20%. «A l’arrêt depuis 6 ans, le projet TAPHCO de production de médicaments (forme sèche) est aussi relancé avec ses partenaires jordaniens et saoudiens. Saïdal en détiendra 40% des parts qu’elle a financées sur fonds propres. Le projet démarrera en janvier 2013.


A propos de la dernière grève des unités de Saïdal: «Des pressions ont été exercées sur les travailleurs»

par G. O.

L’occasion a été donnée hier au PDG de Saïdal pour revenir sur les événements qui ont secoué les unités du Gué de Constantine et d’El Harrach. En grève pendant 24 h, il y a une dizaine de jours, les travailleurs de ces unités réclamaient à la direction des augmentations de salaires. Faisant allusion à l’existence du projet de refonte du système salarial du Groupe, Derkaoui note que «les canaux de communication sur lesquels nous comptions ont été déficients. Dorénavant, je communiquerai directement avec les travailleurs qui m’ont dit qu’ils n’étaient pas au courant du travail qui se faisait à cet effet». Il considère ainsi que le débrayage des unités du Gué de Constantine et d’El Harrach a été provoqué par une volonté délibérée de voyous et de bandits pour déstabiliser tout le Groupe».

Le PDG affirme encore que «des pressions ont été exercées sur leurs travailleurs, ceux de Pharmal de Batna et de Cherchell aussi, ainsi que sur leurs syndicats, par des gens qui se sentent touchés dans leurs intérêts et menacés dans leurs positions».


Une nouvelle grille des salaires d’ici juin

par G. O.

Le projet de refonte du système de rémunération des salariés de Saïdal, entrera en vigueur au plus tard en juin prochain et aura un effet rétroactif à partir du 1er janvier 2012.

C’est conformément à la loi 90-11 (article 7, alinéa 1) qui attribue à l’employeur la prérogative de la définition du contenu des emplois et l’élaboration de la nomenclature que le Groupe pharmaceutique a établi une nouvelle répartition de ses emplois par filière pour, disent ses experts «obtenir leur hiérarchisation dans une même activité et pour vérifier la cohérence des classifications entre les filières.» C’est donc une nouvelle nomenclature qui vient d’être élaborée sur la base de 12 filières d’activité. Chacun des emplois de la nomenclature est identifié dans une fiche d’emploi selon les rubriques «intitulé, filière d’activité, missions et tâches à réaliser, exigences pour son occupation, relations hiérarchiques et fonctionnelles, classification.»

Cette nouvelle conception de l’emploi interdit aux dirigeants du Groupe de ne recruter ou de promouvoir un travailleur que «sur des postes prévus par la nouvelle nomenclature.» Une nouvelle méthode a été donc adoptée pour «mesurer et peser les emplois de manière à assurer une classification objective et équitable.» Ce qui impose à l’encadrement de se référer à «des critères classants, pondérés par une notation pour obtenir une évaluation, la plus juste possible.» Critères qui, disent ceux qui les ont choisis, peuvent être appliqués à l’ensemble des emplois et postes de travail consacrés dans la nomenclature (agent d’exécution, techniciens-maîtrise, cadres), «aussi bien ceux existant que ceux qui seraient créés dans l’avenir.»

NOUVEAUX CRITERES POUR NOUVEAUX SALAIRES

Il a été retenu comme critères «les connaissances, la complexifié des opérations à réaliser et la responsabilité.» Ce qui a exigé le choix de nouveaux barèmes de cotation des emplois et de leur évaluation. La nouvelle grille des salaires est alors composée de 21 catégories représentant la classification selon le niveau de qualification établi par l’évaluation de l’emploi et 10 sections représentant, elles, l’avancement au mérite selon la procédure qui le définit. Les salaires doivent donc progresser de «4% pour les agents d’exécution, 8% pour les techniciens-maîtrise et de 16% pour les cadres.» Il est souligné que «les écarts entre les groupes socioprofessionnels sont ainsi de 12% entre l’exécution et les techniciens-maîtrise et de 20% entre les techniciens-maîtrise et les cadres.»

Les experts de Saïdal estiment que «le nouveau système salarial inverse la situation passée où le salaire de base était réduit à 43% de la rémunération globale et où le nombre élevé de primes et indemnités en consacrait une part comme complément de salaire et une autre partie n’avait pas sa justification.»

Le système en question supprime alors la PRD et les indemnités pharmaceutiques et hospitalières dont les aspects sont pris en charge dans le nouveau salaire de base, l’IFSP qui n’est servie qu’à 4 agents sur les 4.200 du Groupe, l’indemnité de restauration remplacée par la prime de panier, l’ISHS (indemnité spéciale pour heures supplémentaires) qui est recalculée sur «un taux approprié», l’ICAF (indemnité de complément d’allocation familiale) qui est intégrée dans ces mêmes allocations, la prime liée à l’enseignement «qui n’est pas utilisée», l’indemnité de zone «aucune entité de Saïdal n’entrant dans le champ de son application, au sens de la réglementation en vigueur» et la bonification ancien moudjahid «qui n’a plus lieu d’être.»

PRIMES ET INDEMNITES SUPPRIMEES OU RECALCULEES

Les primes maintenues seront modifiées comme l’indemnité de nuisance, du travail posté, pour conjoint ainsi que les PRI et PRC (prime de rendement individuel et collectif) et l’IFAVP (indemnité de véhicule) «pour laquelle les conditions et modalités d’octroi seront précisées.» Les primes maintenues mais qui ne seront pas modifiées sont l’IEP, la prime pénicilline, de milieu stérile, la majoration des heures supplémentaires, la prime de caisse, de travaux de fin d’années, l’indemnité par intérim, de panier, de transport, les frais de missions, l’indemnité kilométrique, primes à caractère exceptionnel (invention, innovation..), les gratifications et enfin les dispositifs spécifiques délégués médicaux et personnels de sécurité.»

Les dirigeants du Groupe veulent rassurer leurs personnels en indiquant que «le calcul des salaires sur ces nouvelles bases n’entraînera, en aucun cas, de diminution.» Ils affirment aussi que «toutes les primes et indemnités de l’ancien système qui sont supprimées sont intégrées au salaire de l’employé avant de lui calculer son nouveau salaire.»

Les primes et indemnités du nouveau système calculées sur les nouvelles règles, viennent, disent-ils encore «s’ajouter au nouveau salaire donné par les classifications.» Il est par ailleurs noté que «pour permettre aux employés ayant atteint les échelons les plus élevés dans l’ancien système, de pouvoir progresser dans leur catégorie.» Il leur sera compté pour cela «4 ans d’ancienneté pour une section au lieu de 3 ans prévus par la nouvelle grille des salaires.» Les employés seront positionnés chacun «par rapport au poste réellement occupé et dans le respect de la nomenclature.»