Une bouée de mille milliards d’Euros
Eurogroup et crise financière
Une bouée de mille milliards d’Euros
Saïd Mekki, ALgérie News, 14 octobre 2008
La réunion de dimanche des quinze pays de l’Eurogroup a débouché sur une série de mesures concrètes destinées à consolider les systèmes bancaires de chacun des pays et à envoyer un message clair aux marchés financiers. L’aggravation de la crise et son extension de plus en plus visible à l’économie réelle a fait craindre, dramatisation aidant, en fin de semaine dernière l’imminence d’un véritable collapsus financier international. La théâtralisation médiatique sans doute orchestrée par les milieux qui déploraient la passivité des européens, notamment lors de la récente réunion du groupe des quatre (France, Allemagne, Italie et Grande-Bretagne) à Paris a accompagné la chute de l’ensemble des bourses mondiales vendredi dernier. Le décor était dressé pour une représentation courue d’avance ou le seul recours pour sauver l’économie européenne résidait dans une vigoureuse impulsion coordonnée des gouvernements de l’UE. Le modèle britannique d’intervention unanimement salué par le marché a donc été adopté par les membres de l’Eurogroup. Le plan de Gordon Brown consiste d’une part en la nationalisation des banques en très mauvaise posture et en l’injection massive de liquidités et la mise en place d’un système de garantie pour permettre le redémarrage vital des crédits interbancaires. C’est cette démarche, baptisée « Plan d’action » qui a été entérinée à Paris, chaque pays restant libre de déterminer les modalités et les montants alloués aux programmes nationaux. C’est ainsi que les principaux pays d’Europe occidentale annoncent l’un après l’autre, dans un mouvement coordonné, les déclinaisons nationales du plan d’action sur lequel ils se sont mis d’accord. Les chiffres mis en avant sont impressionnants, 480 milliards d’euros pour l’Allemagne, 360 milliards pour la France, 100 milliards pour l’Autriche et l’Espagne. L’effet apaisant sur les bourses a été immédiat, mais l’attitude retenue des autorités financières et politiques occidentales montre bien que la prudence reste de mise dans une situation ou la magnitude de la crise et l’ampleur des dégâts ne sont pas encore connues. En effet, même si l’engagement des gouvernements est résolu, la question est de savoir si l’effort est réellement à la hauteur de la crise. L’instabilité demeure et si les montants des interventions publiques peuvent paraître énormes, ceux des pertes possibles que les banques risquent d’assumer sont eux astronomiques. Ainsi, beaucoup d’établissements bancaires et de sociétés d’assurances doivent déboucler des opérations sur produits dérivés dont les contreparties sont notoirement défaillantes. A lui seul, le marché des dérivés est évalué à plus de 500 mille milliards de dollars, soit plus de dix fois la valeur du PIB mondial ; si des défauts de hedge-funds et de banques se multiplient, il est clair qu’à partir d’un certain seuil les filets de sécurité imaginés par l’Eurogroup et le Secrétaire au Trésor américain ne suffiront pas. A cet égard, les jours prochains seront décisifs, le monde sera rapidement fixé sur l’efficacité du remède mis au point à Paris dimanche dernier.