Zones d’ombre autour de Dounia Parc

Gestion du foncier public

Zones d’ombre autour de Dounia Parc

El Watan, 7 septembre 2016

Il n’y a pas d’affaire Dounia Parc, il n’y a aucun problème dans ce dossier.» Le premier ministre, Abdelmalek Sellal, veut ainsi atténuer les déclarations du ministre du Tourisme, Abdelouahab Nouri, qui avait révélé, il y a quelques jours, l’existence d’un «scandale» au Parc des grands vents.

Pis, le Premier ministre veut même apparemment mettre fin au débat sur la question. Il s’agit, selon lui, d’une «erreur» qui a été «réparée» et invite l’opinion publique à ne pas en parler. Le responsable, qui s’est exprimé dans le journal arabophone Ennahar, a précisé qu’«il s’agit en fait d’une erreur dans la manière d’identifier la catégorie juridique à laquelle appartient Dounia Parc». Le Premier ministre n’est pas allé loin.

Abdelmalek Sellal tente ainsi de réparer ce qui semble une «erreur» commise par le gouvernement. Car, selon nos informations, lorsque Amar Ghoul, alors ministre du Tourisme, avait demandé en 2014 la mise en concession d’assiettes foncières au profit de commerçants, il a dû ne pas prendre en compte un fait particulier : le périmètre dont il s’agit est déjà cédé au groupe émirati EIIC, la concession de 365 hectares sur les 1059 ha que compte le Parc des Grands vents. Les Emiratis, qui ont promis un investissement de 5 milliards de dollars durant la période allant de 2008 à 2011, ont «réussi» à changer la nature du parc.

D’un centre botanique, on est passé à partir de 2010 – le décret de 2006 portant création du parc a été modifié – à un plan d’aménagement qui consistait à construire notamment pas moins de 13 000 logements de standing, 500 chambres d’hôtel, un amphithéâtre de 5000 places, un parking d’une capacité de 8000 véhicules, des commerces, un hôpital «international» et une tour de 47 étages.

Cela devait occuper 30% de la superficie du parc. La transformation des «objectifs» du Parc Dounia a fait naître un conflit d’un genre nouveau. Les anciens propriétaires ont poursuivi l’Etat en justice pour récupérer les terres expropriées. Ils estiment que la notion d’utilité publique n’est plus valable à partir du moment où le projet consiste, désormais, en la construction de promotions immobilières.

Plus que cela, des sources au fait du projet indiquent que des surfaces déjà bâties par des personnes influentes ont été extraites de la superficie du parc. Ne sont donc expropriés que des agriculteurs et d’anciennes Exploitations agricoles collectives (EAC). Ces derniers ne veulent rien lâcher.

Depuis 2014, la gestion du Parc des grands vents, qui dépend du ministère de l’Environnement, est confiée au ministère du Tourisme. Cela ne semble pas sauver le site dont l’exploitation est visiblement compromise. Car, en plus des poursuites judiciaires intentées par les propriétaire terriens qui ont cédé leurs assiettes à l’Etat pour la modique somme de 20 000 DA le mètre carré, la partie émiratie ne veut rien avancer tant qu’elle n’a pas la concession sur l’ensemble du site qui s’étend sur plusieurs communes (Dély Ibrahim, Ouled Fayet, El Achour, Draria, Baba Hacène et Chéraga).

Le groupe EIIC n’a, pour l’heure, rien mis dans le projet. La situation crée donc des tensions politiques. Selon les données disponibles, il est difficile d’expliquer la sortie de Abdelouahab Nouri. Ce dernier est mis devant le fait accompli. Il devra probablement s’expliquer sur l’origine du mal.

Car, pour l’heure et en dehors du ministre de la Justice qui demande à son collègue de «saisir la justice», Abdelmalek Sellal a exprimé tout haut ce que Amar Ghoul «pense tout bas». «Ce que j’ai dit n’est qu’une décision collégiale prise dans une réunion du gouvernement», aurait confié le président de TAJ à des proches. Des confessions qui s’ajoutent aux confusions déjà nourries autour de ce projet. Et les affirmations de Sellal n’ont pas apporté les réponses adéquates. Bien au contraire.

Ali Boukhlef .