La commission de contrôle des opérations de privatisation sous tutelle du ministre

La commission de contrôle des opérations de privatisation sous tutelle du ministre

Temmar juge et partie

Par : Madjid Hocine, Liberté, 19 juin 2006

Quelques jours seulement après leur publication dans le Journal officiel, les réaménagements apportés au texte fondamental qui régit depuis 2001 les capitaux marchands de l’État soulèvent des appréhensions. Du coup, c’est tout le dispositif de l’ordonnance n°01-04 relative à l’organisation, la gestion et la privatisation des entreprises publiques économiques qui risque d’être remis en cause par, entre autres, la Centrale syndicale. En fait, au-delà des lectures politiques, autant les changements opérés dans le dispositif de l’investissement sont bien accueillis par les opérateurs nationaux et internationaux, autant ceux qui ont touché la sphère des capitaux marchands soulèvent des interrogations. C’est du moins le cas pour le changement de tutelle de l’importante commission de contrôle des opérations de privatisation. Depuis le 31 mai dernier, celle-ci, pour rappel, n’est plus “sous l’autorité du Chef du gouvernement”, conformément à l’ancien décret exécutif, mais sous celle du ministre des Participations. L’article 2 du décret présidentiel fixant la composition, les attributions et les modalités d’organisation et de fonctionnement de cette instance stipule clairement que “la commission de contrôle des opérations de privatisation est placée auprès du ministre chargé des Participations”. Un changement qui fait dire à nos sources, au sein de la Centrale syndicale mais aussi aux spécialistes, que c’est là “une décision qui remet tout simplement en cause la fonction et le rôle de la commission”.
Celle-ci, en vertu de l’ordonnance susmentionnée, veille au respect “des règles de transparence, de sincérité et d’équité du déroulement des opérations de privatisation”. C’est en quelque sorte le “gendarme” qui contrôle les opérations de cession des EPE.
Par ailleurs, selon l’article 4 du décret en question, la commission de contrôle des opérations de privatisation est présidée par carrément un magistrat “proposé par le ministre de la Justice parmi les magistrats spécialisés dans le domaine du droit des affaires”. Outre le président, cette instance est composée “d’un représentant de l’Inspection générale des finances proposé par le ministre des Finances, d’un représentant du Trésor proposé par le ministre chargé du Trésor et d’un représentant de l’organisation syndicale nationale la plus représentative”. En décidant de mettre la commission sous la coupe du MPPI, c’est en fait “Temmar qui se retrouve juge et partie”, commente un syndicaliste, rappelant que “cette instance ne s’est jamais réunie et n’a étudié aucun dossier de privatisation depuis son existence”. Pourtant, la loi stipule clairement que le ministère des Participations doit lui transmettre tous les dossiers de cession des entreprises.
Ce changement de tutelle fait que, désormais, la commission n’aura plus à faire valoir ses avis et éventuelles appréhensions sur les opérations de privatisation auprès du Chef du gouvernement comme le stipulait l’ancien décret, mais au secrétaire du Conseil des participations de l’État qui n’est autre que le département de Abdelhamid Temmar (article 9). Aussi, signalons que le délai de un mois qu’accordait l’ancien texte à la commission pour transmettre “ses avis et recommandations” a été revu à la baisse, soit 15 jours.

Madjid Hocine