Affaire Khalifa: La justice enquête sur une fuite

Affaire Khalifa

La justice enquête sur une fuite

Le Quotidien d’Oran, 24 juin 2006

Toutes les personnes poursuivies par la justice y compris celles en détention préventive «sont innocentes jusqu’à ce que le tribunal prononce son jugement définitif», déclarait à la presse en marge de la séance plénière de l’APN sur les questions orales M. Belaiz, ministre de la Justice.

En ce sens Tayeb Belaiz relevait, jeudi devant la presse, la nécessité de s’éloigner de «la surenchère à l’égard des personnes accusées dans le souci de préserver leur sensibilité et leur dignité ainsi que leur réputation et celle de leur famille». Belaiz ne se contentera pas de déplorer cet état de fait puisqu’il annonçait que le ministère de la Justice a ouvert une enquête à l’effet de déterminer les parties qui ont laissé filtrer des informations sur le dossier de l’affaire El-Khalifa et ne manquera pas de souligner la nécessité pour le juge de préserver «le secret de l’instruction». Dans cette veine, il indiquait que la remise du dossier par la chambre d’accusation à la défense pour information a «transformé ce dossier secret en dossier public et facilité la divulgation de noms des personnes accusées ou auditionnées dans cette affaire à la presse», rappelant que la défense dans l’affaire El-Khalifa est composée de 50 avocats.

Dans ce contexte précis, il y a lieu de relever que les noms des 129 prévenus concernés par la mise en accusation dans le volet gestion des caisses de Khalifa Bank ont été publiés dans la presse nationale. Autant les noms de ceux qui sont en détention préventive que les noms de ceux qui sont en liberté provisoire ou sous contrôle judiciaire. Et l’on comprend le souci du garde des Sceaux, de par la gravité des faits qui leur sont reprochés: constitution d’association de malfaiteurs, vol qualifié, abus de confiance, falsification de documents comptables, abus d’autorité, fausse faillite et faux et usage de faux de documents officiels. Le premier responsable de la justice n’éludera pas l’autre préoccupation particulièrement celle des parents des prévenus détenus qui exprimaient à la cour de Blida, toujours le 19 juin dernier, leur incompréhension devant le fait que la durée de la détention préventive ait été prolongée de quatre mois. En effet, en réponse à une question de la presse sur le sort des détenus à titre préventif dans cette affaire, le ministre a affirmé que la détention préventive, dans ce cas, «n’est pas une détention arbitraire» et que sa durée «prendra fin quand les jugements définitifs de culpabilité ou d’innocence seront prononcés à l’encontre de ces personnes». Belaiz, à cette occasion, dira que la justice sera «rigoureuse», qu’elle «s’appliquera à tous» et que «personne n’est au-dessus des lois», ajoutant que «toute la société est concernée par la réforme de la justice car le pouvoir judiciaire est le seul pouvoir qui survit aux régimes».

Il faut savoir que parmi les personnes entendues dans le cadre de cette affaire, il y quatre ministres et pas moins de 40 P-DG d’entreprises publiques. En attendant que la justice se prononce sur cette affaire, des têtes sont déjà tombées. Du moins si l’on se réfère aux propos du ministre du Travail et de la Sécurité sociale, M. Tayeb Louh qui annonçait, jeudi, que son ministère «a démis de leurs fonctions dix cadres dirigeants de caisses de sécurité sociale impliqués dans l’affaire Khalifa». Il répondait à une question du député Hacène Aribi du mouvement El-Islah sur les fonds des caisses de sécurité sociale déposés auprès de la banque El-Khalifa. Non sans préciser que ces décisions ont été prises à l’encontre de ces responsables dans le cadre des mesures administratives prises par son département». Le ministère du Travail où on déplore le fait que «plusieurs entreprises et des structures relevant de la sécurité sociale ayant déposé des fonds auprès de la banque Khalifa, ne les aient pas encore recouvrés» et surtout où l’on évoque les répercussions de cette affaire sur les équilibres financiers de certaines caisses de la sécurité sociale, ne semble pas se suffire des seules décisions ayant touché dix de ses cadres dirigeants. Et pour cause le ministre, comme il le soulignait lui-même au député d’El-Islah, a donné instruction à toutes les structures du ministère en vue d’engager toute mesure juridique à l’encontre de toute personne ayant causé un préjudice aux caisses de sécurité sociale». M. Louh devait expliquer que «ces mesures permettront le recouvrement des fonds des établissements de la sécurité sociale déposés auprès de la banque Khalifa et ce, conformément à la loi, dans la mesure où l’affaire est entre les mains de la justice.

Mohamed Salah Boureni