L’Opep sous stress
par M. Saâdoune, Le Quotidien d’Oran, 12 octobre 2008
Le pétrole baisse. Il ne pouvait échapper au stress et à la panique qui se sont emparés des marchés internationaux du fait de la crise financière américaine devenue, par la force des choses, une crise mondiale.
Les spéculateurs ne semblent plus vouloir jouer sur le pétrole en faisant des anticipations pessimistes au sujet de la demande. A cet aspect, s’ajoute aussi le fait que les banques qui connaissent de sérieux problèmes de liquidités prêtent beaucoup moins aux traders. Des acteurs sont ainsi éliminés du marché et le nombre des transactions baisse. L’appréciation du dollar fait aussi perdre au pétrole son statut de valeur refuge. Ces aspects s’ajoutent à une baisse réelle de la demande face à une offre pétrolière excédentaire.
Jusqu’où ira la chute des prix du pétrole, dans quelle fourchette oscilleront les prix ? A la lecture des chiffres donnés par les experts – entre 50 et 80 dollars – cela relève presque de la sorcellerie.
Mais rien n’est impossible au vu des extraordinaires évolutions de la crise financière.
Sur fond de projection pessimiste de la croissance chinoise, la banque d’affaires Merrill Lynch a évoqué la possibilité d’un reflux des prix pétroliers au niveau de 50 dollars, un scénario grave pour les économies des pays pétroliers peuplés, dont l’Algérie. Même des pays plus à l’aise comme l’Arabie Saoudite ou les pays du Golfe considéreraient ce seuil inacceptable. L’Opep, après l’avoir pratiquement abandonné, devra à nouveau discuter du seuil acceptable du niveau plancher du prix du pétrole.
On sait que des pays comme l’Iran et le Venezuela défendent un prix plancher de 100 dollars. Les Saoudiens pourraient se satisfaire de 60 dollars. L’Algérie, qui préside l’Opep, pencherait pour un prix médian de 80 dollars. Il restera aux pays de l’Opep à accorder leurs violons et la partie n’est pas simple. On sait que les pays du Golfe restent très sensibles aux demandes américaines, ce qui a d’ailleurs poussé les Saoudiens à mettre de manière unilatérale 500.000 barils/jour sur le marché. Mais cette hausse de l’offre s’est faite à une période où les prix étaient très élevés et les Saoudiens, dont la Bourse a essuyé des pertes vertigineuses au cours de la semaine écoulée, ont – rationnellement du moins – toutes les raisons de ne plus faire la sourde oreille aux appels des autres membres de l’Opep.
La prochaine réunion extraordinaire de l’Opep, si elle ne débouche pas sur des décisions fermes ayant une incidence réelle sur le marché pétrolier, serait un très mauvais signal, le pire. Réduire une offre trop abondante est la seule décision en mesure d’enrayer la chute des cours pétroliers. «Des décisions fondamentales doivent être prises», pour reprendre la formule du ministre iranien de l’Energie. C’est le moins qu’on puisse dire. Si l’Opep n’arrive pas à agir pour assurer un prix acceptable, quelle serait sa raison d’être ?