Réunion de l’OPEP: Les yeux braqués sur Vienne

Réunion de l’OPEP: Les yeux braqués sur Vienne

par Ali Babès, Le Quotidien d’Oran, 23 octobre 2008

L’Organisation des pays exportateurs de pétrole va vendredi à Vienne prendre une décision importante : réduire d’au moins 2 millions de barils/jour sa production de brut. Objectif : faire remonter les prix du brut, éviter un cataclysme sur le marché pétrolier et une situation catastrophe pour les pays producteurs. Face à une récession économique qui se précise de plus en plus sur le sillage d’une violente crise des marchés financiers, les prix pétroliers se sont mis à dégringoler, atteignant la barre inquiétante des -70 dollars, après avoir atteint en juillet dernier un plus haut de 147,50 dollars. Pour nombre d’experts pétroliers, l’OPEP va lors de sa réunion de vendredi tailler «sec» dans sa production pour calmer la chute des cours et éviter une trop grande dépréciation qui irait en dessous des 60 dollars et faire repartir à la hausse le marché.

En l’espace de trois mois et demi, les prix du pétrole ont perdu plus de la moitié de leur valeur. D’un record de 147,50 dollars en juillet, ils se sont effondrés jusqu’à 65,45 dollars à Londres, leur niveau le plus bas depuis mai 2007. Les pays membres de l’organisation conviennent de baisser leur production, mais toute la question que se posent les experts comme les marchés est de savoir de combien sera cette baisse. Une baisse d’1 mbj serait envisageable, alors que les ministres libyen, iranien et qatari estiment que ce chiffre était un minimum. D’autres estiment par contre que cette réduction de la production de l’OPEP sera encore beaucoup plus importante. L’OPEP, qui fournit 40% de la production mondiale de brut, va tenter ainsi d’ajuster son offre à une demande qui se détériore à grande vitesse, victime de la cherté des carburants cet été et de la crise économique mondiale. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) ne table plus, ainsi, que sur une progression très modeste de la demande, de 400.000 bj en moyenne en 2008 et 700.000 bj en 2009. «Selon un scénario de demande catastrophique, l’OPEP pourrait être obligée de retirer du marché jusqu’à 2,4 mbj dans les 12 prochains mois», selon un analyste de Deutsche Bank.

Dans la ligne favorable à une baisse drastique de l’offre OPEP, il y a notamment l’Iran qui ne serait pas opposé à un baril à 150 dollars et une baisse de 2 à 2,5 mbj. En face, les pays consommateurs estiment que l’organisation n’a pas le droit de revoir à la baisse sa production pour faire remonter des cours tétanisés par la crise économique. Le président de l’OPEP, Chakib Khelil, a répondu lundi à ce courant en relevant qu’il est «un peu étrange» que des pays intervenant actuellement au niveau de leurs banques et de leurs capitaux pour réguler le secteur financier, n’acceptent pas que l’OPEP régule le marché pétrolier. «Notre histoire dans le secteur pétrolier a démontré qu’un marché pétrolier non régulé est condamné à des effondrements et à des prix exorbitants qui ne sont ni dans les intérêts des uns, ni dans les intérêts des autres». Le secrétaire général de l’OPEP a, de son côté, réaffirmé mercredi à Moscou que l’organisation a tout à fait le droit de défendre ses intérêts. D’autant que M. Chakib Khelil a lancé un message clair aux producteurs non-OPEP : s’ils décident de baisser leur production, la décision de réduction de la production OPEP serait moins dramatique pour tout le monde.

Mais, la crise économique serait encore plus profonde et a déjà commencé, selon M. Nicolas Sarkis. La crise financière internationale, qui a entraîné un ralentissement de la croissance dans plusieurs pays dont la Chine, «a un impact direct sur la demande pétrolière dont l’accroissement pourrait se limiter à une moyenne mondiale de 0,5 à 0,7% en 2008 et 2009, contre 1,5 à 2% au cours des cinq dernières années», selon Sarkis qui a estimé que «cette baisse des besoins de consommation a été l’un des principaux facteurs qui ont conduit à l’effondrement des prix qui ont été divisés par deux en trois mois en chutant d’un record de 147,27 dollars le baril le 11 juillet dernier à près de 72 dollars actuellement pour ce qui est du WTI américain sur le Nymex».

Bref, la réunion de l’OPEP de vendredi aura, d’une manière ou d’une autre, un impact décisif sur le marché pétrolier, avec comme objectif de faire remonter les cours du brut. La question essentielle demeure : est-ce que tous les pays OPEP vont adhérer à cet objectif ?