L’Algérie reprend le contrôle sur les richesses pétrolières du pays
L’ordonnance relative aux amendements à la loi sur les hydrocarbures adoptée
L’Algérie reprend le contrôle sur les richesses pétrolières du pays
N. Ryad, Liberté, 16 octobre 2006
Les amendements freinent les transferts de devises vers l’étranger.
L’Assemblée populaire nationale a adopté, samedi passé, l’ordonnance amendant la loi 05-07 relative aux hydrocarbures. Ces changements consacrent le contrôle par l’État des richesses hydrocarbures du pays. En clair, Sonatrach détiendra une part de 51% minimum dans tout contrat de recherche, de développement de gisements de pétrole ou de gaz et dans tout projet de réalisation d’infrastructures de transport. Les amendements modifient les principales dispositions de la nouvelle loi sur les hydrocarbures. En effet, dans cette réforme, aujourd’hui annulée, la part du partenaire étranger peut atteindre 70% quand il réalise la découverte
d’un gisement. Il peut investir directement. Sonatrach soumissionne au même titre que les compagnies étrangères pour obtenir un bloc d’exploration.
Avec ces amendements, les avantages octroyés aux partenaires étrangers deviennent caducs. Sonatrach conserve sa part de 51% minimum sur tout projet d’exploration ou de développement de gisements de pétrole ou de gaz. La compagnie étrangère doit s’associer à la compagnie pétrolière nationale pour pouvoir décrocher le contrat de recherche ou d’exploitation de champs d’hydrocarbures. En somme, l’Algérie reprend d’une main ferme le contrôle sur ses richesses.
Sonatrach détenait déjà, pour le compte de l’État, 40% du domaine minier national, c’est-à-dire l’essentiel des gisements en exploitation et des blocs pour l’exploration, en particulier les deux mamelles de l’Algérie, les gisements Hassi Messaoud et Hassi R’mel. Le reste, c’est-à-dire un potentiel inexploré ou insuffisamment exploré, des champs découverts, mais non exploités devaient être cédés aux compagnies étrangères. Avec les amendements, Sonatrach devient incontournable. Elle disposera d’une part majoritaire dans tout projet soumis à appel d’offres devant confirmer le potentiel hydrocarbures en place ou de développement de champs de pétrole ou de gaz non exploités. Autrement dit, l’Algérie assure par ces amendements le contrôle sur la rente pétrolière. Elle assure sa souveraineté sur les richesses hydrocarbures du pays. Traduction : elle garantit, via ces changements, la maîtrise par l’État des interventions des compagnies étrangères dans le domaine minier national. Sur le plan des revenus, les amendements tendent à freiner les transferts de bénéfices des partenaires étrangers de Sonatrach, au titre de leur part dans la production d’un champ exploité en association. Ses rapatriements de devises vers les comptes des compagnies étrangères allaient crescendo. Ils sont passés de 500 millions de dollars en 2000 à plus de 4 milliards de dollars en 2005.
Un amendement limite ces transferts. En effet, une taxe sur les profits exceptionnels des compagnies étrangères associées à Sonatrach est imposée. Elle est de 5% minimum et de 50% maximum, applicable à partir du 1er août 2006. Il s’agit d’“une taxe non déductible sur les profits exceptionnels réalisés par des associés étrangers, applicable à la part de production leur revenant, lorsque la moyenne arithmétique mensuelle des prix du Brent est supérieure à 30 dollars par baril”. Les revenus des compagnies étrangères se trouvent ainsi réduits au profit de l’État algérien. Au regard des prix actuels du brut qui tournent autour de 60 dollars le baril, cet amendement va contribuer vraisemblablement à une hausse des rentrées en devises de l’Algérie en 2006. La barre des 50 milliards de dollars, correspondant aux rentrées tirées des exportations d’hydrocarbures, sera nettement dépassée l’année en cours.
Si ces amendements s’avèrent, en définitive, positifs, eu égard à un contexte international favorable où les prix du pétrole demeurent élevés, n’oublions pas que cette reprise en main des richesses du pays implique une plus grande responsabilité pour nos gouvernants, celle de bien gérer la rente pétrolière et d’assurer une répartition juste de cette richesse.
N. Ryad
Pétrole
L’ordonnance portant amendement à la loi sur les hydrocarbures adoptée
Par : Meziane Rabhi, Liberté, 16 octobre 2006
L’ordonnance portant amendement à la loi 05-07 relative aux hydrocarbures a été adoptée à l’unanimité par les députés dans la soirée de samedi à dimanche. Le ministre de l’énergie et des mines, dans sa présentation du texte, motive les amendements introduits par la conjoncture internationale relative à l’industrie pétrolière et son évolution future, en général, et la situation du marché pétrolier, en particulier.
Ces arguments font qu’il a été jugé nécessaire de revoir le dispositif mis en place par la loi 05-07 relative aux hydrocarbures du 28 avril 2005, pour introduire de nouvelles mesures permettant d’élargir et de renforcer le contrôle, par l’État, des ressources en hydrocarbures et leur exploitation rationnelle, tenant compte des aspects de conservation et de préservation de ses ressources au profit des générations futures.
Les nouvelles dispositions introduites dans le texte amendé portent essentiellement sur le niveau de participation de Sonatrach, l’instauration d’une taxe sur les profits exceptionnels, le remplacement du conseil consultatif institué auprès de chaque agence par un conseil de surveillance, la dotation d’un secrétaire général au niveau de chaque agence, et l’exclusion de Sonatrach des mesures d’arbitrage international, en cas de litige entre Alnaft et un des contractants.
Ainsi, l’article 32 oblige Sonatrach à prendre une participation de pas moins de 51 % minimum dans tous les contrats de recherche, d’exploitation et de raffinage, préalablement au lancement de l’appel à la concurrence. L’ordonnance réserve aussi à Sonatrach l’exclusivité de la concession de transport par canalisation des hydrocarbures, tout en signalant la particularité des canalisations internationales, comme Medgaz, Galsi, une particularité prise en charge par l’article 73 de la loi 05-07.
Dans un nouvel article, 101 bis, le texte instaure une taxe sur les bénéfices exceptionnels non déductibles de l’assiette de calcul de la taxe sur le revenu pétrolier, appliquée sur les contrats d’association conclus conformément à la loi 86-14, lorsque le prix du pétrole Brent dépasse 30 dollars le baril, tenant compte du niveau de la production.
Cet amendement est motivé par le fait que, de plus en plus, des plus-values importantes sont réalisées par les associés étrangers de Sonatrach, suite aux prix élevés du pétrole, sans que ces associés étrangers ne soient soumis à un mécanisme d’écrémage non prévu par les contrats conclus dans le cadre de la loi 86-14.
Le taux de cette taxe, qui prend effet à partir du 1er août 2006, et applicable sur la production revenant aux associés étrangers, est fixé à 5 % au minimum et à 50 % au maximum.
Pour s’acquitter de cette taxe auprès du trésor public, Sonatrach procédera à la déduction à partir de la part de production revenant aux-dits associés étrangers, de la quantité d’hydrocarbures correspondant au montant de cette taxe. En marge de l’adoption du texte, le ministre de l’énergie et des mines, M. Chakib Khelil, a confirmé, à Alger, le consensus auquel est parvenu l’Opep pour une réduction de la production de pétrole de 1 million de barils/ jour, une baisse qui sera annoncée lors de la prochaine réunion de l’Opep prévue à Doha du 18 au 21 octobre.
M. R.