Torture: L’Algérie accablée et appelée à revoir sa législation

Pratique de la torture au Maghreb et au Moyen-Orient

L’Algérie accablée et appelée à revoir sa législation

El Watan, 12 décembre 2011

Dans une déclaration rendue publique à l’occasion du 63e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, l’OMCT tire la sonnette d’alarme et propose une feuille de route pour mettre un terme à cette pratique.

La pratique de la torture dans les pays du Moyen-Orient et du Maghreb inquiète de plus en plus les organisations internationales. La situation est alarmante. L’avenir ne sera pas forcément meilleur pour les citoyens des pays concernés ; au contraire, les pouvoirs dans ces régions ne font aucun effort pour bannir la torture, qui est un crime dans le droit international.
Ce sont là les conclusions de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) qui travaille en collaboration avec 13 organisations représentant les pays de la région.

Dans une déclaration rendue publique à l’occasion du 63e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, l’OMCT tire la sonnette d’alarme et propose une feuille de route pour mettre un terme à cette pratique.
L’organisation revient, en effet, longuement sur la situation dans plusieurs pays, dont l’Algérie où «la législation impose le silence sur les cas de torture». «D’autres Etats, tels que l’Algérie, ont engagé des réformes qui, si elles étaient adoptées, renforceraient les restrictions actuelles sur les libertés fondamentales. La levée de l’état d’urgence n’a eu aucune conséquence positive puisque les dispositions d’urgence ont été conservées dans le droit commun et de nouvelles lois sont venues renforcer le dispositif permettant de ne pas respecter les droits des personnes arrêtées et détenues, allant même jusqu’à inscrire dans la loi la détention dans des lieux secrets», dénonce l’OMCT.

Selon l’organisation, «les violations des droits de l’homme en Algérie, y compris la torture, les détentions arbitraires et les disparitions forcées, sont commises de manière trop fréquente par des forces de sécurité, qui jouissent d’une totale impunité». «Cette impunité est renforcée par le fait que les textes d’application de la charte pour la paix et la réconciliation nationale prescrivant une impunité totale des agents de l’Etat pour les crimes commis durant les années 1990 sont toujours en application», déplore l’organisation. Les signataires de cette déclaration appellent, dans ce sens, l’Algérie et les pays de la région à inscrire «la lutte contre la torture comme un axe prioritaire dans leurs agendas des réformes». «Nous sommes à la croisée des chemins, ce qui offre une occasion historique de mettre enfin un terme aux pratiques endémiques et systémiques de torture et de mauvais traitements dans la région. Il est donc essentiel que la lutte contre la torture et l’impunité occupe une place centrale dans l’agenda des réformes des pays qui s’engagent dans une véritable transition. De même, nous ne devons pas lésiner sur les efforts pour mettre un terme au recours à la torture et pour que soient jugés les responsables de la répression violente des mouvements dissidents et d’opposition», note encore l’OMCT.

Elle définit dix étapes pour lutter contre ce crime.

Première recommandation : s’engager à mettre un terme à la torture et aux mauvais traitements. «Les gouvernements devraient exprimer publiquement leur engagement univoque à mettre fin aux pratiques impliquant la torture et les mauvais traitements, à œuvrer pour des réformes fondamentales favorisant les poursuites à l’encontre des auteurs d’actes de torture et à prévenir les actes de cette nature à l’avenir», précise l’OMCT.
La deuxième étape consiste à diligenter des enquêtes systématiques sur les actes de torture et traduire les auteurs en justice. «La torture étant un crime en vertu du droit international, les Etats ont l’obligation claire et sans équivoque de mener des enquêtes indépendantes et de traduire en justice les auteurs», ajoute-t-on. Parallèlement, l’organisation exige le respect du droit des victimes au recours et à la réparation.
En outre, l’OMCT recommande le démantèlement de l’appareil répressif qui est à l’origine de la pratique, la démilitarisation du système judiciaire ainsi que l’instauration d’un système efficace de protection.

Madjid Makedhi