Communiqué à propos de Abassi Madani et Ali Benhadj

Ils signent un communiqué

La plaidoirie de Ben Bella, Taleb, Nahnah, Mehri…

Le Quotidien d’Oran, 12 mai 2003

Que faire de Abassi Madani et Ali Benhadj dont la période de détention légale expire au mois de juin prochain ? La question agite le landerneau politique surtout que la sortie légale des deux hommes intervient à quelques mois des présidentielles. Des personnalités nationales ont leur réponse: il faut appliquer la loi !

Des personnalités politiques des courants nationaliste et islamiste ont rendu public hier un communiqué pour mettre en garde le pouvoir contre le recours à des mesures arbitraires de nature à entraver le droit de Abassi Madani et Ali Benhadj à jouir de leurs libertés comme le reste des citoyens. Pour eux, à la fin de l’expiration de la peine, au mois de juin prochain, les deux hommes doivent être libérés pour jouir de leurs droits de citoyens.

Les auteurs de l’appel sont connus pour leur engagement pour la réconciliation nationale et certains d’entre eux sont des acteurs du contrat national signé à Rome en 1994. Parmi eux, il y a l’ancien président Ahmed Ben Bella, l’ancien secrétaire général du FLN, Abdelhamid Mehri, le président de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme, Ali Yahia Abdenour, le président du MRN, Abdallah Djaballah. Mais la liste des signataires est plus large puisqu’elle comporte des noms qui n’étaient pas liés au contrat de Rome comme le général à la retraite Rachid Ben Yelles, l’ancien ministre des Affaires religieuses qui préside actuellement l’association des oulémas, Abderahmane Chibane.

Mahfoud Nahnah, le président du MSP, est connu pour avoir mené un combat acharné contre le contrat de Rome. On peut y ajouter un grand revenant comme Lahbib Adami, ancien chef du mouvement Ennahda, ainsi que Fatah Rebiai qui avait pris en charge le même parti après sa déconfiture électorale aux législatives. Le spectre politique des signataires est donc beaucoup plus large que celui des signataires du contrat national. C’est celui de la «réconciliation nationale» qui prime. Et le ton de l’appel est largement imprégné de cet impératif réconciliateur et de l’inquiétude d’un éventuel recours par le pouvoir à des mesures arbitraires pour empêcher la libération des deux chefs du FIS. L’appel souligne qu’il est du «droit légal» pour Abassi Madani et Ali Benhadj, après avoir accompli «12 ans derrière les murs, d’être libérés sans recours à tout arbitraire qui les priverait de jouir de leurs libertés comme le reste des citoyens».

Les signataires en appellent au pouvoir «pour se conformer à la loi qui impose la libération des deux cheikhs et le recouvrement de leurs liberté». Cette conformité nécessaire à la loi «est de nature également à apaiser les esprits et à renouveler l’espoir d’atteindre la réconciliation nationale qui est une exigence de toutes les catégories du peuple algérien». Ils estiment que l’attitude du pouvoir sur cette question sera un «test de son attachement à l’édification d’un Etat de droit, d’une justice indépendante et d’une démarche sérieuse pour tourner la page du sang et des larmes».

Le texte considère que les douloureuses épreuves subies par le pays depuis plus de onze ans imposent «une coopération entre toutes les énergies agissantes et une rencontre des bonnes volontés nourries aux valeurs de la personnalité nationale dans ses dimensions islamique, arabe et amazighe» afin de rétablir la stabilité, la solidarité et l’entente dans le pays.

Outre le fait que le spectre des signataires est très large, on peut noter que le texte est très mesuré et constitue un appel au pouvoir à transcender les différends d’hier pour regarder vers l’avenir. Il est aussi l’expression d’une inquiétude à l’idée que dans les arcanes du pouvoir l’on cherche un moyen d’éviter un retour à la liberté des deux hommes qui peuvent s’avérer bien encombrants.

M. Saâdoune