Accusés à tort de liens avec El-Qaïda : Neuf Algériens dénoncent les abus des autorités britanniques

Accusés à tort de liens avec El-Qaïda : Neuf Algériens dénoncent les abus des autorités britanniques

par Zouaoui Mouloud , Le Jeune Indépendant, 18 août 2004

Neuf Algériens, arrêtés il y a deux ans, ont accusé les services de sécurité britanniques de les avoir injustement classés dans une liste de terroristes activant sous l’ordre de l’organisation El-Qaïda. Dans une conférence de presse tenue, hier, à Edimbourg, en présence de leurs avocats, leurs familles et des représentants d’organisations de défense des droits de l’homme, les neuf Algériens ont dénoncé le parti-pris arbitraire des services de renseignements qui n’ont, à ce jour, pas supprimé leurs noms de la liste établie par la branche spéciale du MI5.

Cette dernière les soupçonnait de «préparer des attentats d’envergure dans les rues de Grande-Bretagne». Un de leurs avocats a fustigé la police pour le mauvais traitement subi par ses clients, dont certains possèdent la citoyenneté britannique, tout le long de leur détention.

Selon lui, ses clients ont été soumis à des interrogatoires humiliants au sujet de leurs supposés liens avec une organisation terroriste. Anwar Ameur, du cabinet Beltrami Berlow basé à Glasgow, soutenait qu’en dépit du fait que les charges retenues contre eux ont été abandonnées par la justice, leurs noms figurent toujours sur cette liste qui en compte 82.

L’un d’eux, Ali Serir, 29 ans, affirmait que son épouse Karen, malmenée par la police durant toute cette période, ne pouvait assister à la conférence de presse tant elle souffrait de troubles psychiques. Accusé de préparer un attentat durant les célébrations du Hogmanay (NDLR : le Nouvel An écossais) dans le quartier Princes Street, Serir affirmait qu’il avait pris son arrestation pour «une simple blague».

«Je suis un père de famille honnête, je travaille et je ne me soucie que du bien-être de ma famille», a-t-il dit. Les neuf hommes avaient été arrêtés en décembre 2002 à Edimbourg dans le cadre d’une vaste opération qui a visé les milieux de réfugiés et demandeurs d’asile algériens.

Suspectés d’activités terroristes, ils avaient été ensuite relâchés en mars dernier après des enquêtes qui ont coûté 1,5 million de livres au Trésor britannique. Leurs avocats réclament, dès lors, la suppression de leurs noms de cette liste qui continue à circuler au sein des services de sécurité représentant pour eux une épée de Damoclès.

Les neuf mis en cause n’ont cessé de plaider leur innocence affirmant qu’ils subissent une terrible injustice au motif qu’ils sont musulmans. Ils accusent le gouvernement britannique de mettre leurs vies en danger en se basant sur des informations erronées des services secrets.

Vendredi dernier, l’un des neuf hommes, Hakim Ziam, 33 ans, ex-étudiant en journalisme, a été interpellé pour «séjour illégal» puis conduit au centre de détention provisoire de Dungavel à Lanarkshire (centre de l’Ecosse). A partir de là, il risquait l’expulsion.

Mais grâce à l’intervention de son avocat, Ziam a été libéré samedi matin. «Leurs vies ont été complètement retournées sens dessus dessous sur la base d’accusations montées de toutes pièces et souvent ridicules, destinées à tromper l’opinion britannique sur les menaces terroristes», estimait Me Ameur.

Parmi les accusations retenues contre l’un d’eux, a-t-il dit, le fait d’avoir reçu de nombreux visiteurs durant le mois de ramadan. «Ceci équivaut à reprocher à une famille chrétienne de recevoir de nombreux invités durant la fête de Noël», a affirmé avec ironie Me Ameur, ajoutant qu’»aucun de ces neuf individus n’est terroriste.

Il s’agit de gens ordinaires persécutés par la police». Vingt des 82 noms figurant sur cette liste sont établis en Grande-Bretagne, selon le MI5 qui indique que les noms des Algériens ont été ajoutés suite à des informations parvenues des services de sécurité algériens.

Interrogé par le quotidien The Scotsman, Henry Miller, un avocat du cabinet Birnberg Pierce, basé à Londres et spécialiste des dossiers de demandeurs d’asile, confirmait l’existence de liens entre les deux services de sécurité, britanniques et algériens.

Z. M.