Sahara occidental: Les confessions troublantes de John Bolton

Sahara occidental

Les confessions troublantes de John Bolton

Par : Amine Allami, Liberté, 18 novembre 2007

Il révèle que “le plus grand obstacle à ma vision était la bureaucratie du département d’État soutenue par le Conseil national de sécurité avec Elliot Abrams”. Les deux, a-t-il poursuivi, ont accepté l’idée que l’indépendance du Sahara occidental, option pour laquelle les Sahraouis opteraient sûrement de l’avis quasi général, déstabiliserait le Maroc.

John Bolton, ancien représentant permanent des États-Unis à l’ONU et proche collaborateur de James Baker dans le dossier du Sahara occidental vient de publier un livre sorti le 6 novembre dernier aux éditions Threshold Editions et intitulé Surrender is not an Option, et dans lequel il traite du dossier du Sahara occidental. En fait, cette partie du livre réservé à ce dernier cas de décolonisation inscrit au sein des Nations unies, l’ancien ambassadeur US à New York évoque les difficultés d’appliquer les résolutions onusiennes en raison de l’absence d’une volonté politique de Washington, pris dans l’engrenage de ses intérêts stratégiques avec Rabat.
Bolton commence par rappeler que James Baker était l’envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental. Sa mission, précisa-t-il, était d’œuvrer à l’organisation d’un référendum au Sahara occidental afin de déterminer si le territoire doit être annexé au Maroc ou accéder à l’indépendance. L’auteur a clairement indiqué que le Maroc avait initialement donné son accord pour la tenue du référendum. Il a également expliqué que Van Walsum, qui a remplacé James Baker, avait vainement tenté d’examiner si un membre du Conseil de sécurité de l’ONU, notamment les États-Unis, était disposé à exercer des pressions sur le Maroc pour l’amener à honorer ses engagements.
Il a aussi rappelé que la Cour internationale de justice avait formellement rejeté les revendications marocaines sur le Sahara occidental. M. Bolton a, par ailleurs, relevé qu’après avoir constaté que le Maroc n’avait nullement l’intention de permettre un référendum, il avait proposé de mettre fin à la Minurso et de libérer les Sahraouis de leur engagement pour un cessez-le-feu pris en échange de la promesse d’un référendum. Si le Maroc n’acceptait pas cette perspective, il lui reviendrait alors d’être sérieux en permettant le référendum, a-t-il encore expliqué. John Bolton va plus loin, révélant ainsi le parti pris de l’administration US dans le conflit vieux de 32 ans en affirmant que “le plus grand obstacle à ma vision était la bureaucratie du département d’État soutenue par le Conseil national de sécurité avec Elliot Abrams”. Les deux, a-t-il poursuivi, ont accepté l’idée que l’indépendance du Sahara occidental, option pour laquelle les Sahraouis opteraient sûrement de l’avis quasi général, déstabiliserait le Maroc. C’est, selon lui, la raison qui avait conduit l’administration américaine à rejeter le plan Baker de 2004, poussant ainsi James Baker lui-même à démissionner. Ce constat a amené John Bolton à s’interroger sur la véracité du soutien apporté par l’administration américaine à la démocratie au Grand-Moyen-Orient. Pour l’auteur, il est tout à fait clair que pour l’administration US, la stabilité du roi Mohammed VI l’emportait sur le principe de l’autodétermination. Et cette phrase de Bolton est assez significative de la stratégie de pourrissement et de soutien à la colonisation des territoires du Sahara occidental adoptée par la Maison-Blanche. “Je me suis investi dans de nombreuses tentatives pour trouver, ailleurs au sein du gouvernement, des soutiens à l’organisation d’un référendum, mais sans succès. Abrams et moi avions alors convenu d’une réunion au département d’État, le 19 janvier 2006, pour examiner les possibilités d’arriver à une stratégie commune. J’ai expliqué, au cours de cette rencontre qui avait regroupé une trentaine de participants, que l’ONU n’avait aucun rôle politique à jouer en l’absence d’une personnalité ayant l’envergure de James Baker et que le Maroc n’avait aucune volonté à accepter un référendum au Sahara occidental incluant l’indépendance parmi les options possibles. Mais Abrams insistait sur la stabilité du Maroc”.

Amine Allami