Le FFS tente une marche sur la présidence

Dissolution des APC et APW de la Kabylie

Le FFS tente une marche sur la présidence

Le Quotidien d’Oran, 23 juillet 2005

A quelques minutes de l’heure prévue pour le rassemblement, la majorité des élus du FFS étaient déjà là. Sous un soleil de plomb, le siège du parti est déjà très animé. De l’entrée jusqu’à plus bas, les cours du siège grouillent de monde. Des élus venus d’un peu partout, avec une dominance de ceux de la Kabylie. Chaque élu remplit un petit formulaire de présence. Au bout du compte, ils sont 798 élus présents sur un total de 890.

La minute de silence et l’hymne national n’arrivent pas à contenir l’impatience des militants et sympathisants. Devant une tribune improvisée, face aux banderoles aux slogans fustigeant le gouvernement, le «pouvoir» qui ont décidé de dissoudre les APC et APW de la Kabylie, le premier secrétaire national, Ali Laskri, prend la parole, un instant, pour dire que le secrétariat a décidé de faire une marche sur la présidence. Le cortège s’ébranle, avec en tête M. Laskri et les membres de son bureau. Panique chez les policiers en civil, pris de court par cette décision du FFS. Scandant les slogans inscrits sur les banderoles, les marcheurs du FFS se frayent un chemin en forçant le premier barrage fait par une poignée de policiers, agents de la circulation.

L’alerte est donnée, le renfort de CNS arrive installant dans un désordre le premier cordon. Marcheurs du FFS et forces anti-émeute se rencontrent au carrefour entre le boulevard Souidani Boudjemaâ et le boulevard de Pékin. La marche est stoppée à ce niveau. A quelques centaines de mètres du siège du parti. Elle se transforme en rassemblement, en sit-in. Rafale de slogans: «La Kabylie assume son nationalisme et son algérianité», «Arrêtez votre entreprise de destruction et raciste contre la wilaya III historique».

Depuis une heure, assis parfois, devant l’impassible cordon de sécurité, sous un soleil qui commence à faire son effet, les militants du FFS respectent la stricte consigne de la discipline pacifique.

Karim Tabbou, secrétaire national chargé de la communication clame «non à la révocation de la démocratie». Il est ensuite relayé par le premier secrétaire qui fustige le couple «Bouteflika-Ouyahia» qu’il accuse d’agresser le FFS. Il compare leur décision à de «la haine et de la vengeance contre la wilaya III».

Tous les qualificatifs y passent: racisme, régionalisme, apartheid. «Arrêtez votre politique raciste», criera Tabbou en promettant que «le FFS fera barrage à cette entreprise de destruction». Ali Laskri évoquera la situation sociale et économique du pays, la misère et la pauvreté. Mais le clou a été surtout l’évocation «des laboratoires de la police politique» qui ont créé «la structure des ârouch». Il rappellera d’ailleurs la rencontre, en 1992, entre Belaïd Abrika et Sid Ahmed Ghozali.

Tabbou reprend la parole pour demander aux militants de rejoindre le siège dans le calme. «Nous avons réussi à lever le régime de territoire occupé sur la capitale», dit-il en référence à l’interdiction de marche à Alger depuis 2001. Le cortège reprend le chemin inverse scandant les mêmes slogans. Sans incidents, le rassemblement a duré deux heures.

Au siège su parti, Ali Laskri reprend sa place sur la tribune et lit une déclaration dans laquelle il reprend les sujets évoqués lors du rassemblement au carrefour. Il a dénoncé «une entreprise criminelle que la police politique compte mener pour solder des comptes avec une région qui refuse et continue de refuser de céder aux sirènes de la normalisation et de la corruption». Il a dénoncé également «la structure dont la seule aptitude est sa capacité à organiser le désordre». Cela, selon lui, participe de la reconfiguration de la scène politique pour «ne laisser à la surface que les organisations maison et les délégués chargés de mission».

Laskri, Tabbou et Matatache ont d’abord tenu à démontrer le caractère illégal et anticonstitutionnel de la décision du Conseil des ministres portant dissolution des APC et APW de la Kabylie. Tabbou commencera par décortiquer le communiqué du gouvernement pour démonter l’argumentaire de la décision. Il reviendra sur les émeutes d’ailleurs qui ont entravé le fonctionnement des APC mais que le gouvernement n’a pas jugé utile de dissoudre. Sur le plan juridique, il a estimé qu’il s’agit de la remise en cause du principe de décentralisation ainsi que de la volonté populaire. Il a dénoncé également le «recours abusif et systématique à l’ordonnance». Et de poser enfin la question des sénateurs qui ont été élus par des «élus révoqués». Une anomalie et «aberration», selon lui.

Sur le retrait de ses élus, Laskri sera clair et ferme. «Nous refusons le retrait et rejetons totalement ce décret et continuerons à protester», dit-il. Un programme d’actions est élaboré, mais il n’en donne que celle du 20 août. «Le programme s’inscrit dans le temps», s’est-il contenté de dire.

Interrogé sur la position du parti par rapport à l’appel à une alliance lancé par Saïd Sadi du RCD, Laskri dira: «Nous sommes dans la logique du refus de la dissolution», ajoutant «le FFS ne sera pas une passerelle pour d’autres partis». Il ira loin en déclarant que «les partis ne sont pas autonomes dans leurs décisions, qu’il n’y a pas de véritable opposition». Et de poursuivre «le conseil national débattra et décidera», dit-il. Des alliances sont envisagées dans le cadre de la protestation «permanente», mais avec la population et les personnalités. Pas les partis. Car «ils sont laminés», a-t-il conclu.

Djilali B.