Des émeutes ferment Maghnia

Les sièges de la BNA et de la Sonelgaz saccagés

Des émeutes ferment Maghnia

Le Quotidien d’Oran, 7 mai 2006

Maghnia a vécu, hier, une journée des plus agitées à cause de violentes manifestations qui ont été initiées, en début de matinée, par des propriétaires de camions, d’engins et même de véhicules légers qui espéraient ainsi un entretien avec le wali sur certains sujets telles sa décision de «bloquer la délivrance de la carte grise» pour les camions et des «saisies qu’ils considèrent abusives» de leurs véhicules. C’est devant le siège de la daïra que l’attroupement a débuté.

Après un entretien infructueux de leurs représentants avec le chef de daïra, les quelque 200 personnes se sont dirigées vers la sortie Est de la ville, semant sur leur passage des blocs de pierres et autres pneus enflammés, sur plus de 2 km. Toute la circulation a été ainsi paralysée.

Les revendications des émeutiers ne semblent pas les mêmes. Si les uns, qui se présentent comme «d’honnêtes propriétaires de camions» ne demandent qu’à travailler tranquillement sans qu’ils ne soient, à tout moment, interpellés sur la route et traités au même titre que les trafiquants de carburant, d’autres dénoncent l’«arbitraire dans les interpellations des véhicules qui, disent-ils, sont abusivement accusés de faire dans le trafic de carburant», ou certains autres qui signifient la cherté de la vie créée par la nouvelle mesure du passavant. A 11h, la tension était à son comble. «La lutte contre le trafic de carburant doit se faire à la frontière» lance, un manifestant, avant d’être rallié par un autre: «il est peut-être plus pressant d’arrêter d’abord la saignée économique qui est causée par le passage de l’autre côté de la frontière de la farine et des céréales par camions!» Chacun va de son «coup de gueule» dans une atmosphère étouffante provoquée par la fumée dégagée des pneus brûlés. «Le sac de ciment a atteint les 380 DA à cause du passavant. En plus du transport, les travaux de construction sont en veille ce qui est à l’origine du chômage des chauffeurs et les travailleurs du bâtiment», déclare ce commerçant en matériaux de construction.

Jusque-là la sagesse des forces de l’ordre dont le nombre des éléments était visiblement insignifiant, a eu raison des provocations répétées des émeutiers qui se sont dirigés vers le tribunal non sans semer les rues de pierres, de pneus et de poubelles enflammés. La foule en délire, gonflée par d’autres individus, s’est ensuite dirigée vers le siège de la daïra qui a été protégé par les éléments de la sûreté de daïra qui ont subi une pluie de projectiles et ont réussi difficilement à repousser la foule qui est devenue, de plus en plus menaçante, à coups de tirs de bombes lacrymogènes. L’attente de l’arrivée de la brigade d’intervention semblait éternelle, celle-ci ayant été obligée de dégager la route sur plus de 2 km pour pouvoir accéder. Les éléments de cette brigade ont aussitôt chargé la foule qui s’est éparpillée en des groupuscules qui n’avaient pas l’air de battre en retraite. A 15h, l’émeute est encore menaçante.

Un spectacle des plus désolant s’offrait aux yeux des citoyens qui ont osé sortir. Les rues semées de projectiles, les supports des drapeaux du principal boulevard complètement pliés pour barrer la route aux véhicules de la police. Tous les commerces ont baissé rideau, de même que les banques, les administrations publiques et même les mosquées.

A signaler qu’au cours de cette émeute, les locaux de la BNA et de la Sonelgaz, ont été saccagés. On apprend, par ailleurs, que les services de sécurité ont procédé à douze arrestations et trois manifestants ont été blessés et admis à l’hôpital de Maghnia.

Cheikh Guetbi