La sécurité militaire, le FFS et les élections

Le MDN dément tout contact entre le général Toufik et Aït Ahmed

La sécurité militaire, le FFS et les élections

Le Quotidien d’Oran, 15 avril 2004

Le ministère de la Défense nationale (MDN) a réagi, hier, aux propos tenus par le premier secrétaire du FFS, Djoudi Mameri, qui a déclaré, mardi dernier, que Hocine Aït Ahmed a eu des contacts avec le patron du DRS, le général Toufik.

Le MDN dément catégoriquement les déclarations du numéro 2 du «front», les juge sans fondement et voit en elles une tentative de remise en cause de la neutralité maintes fois déclarée – notamment en mars dernier dans la revue «El Djeich» – par le chef de l’état-major, le général Mohamed Lamari. L’affaire aurait pu s’arrêter là. Mais voilà que dans la même journée, Djoudi Mameri prend lui aussi sa plume et accuse les journaux qui ont couvert sa conférence de presse d’avoir mal interprété ses propos ou cherché à les dénaturer. Il nie «formellement» avoir fait état d’une «rencontre» ou d’un «projet de rencontre» entre Aït Ahmed et un quelconque haut responsable de l’ANP.

A-t-il raison ? A-t-il tort ? Seuls les journalistes qui possèdent l’enregistrement de la conférence de presse de M. Djoudi Mameri peuvent répondre. Mais cette vérification n’enlèvera rien aux vraies raisons qui ont incité l’armée à sortir du silence. Celles-ci sont en rapport avec la victoire de Bouteflika aux présidentielles et l’onde de choc que ce phénomène a provoquée au sein de l’opinion nationale et internationale. Sa grande portée explique pourquoi le MDN s’est opposé aujour-d’hui à des propos qui ne l’auraient peut-être pas fait bouger en d’autres temps. Elle indique bien dans quel débat politique nous sommes. Et quels risques la haute hiérarchie de l’ANP peut encourir, si elle s’abstient de faire les mises au point qui lui semblent nécessaires pour réaffirmer sa tenue à l’écart des luttes politiques dans le pays.

Tout le monde le sait: depuis le «8 avril» dernier, les opposants les plus acharnés au président Bouteflika tentent de minimiser la victoire de ce dernier en soutenant qu’il a été réélu par une fraude massive et par l’appui des «services». Au soir des présidentielles, leurs entourages ont même évoqué des versions fantastiques et juré que des garanties leur avaient été données par le patron du DRS pour que Bouteflika soit chassé du pouvoir. Et que ce dernier leur a même conseillé de sortir sur la place du 1er Mai pour protester contre le résultat des élections, avant de les laisser seuls face aux unités anti-émeute. Une partie de la presse et des formations de l’opposition en Europe et en France en particulier se sont inspirées de cette lecture en se posant des «questions» sur «l’énormité du score» réalisé par le chef de l’Etat réélu.

La version du FFS aurait été donc la goutte qui a fait déborder le vase. Elle aurait couvert la haute hiérarchie de l’ANP de graves soupçons rappelant la «décennie rouge» et une époque désastreuse que les militaires veulent à tout prix effacer. Mais aussi pour confirmer dans quel dessein l’ANP se trouve aujourd’hui: celui de l’après-11 septembre ! Autrement dit, un éloignement de plus en plus manifeste des turbulences et des luttes politiques internes. Une plus grande implication dans le grand jeu stratégique américain. Et, in fine, une participation active au sein de l’OTAN comme Washington le souhaite.

Noureddine Azzouz