Mali : un désengagement de l’ordre du symbolique

Mali : un désengagement de l’ordre du symbolique

par Kharroubi Habib, Le Quotidien d’Oran, 11 avril 2013

En trois mois de guerre menée au Mali par la force militaire qu’elle y a dépêchée, la France affirme avoir infligé de lourdes pertes aux groupes islamistes et démantelé leurs réseaux dans le Nord. Un bilan dont François Hollande et ses ministres de la Défense et des Affaires étrangères pour justifier la décision de Paris de procéder à un retrait échelonné à compter de la mi-avril des soldats français déployés. A cette échéance, Paris a effectivement retiré une centaine d’hommes sur les quatre mille que compte le contingent militaire français. Mais il ne faut pas voir dans ce geste des autorités françaises la confirmation du bilan militaire revendiqué par elles.

Ce retrait symbolique se veut la démonstration qu’au Mali elles sont maîtresses du calendrier et que celui-ci se déroule ainsi que l’ont anticipé leurs stratèges militaires et que le président François Hollande s’est engagé à respecter. Sauf que dans un premier temps le calendrier prévoyait que le désengagement français allait être plus massif et en un temps qui ne se prolongerait pas au-delà de juillet. Paris avait misé sur cette perspective en comptant qu’à cette date butoir, elle pouvait transmettre la mission de poursuivre la traque de ce qui reste des groupes armés islamistes et la sécurisation du Nord-Mali à l’armée malienne assistée de la force d’intervention militaire africaine (MISMA) fournie par les Etats du sud-ouest du continent. La réalité de cette force africaine d’intervention est toutefois loin de se matérialiser, de même que le projet onusien d’envoi au Mali d’une force internationale de maintien de la paix en reste lui aussi au stade de la concertation sur sa faisabilité.

Ce qui fait que Paris tout en présentant le désengagement de ses soldats comme inéluctable ne peut procéder à celui-ci dans les délais qu’elle s’est fixés. La France n’a pas fixé à son engagement aux côtés des autorités maliennes des objectifs exclusivement militaires. Elle y a mis le préalable et la condition que ces autorités ouvrent en parallèle à l’opération militaire contre les groupes armés islamistes au nord du Mali, un processus politique conduisant à la mise en place dans le pays d’un pouvoir légitime au travers d’élections législatives et présidentielle.

Dans une injonction qui fleure incontestablement la «Françafrique» politique de triste mémoire, Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères de François Hollande, a exigé de ces autorités maliennes qu’elles réalisent cet objectif politique avant la fin juillet. Ce qui dans la situation qui prévaut au Mali et tant que les responsables de la transition acceptent d’y travailler, est pratiquement mission impossible. Il semble bien ainsi que François Hollande et son gouvernement se sont en fait piégés en tablant sur une intervention militaire de courte durée et vont devoir gérer l’enlisement de leur contingent militaire au Mali. Ce qui ne va pas être une mince affaire pour la France engluée dans une crise économique et financière qu’elle ne sait comment enrayer. Bien commencée pour la popularité en France de François Hollande, l’intervention militaire au Mali décidée par lui risque de devenir son autre cauchemar avec celui de l’effondrement moral qui est en train de saper la République française.