Mali: La bataille d’Ifoghas risque d’être longue

MALI

La bataille d’Ifoghas risque d’être longue

Le Soir d’Algérie, 6 mars 2013

Le doute n’est toujours pas levé sur l’élimination des deux chefs terroristes, Mokhtar Belmokhtar et Abou Zeid, annoncée, pourtant, avec insistance par les Tchadiens. Les Français, dont les troupes militaires se sont engagées dans de violents combats avec des groupes terroristes dans le nord du Mali, se gardent de toute euphorie.

Sofiane Aït Iflis – Alger (Le Soir) – Faute de pouvoir exhiber les cadavres des deux chefs terroristes comme trophées de guerre, les autorités tchadiennes, le président y compris, poursuivent d’affirmer que Belmokhtar et Abou Zeid ont été éliminés. Mais aucune preuve n’est apportée pour étayer une telle affirmation. Premiers impliqués dans cette guerre au Mali, pour l’y avoir déclenchée, les Français restent, eux, circonspects. L’intervention mardi matin sur RMC/BFMTV, du ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, n’a pas permis de lever le doute sur cette assertion que les Tchadiens donnent comme vraie. Le ministre français s’est limité à donner un bilan d’une opération qui a eu lieu la veille, soit dans la nuit de lundi à mardi, dans l’Adrar d’Ifoghas. Le Drian a attesté d’une quinzaine de terroristes éliminés. «Cette nuit, il y a eu des opérations menées par nos forces contre une partie des groupes terroristes qui sont présents dans cette région, la vallée d’Ametettai», a-t-il indiqué, ajoutant : «Nous avons tenu en tenailles l’ensemble de l’Adrar des Ifoghas et la vallée d’Ametettai en particulier et ce n’est pas fini parce qu’après, il y aura d’autres vallées.» Point, donc, de confirmation de la mort de Belmokhtar et d’Abou Zeid.

Une guerre longue et coûteuse

En soutenant qu’il y aura d’autres vallées, le ministre français de la Défense laisse échapper que la guerre livrée aux terroristes dans le nord du Mali est loin d’être finie. En tout cas, au vu de la violence des affrontements qui ont lieu dans le mont d’Ifoghas, la campagne militaire dans l’Azawad ce n’est point une villégiature pour les armées française, malienne et tchadienne. Même si plusieurs terroristes ont été abattus depuis la remontée des forces françaises et maliennes vers le nord du pays, on est loin du coup de grâce. Les forces tchadiennes, qui sont venues en renfort aux armées française et malienne, ont déjà mesuré la difficulté de leur mission. Le ministre des Affaires étrangères du Tchad, Moussa Faki, a déclaré mardi à l’AFP que son pays s’attendait à subir des pertes. «Nous savons que nous partons en guerre, nous avons pris cette décision grave en sachant que dans ce genre de conflits, il doit y avoir certainement des pertes», a-t-il affirmé, ajoutant : «Nous sommes dans une situation où il faut agir pour contenir le péril là où il est. Sinon, il y a le risque qu’il se propage. Nous savions qu’on ne partait pas pour un dîner de gala.» Cette déclaration a été tenue, au moment où des informations non confirmées ont circulé autour de la blessure au combat d’un général de l’armée tchadienne, en somme le propre fils du président Idriss Déby. Le 22 février, l’armée tchadienne avait perdu 26 soldats dans des combats dans le mont d’Ifoghas.

Le MNLA se soucie des droits de l’Homme

Le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), qui rebute la présence des forces maliennes dans le nord du pays, a annoncé hier avoir saisi la Cour pénale internationale CPI) sur les exactions que l’armée malienne aurait commises dans le Nord-Mali. «Les avocats du MNLA ont demandé au procureur de la CPI d’enquêter sur les crimes qui auraient été commis par l’armée malienne à l’encontre des membres des groupes ethniques peuls, touareg, arabes et songhai dans les environs de Tombouctou, Douentza, Gao, Sévaré, Boni, et Konna», a indiqué le MNLA dans un communiqué, poursuivant que «les soldats (maliens) se sont livrés des actes de torture, des exécutions sommaires et des disparitions forcées dans ces villes». Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), la Gambienne Fatou Bensouda, a mis en garde le 28 janvier le Mali en raison d’allégations concernant des exactions qui auraient été commises par son armée dans le cadre du conflit qui déchire ce pays et elle a demandé une enquête des autorités maliennes sur le sujet. Le 16 janvier, elle avait annoncé avoir ouvert une enquête sur des crimes de guerre présumés commis par divers «groupes armés» depuis janvier 2012 au Mali.
S. A. I.