Sarkozy visite son «ami» algérien

Sarkozy visite son «ami» algérien

Il a évoqué avec Bouteflika le projet de «partenariat d’exception».

Par Antoine Guiral, Libération, 11 juillet 2007

L’Algérie a déployé hier le grand jeu pour Nicolas Sarkozy, qui n’a pourtant passé que quelques heures dans sa capitale pour une «visite de travail» : circulation coupée, hordes de motards et de militaires encadrant le cortège jusqu’à la résidence d’été de Zeralda, hélico de surveillance tournoyant dans le ciel. le tout sans aucun contact avec la population.
«Repentance». Venu présenter son projet d’Union méditerranéenne ( Libération d’hier) et poser les bases «du partenariat d’exception» qu’il entend concrétiser avec l’Algérie à l’occasion d’une prochaine visite d’Etat déjà programmée pour le mois de novembre, il a reçu une longue accolade d’Abdelaziz Bouteflika, venu l’accueillir sur le tarmac de l’aéroport. Le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, a eu droit à quatre bises du président algérien, tandis que la secrétaire d’Etat aux Droits de l’homme, Yama Rade, a dû se contenter d’une simple poignée de mains.
Paris et Alger considèrent que les «opinions publiques des deux pays ne sont pas prêtes», comme le confiait l’ambassadeur de France en Algérie, pour le traité d’amitié que Chirac a longtemps essayé de faire parapher à Bouteflika. Cela arrange bien Nicolas Sarkozy, qui a fait campagne en France contre «la détestable idée de la repentance», tout comme son homologue algérien, qui pourra continuer à s’assurer quelques succès lorsqu’il parle à son opinion publique du «génocide culturel» commis par la France durant la colonisation.
Plutôt que de remuer le passé, les deux dirigeants ont préféré hier parler ventes d’armes, coopération dans le nucléaire civil, investissements dans les infrastructures et accords gaziers. Nicolas Sarkozy ne veut plus d’une diplomatie d’intentions et de verbiage. «Quand on est amis, on n’a pas besoin de l’écrire. [.] Je viens ici ni pour m’excuser ni pour blesser. L’amitié se nourrit d’action et de projets plus que de traités», a déclaré Nicolas Sarkozy devant son homologue algérien muet et pâle. Ces intentions devraient être formalisées, à terme, à travers un «partenariat d’exception» où chaque ministère français et algérien aurait des objectifs concrets de partenariats et projets économiques. Seule la coopération militaire, déjà bien engagée, échapperait à cet accord-cadre.
«Piloter». Les Algériens sont en revanche plus dubitatifs sur le projet d’Union méditerranéenne, dont Sarkozy a fait un objectif stratégique de son quinquennat, pour le premier semestre 2008. Selon une source diplomatique, le président français souhaiterait mettre en place «un groupe de pilotage de départ», qui pourrait être constitué autour de pays n’ayant pas de conflits entre eux, comme la Tunisie, l’Egypte, la Libye et l’Algérie. La question de la place d’Israël, de la Turquie et même du Maroc, toujours en conflit larvé avec l’Algérie à propos du Sahara occidental, reste un point d’interrogation majeur. «Nous n’en sommes pas à établir un groupe pour piloter cette Union. Il ne faut exclure personne», a pourtant assuré Sarkozy. Dans la soirée, il s’est envolé pour une visite encore plus rapide en Tunisie, d’où il repartira ce matin.