Vigilance, vigilance encore vigilance

Vigilance, vigilance encore vigilance

par Kharroubi Habib, Le Quotidien d’Oran, 10 février 2014

A beaucoup d’égards, la situation actuelle dans le pays est similaire à celle qui prévalait la veille du 05 octobre 1988. En effet, tout comme en cette période, l’Algérie est confrontée à un malaise social qui se traduit par des mouvements de contestation et de révoltes sporadiques violentes. A ce malaise social s’ajoute une « guerre de clans » au sommet du pouvoir dont l’enjeu, comme l’a exprimé avec pertinence le politologue Mohammed Hachmaoui, est le partage du pouvoir en prévision de l’après-Bouteflika.

On sait sur quoi la situation qui prévalait à la veille d’octobre 1988 a débouché. Un embrasement de la rue qui a plongé le pays dans la violence et le désordre. D’où le devoir de vigilance qui s’impose à tous les patriotes pour s’opposer à la récidive du scénario. Il faut se rappeler que le vent de révolte et de violence qui a soufflé sur le pays en 88 ne fut pas spontané mais déclenché et orchestré par un clan du pouvoir qui a instrumentalisé le mécontentement populaire contre ses adversaires au sein de ce pouvoir. Des prémices sont apparues ces derniers mois qu’il y a opération de manipulation derrière des événements s’étant produits ici et là à travers le territoire national. L’on ne peut exclure qu’elle soit le fait de l’un des clans qui s’affrontent au sommet. Les belligérants de cette guerre de clans ne sont pas des enfants de chœur, et donc prêts à utiliser le peuple comme masse de manœuvre sans reculer devant les dégâts humains qui en découleront.

Les acteurs politiques qui assistent impuissants à l’empoignade à laquelle se livrent les clans du pouvoir, mais conscients qu’elle peut effectivement déboucher sur un scénario tragique pour la nation en appellent à la sauvegarde de la stabilité et de la sécurité du pays et prônent la «retenue» aux clans qui se disputent l’appropriation du pouvoir. Leurs pieuses mais impuissantes interpellations et alarmes ne sont d’aucun effet sur ces clans dont la confrontation a atteint à l’évidence un point de non-retour

Dans cette crise dont ils sont les protagonistes, le temps est passé des compromis pouvant reconduire le statu quo leur ayant permis de cohabiter. Ce qui rend très crédible la possibilité d’un dérapage de la part de l’un ou de l’autre vers une confrontation dans laquelle il sera tenté d’impliquer la population. L’un comme l’autre disposent de relais et de levier dans la société qu’ils n’hésiteront pas à actionner pour créer l’irréparable s’ils sentent qu’ils sont en train de perdre la guerre dans laquelle ils se sont lancés. La vigilance s’impose pour tous les Algériens qui doivent refuser, en le faisant savoir par tous moyens, d’être encore une fois utilisés comme masse de manœuvre par des groupes d’intérêts mus uniquement par leur détermination à conserver ou à prendre le pouvoir quitte à embraser le pays. Ce n’est pas «sept années ça suffit» que les Algériens doivent scander mais «51 ans ça suffit», l’âge d’un système qui leur a confisqué leur citoyenneté et fait de l’Algérie une nation que la prédation a rendue fragile et menacée par des convoitises externes visant à s’en prendre à son existence même en tant que nation.