Ksentini s’en prend aux tenants du “qui tue qui ?”

Le rapport sur les droits de l’homme pour 2006 fin prêt

Ksentini s’en prend aux tenants du « qui tue qui ? »

Par : Hamid Saïdani, Liberté, 1 janvier 2007

Le président de la CNCPPDH a considéré que « sur la question algérienne et surtout celle relative à la décennie noire, ces ONG se sont trompées lourdement dans leurs analyses, en considérant les groupes terroristes comme des groupes d’opposition armée ».

Le président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l’Homme (CNCPPDH), Me Farouk Ksentini, a estimé, vendredi dernier, dans un entretien accordé à l’APS, que la situation des droits de l’Homme en Algérie a connu une « évolution substantielle voire positive ». « Les choses sont en train de s’améliorer à vu d’oil », a déclaré Me Ksentini pour qui « il est indéniable que le pays connaît un retour vers la stabilité ». Le président de la CNCPPDH qui a annoncé, à cette occasion, que le rapport annuel sur la situation des droits de l’Homme en Algérie, durant l’année 2006, est « fin prêt » et sera remis au président de la République dès sa validation par les membres de la commission, s’en est particulièrement pris aux organisations non gouvernementales et par ricochet aux tenants du « qui tue qui ? », leur reprochant, une nouvelle fois, leur flagrant parti pris dans la crise de terrorisme qu’a connue le pays. En effet, les critiques de Ksentini à l’égard de ces ONG concernent surtout le fait que ces dernières ont pris « fait et cause » pour les terroristes contre l’État algérien et inventé la « fameuse » notion du « qui tue qui ? » À ce propos, il a tenu à rappeler que « l’armée algérienne et l’ensemble des forces de l’ordre n’ont pas combattu des démocrates armés ». Me Ksentini, qui dit avoir pour ces organisations « un grand respect », a, néanmoins, indiqué que « sur la question algérienne et surtout celle relative à la décennie noire, ces ONG se sont trompées lourdement dans leurs analyses, en considérant les groupes terroristes comme des groupes d’opposition armée ». Tout en se montrant très critique à l’égard des positions de ces ONG, il a, cependant, tenu à préciser qu' »on ne va pas faire leur procès ni leur tenir rancune, on leur demande seulement de reconnaître leurs erreurs ». Évoquant le cas des Patriotes, le président de la CNCPPDH a soutenu qu' »ils ont été les premiers à combattre le terrorisme » et que « la patrie et le peuple doivent en être reconnaissants ». Le président de la CNCPPDH, qui a qualifié la réconciliation nationale d' »acquis fondamental », a relevé que cette « évolution » dans les droits de l’Homme est due aussi « à la réforme de la justice initiée par le président de la République, depuis 1999 ». « On est une démocratie à ciel ouvert », a-t-il affirmé, ajoutant que « les rapports du pouvoir avec la presse s’améliorent, bien qu’il subsiste encore quelques incidents qui les émaillent ».
Dans ce contexte, il a qualifié l’Algérie de pays « émergent » en matière de droits de l’Homme, en justifiant son constat par le « déficit » qu’a connu le pays dans ce domaine, « du fait de 130 ans de colonisation qui est la négation même de ces droits, en plus de 30 ans de parti unique et 10 années de terrorisme ». Pour Me Ksentini, ce n’est qu’à partir de 1999 que les choses ont commencé à changer et qu’une réflexion a été dégagée pour parvenir enfin à la réconciliation nationale qui, d’après lui, a atteint ses objectifs à plus de 70% et qu' »il reste encore quelques situations à débloquer ». Me Ksentini, qui n’a pas tari d’éloges sur la charte, a estimé que « l’État a tenu ses promesses » dans le cadre de l’application de ses dispositions. Abordant la question des familles des disparus, Me Ksentini a rappelé que le CNCPPDH avait réalisé, il y a trois ans, un sondage soutenant que « 77% de ces familles ont accepté formellement le principe de l’indemnisation ». Selon lui, il y avait une frange de 8% qui était sans opinion et le reste était contre. À propos de la levée de l’état d’urgence, en vigueur depuis 1992, il a réfuté la thèse qui consiste à dire que l’état d’urgence « entrave les libertés individuelles et collectives », ajoutant que « les pouvoirs de police exorbitants que donne le texte aux walis n’ont jamais été exercés ». Pour lui, « l’État doit aussi s’attribuer un arsenal d’ordre juridique pour combattre le terrorisme ».

H. SaÏdani