Coalition et gouvernement d’union nationale ?

Coalition et gouvernement d’union nationale ?

par Kharroubi Habib, Le Quotidien d’Oran, 30 mai 2012

Le FLN et le RND ont obtenu, réunis, 1,8 million de voix, soit à peine 7% des 21 millions d’électeurs. Bien entendu que la majorité parlementaire qu’ils détiennent suite au scrutin du 10 mai n’est pas légalement contestable de ce point de vue. Leur victoire acquise dans ces conditions pose problème néanmoins en terme de légitimité pour ces deux formations, à vouloir prétendre représenter la majorité sociale du pays.

L’opposition, évidemment, ne se fait pas faute d’exploiter contre eux l’étroitesse de leur victoire électorale. Le pouvoir lui-même en ressent quelque gêne, car l’alliance partisane que les deux partis constitueraient seuls s’exprimera forcément au nom d’une base sociale trop réduite. C’est pourquoi les rumeurs et supputations faisant état de tractations en vue de l’élargissement de leur alliance revêtent une part de crédibilité.

En direction de qui s’orienteront ces deux formations pour étoffer l’alliance ? Le RND pousserait à la constitution d’un pôle exclusivement nationaliste et républicain, alors que le FLN serait prêt à y inclure des formations islamistes. Bouteflika partagerait le point de vue du FLN puisqu’on lui prête l’intention de nommer des ministres islamistes dans le prochain gouvernement.

Ce que le pouvoir veut en fait réaliser, c’est une sorte d’union nationale à même de faire barrage aux plans de déstabilisation dont l’Algérie serait menacée, établis par des puissances étrangères hostiles et disposant de relais à l’intérieur, prêts à en favoriser la mise en exécution.

Sans adhérer formellement à la notion d’union nationale, le Front des forces socialistes a une vision proche de celle qui est prêtée à Bouteflika. Le FFS prône en effet «la réalisation d’un consensus politique le plus large possible pour préserver la souveraineté du pays, restaurer son autonomie de décision et aussi promouvoir la citoyenneté et la démocratie». C’est d’ailleurs notamment cet argument que la direction du FFS a invoqué pour justifier sa participation au scrutin du 10 mai. Pour autant, tout en étant favorable à la construction d’un consensus politique large, la formation d’Aït Ahmed n’apparaît pas disposée à faire partie de l’alliance partisane que le FLN et le RND veulent fédérer autour d’eux.

Du côté des islamistes, le MSP ayant rompu avec le FLN et le RND, le pouvoir se cherche d’autres éventuels partenaires qui apporteraient la caution du pôle islamiste à la démarche d’union nationale. Pour l’heure, la frustration que ressentent les formations islamistes suite à leur cuisant échec électoral, ne les prédispose pas à accueillir favorablement les invites au rapprochement que le pouvoir semble leur avoir transmis. Quand elle s’atténuera et que la vigueur du mouvement de contestation auquel elles participent va s’étioler, ces formations, ou du moins certaines d’entre elles, s’aviseront sûrement de changer leur fusil d’épaule et de prêter une oreille attentive au plaidoyer pour l’union nationale face au péril extérieur.

En tout cas, s’il se forme une alliance partisane et un gouvernement dont les composantes seront plus larges qu’elles l’ont été avant le 10 mai, il se démontrera clairement que l’Algérie constitue effectivement l’exception au Maghreb et dans le monde arabe, raison pour laquelle elle n’a pas été touchée par l’onde des bouleversements intervenus dans ces régions.