Boualem Bensaïd présente le GIA comme une « organisation politique non criminelle »

Boualem Bensaïd présente le GIA comme une « organisation politique non criminelle »

Le Monde, 4 novembre 2003

C’est le cinquième procès de Boualem Bensaïd, qui fut interpellé en novembre 1995. Il a été condamné en 1999 à dix ans de prison pour « association de malfaiteurs », puis en 2001 à trente ans de réclusion criminelle, dont vingt ans de sûreté, pour une tentative d’attentat contre le TGV Lyon-Paris le 26 août 1995.
Boualem Bensaïd, un islamiste algérien jugé en appel devant la cour d’assises spéciale de Paris pour trois attentats à la bombe dans la capitale en 1995, a présenté lundi, au premier jour du procès, le Groupe islamiste armé (GIA) comme une « organisation politique », non « criminelle ».

« Il faut faire la différence entre une organisation criminelle et une organisation politique. L’organisation criminelle, c’est condamnable, et l’organisation politique se bat pour des idées. Le GIA a défendu des convictions, des idées », a indiqué M. Bensaïd.

UN « TRAVAIL BÂCLÉ »

Boualem Bensaïd s’est présenté comme « éducateur sportif ». Il a expliqué qu’il était entré dans la clandestinité en 1990 et avait quitté l’Algérie en décembre 1994 de son plein gré, sans mentionner d’éventuelles consignes du GIA. Il a également contesté pour la première fois depuis le début de l’enquête, avoir appartenu au GIA, tout en disant soutenir le groupe. Lors du premier procès, il avait pourtant revendiqué son appartenance au GIA.

Selon l’accusation, il a été envoyé en France pour diriger la campagne d’attentats revendiquée par le GIA qui a fait huit morts et plus de 200 blessés de juillet à octobre 1995 à Paris. Interrogé sur ses derniers mois en Algérie et son arrivée en France, l’accusé a donné des explications différentes de celles fournies au juge, au psychiatre ou même lors du dernier procès.

Boualem Bensaïd a reproché au magistrat instructeur un « travail bâclé » même si, comme l’a souligné l’avocat de la quasi-totalité des parties civiles, Me Georges Holleaux, M. Bensaïd n’avait fourni aucune indication précise permettant de faire des recherches puisqu’il avait fui l’Algérie clandestinement.

EMPREINTE DIGITALE

Dans ce 5e procès, l’enjeu semble d’autant plus faible que l’accusation dispose contre lui d’un élément l’impliquant dans l’attentat du métro Maison-Blanche (18 blessés le 6 octobre 1995) : son empreinte digitale a été retrouvée sur un adhésif de l’engin explosif.

Il sera aussi jugé à nouveau pour « complicité » pour l’attentat à la station RER Musée-d’Orsay (26 blessés le 17 octobre 1995). Le principal accusé, Smaïn Aït Ali Belkacem, 35 ans, confondu par l’expertise informatique de son abonnement RATP, n’a pas fait appel de sa condamnation à perpétuité en première instance.

La défense espère obtenir un acquittement de M. Bensaïd pour l’attentat à la station RER Saint-Michel le 25 juillet 1995, qui avait fait huit morts et 150 blessés, et où il a été condamné pour « complicité » à l’issue du premier procès.

L’ABSENCE DU PIVOT DU GIA

Quatre militants du GIA étaient présents de manière certaine ce jour-là à Paris – Ali Touchent, chef présumé du groupe, abattu à Alger en 1997, le Lyonnais Khaled Kelkal, tué par la police française le 29 septembre 1995, Abdelkader Maameri et Ali Benfatoum.

Ces deux derniers sont aujourd’hui libres après avoir purgé une peine de prison pour « association de malfaiteurs ». Le seul témoin ayant aperçu les poseurs de bombe juste avant l’attentat, un gendarme, n’a pas reconnu Boualem Bensaïd lors du premier procès.

Le procès se tiendra une nouvelle fois en l’absence du dernier suspect, Rachid Ramda, un Algérien de 34 ans. Financier présumé de la campagne d’attentats et présenté par l’accusation comme le pivot du GIA en Europe, il est détenu depuis novembre 1995 au Royaume-Uni dans l’attente de son extradition.

Les débats, qui doivent se prolonger jusqu’au 28 novembre, ont été aménagés pour que l’accusé puisse respecter le ramadan. En première instance, le 30 octobre 2002, Boualem Bensaïd a été condamné à la peine maximale – la réclusion à perpétuité assortie d’une période de sûreté de vingt-deux ans. Le militant islamiste, qui clame son innocence, a pris un nouvel avocat, Me Laurent Pasquet. Le procès se poursuit mardi par l’audition de l’ancien chef de la police antiterroriste, Roger Marion.

Avec AFP et Reuters