Vœu relatif à la mémoire des massacres de Sétif, Guelma et Kherrata

Conseil de Paris des 25 et 26 septembre 2006

Vœu relatif à la mémoire des massacres de Sétif, Guelma et Kherrata

Proposé par les éluEs du groupe Les Verts

Le 8 mai 1945 marque la capitulation de l’Allemagne nazie. Au même moment allait s’amorcer un des évènements les plus sanglants de l’histoire de l’Algérie et de la France.

Le matin du 8 mai 1945, des milliers d’Algériens se rassemblent dans les rues de Sétif (ville de Ferhat Abbas, fief des tous premiers nationalistes) afin de déposer une gerbe au pied du monument aux morts et revendiquer le droit à l’indépendance. Le sous-préfet de la ville, Butterlin, qui ne peut s’opposer à cette célébration, interdit le port de toute arme et de bannières revendiquant l’indépendance de l’Algérie. Dans le cortège, un jeune homme brandit un drapeau algérien. Refusant de le baisser, il est alors abattu comme le sera le Maire de Sétif qui tente de s’interposer. Dans la panique, une fusillade éclate, 27 victimes seront à déplorer du côté français. L’insurrection s’étend rapidement dans tout le Constantinois, faisant 103 morts et 110 blessés parmi les colons européens. Dès le 10 mai, la réaction française allait prend la forme d’une répression d’une extrême brutalité, hors de toute proportion. Menée par le général Duval, engageant l’aviation et la marine, l’armée coloniale fusille, bombarde, exécute. La répression durera six longues semaines, pendant lesquelles l’armée, rejointe par les colons « ultras », fera preuve d’une rare violence notamment à Guelma et Kherrata. En quelques semaines, des milliers d’Algériens seront tués.

Ce drame passe quasiment inaperçu de l’opinion métropolitaine occupée à célébrer la capitulation allemande. A l’exception d’Albert Camus, alors directeur de « Combat », qui, dans un article du 15 mai, adjure la presse française à « refuser les appels inconsidérés à une répression aveugle » et dénonce le « sauvage massacre » du Constantinois. Il faudra attendre près de 60 ans pour que la France, par l’intermédiaire de son Ambassadeur en Algérie, M. Hubert Colin de Verdière, en visite officielle à Sétif, évoque cette « tragédie inexcusable » et reconnaisse la responsabilité de la France dans ce massacre.

Ainsi, considérant que la mémoire collective de la France doit intégrer les épisodes occultés comme celui du colonialisme et de ses crimes ;

Considérant que cet épisode de l’histoire est absent de l’espace public ;

Considérant que les évènements récents nous incitent à un « partage de mémoire » et que, loin de l’idée de les opposer, il convient de tisser des liens entre elles ;

Considérant que cette reconnaissance est nécessaire dans le cadre d’une démocratie métissée et diverse où chacun doit pouvoir trouver sa place loin des replis identitaires ;

Le Conseil de Paris, sur proposition de Véronique Dubarry, Charlotte Nenner, Isabelle Morin-Guirous et Sylvain Garel et le groupe des éluEs Les Verts, émet le vœu qu’une place de Paris se voit attribuée le nom de « Place des massacres de Sétif et de Guelma» et qu’une plaque commémorative ou un petit monument soit érigé en mémoire de cet épisode sanglant de l’histoire.

Les groupes politiques du Conseil de Paris seront associés à la recherche d’un lieu adapté pour cette place.