Le président du Forum des chefs d’entreprises : Viser l’informel à la tête

Le président du Forum des chefs d’entreprises : Viser l’informel à la tête

par M. Nadir, Le Quotidien d’Oran, 24 septembre 2012

Comme un certain nombre d’observateurs, le président du Forum des chefs d’entreprises (FCE), Réda Hamiani, estime que les opérations d’assainissement de la sphère commerciale, menées depuis quelque temps dans les marchés informels, sont insuffisantes, les «petits vendeurs à la sauvette» ne constituant pas la principale menace à l’économie nationale.

« Il faut être plus incisif et s’attaquer aux barons de l’importation qui sont incrustés dans les rouages de l’Etat et qui se dispensent de payer la fiscalité ordinaire», a-t-il appelé, hier sur les ondes de la radio chaîne 3, en regrettant le fait que, motivés uniquement par l’argent, les importateurs n’ont désormais plus aucune limite : «On importe des produits de qualité douteuse, en provenance de marchés plus ou moins douteux.»

L’impact de l’informel sur l’économie nationale, Réda Hamiani le situe entre 30% et 70%, selon les secteurs d’activités qui vont désormais du textile aux médicaments en passant par les cosmétiques, les chaussures, les pièces détachées ou encore les équipements informatiques. Se refusant à toute estimation financière de l’impact, difficile à établir, le président du FCE s’est contenté de rappeler qu’il y avait là deux types de manques à gagner : au plan de la fiscalité non acquittée par les opérateurs et de la non-déclaration des salaires avec les charges afférentes. Ce qui, on l’imagine sans peine, doit provoquer à l’économie nationale un préjudice financier extrêmement important…

La lutte contre l’économie souterraine, le président du FCE la place sur deux niveaux complémentaires : un contrôle ferme et rigoureux de l’autorité et une politique attractive envers les opérateurs informels pour les amener à rejoindre la sphère du formel : «La lutte contre l’informel ne procède pas du tout répressif», a-t-il encore prévenu.

Cette situation traduit la prégnance des importations – une sortie nette des capitaux de l’ordre de 60 milliards de dollars par an entre les importations (entre 46 et 48 milliards de dollars) et les services (entre 11 et 12 milliards dollars) – mais aussi l’incapacité du système de production locale à répondre aux besoins des consommateurs : «Hormis les secteurs de l’agroalimentaire et du bâtiment, tout est à reconstruire», a affirmé Réda Hamiani en soulignant que la production locale ne couvre aujourd’hui que 05% des besoins des consommateurs contre 18% dans les années 90 à cause d’une ouverture économique «improvisée et non préparée qui a été fatale à bon nombre d’industries».

«POLITIQUE DU GOUVERNEMENT : NOUS ATTENDONS LES ACTES»

Inverser la tendance est, par conséquent, l’une des priorités du FCE pour parvenir à relancer l’économie nationale : «Il faut encourager la production nationale pour diminuer du volume des importations», a plaidé l’invité de la chaîne 3 en appelant à la prise de «mesures spectaculaires» comme la dispense ou l’allègement des taxes et des impôts en faveur des producteurs : «Pourvu que l’on relève le seuil de production !»

Réda Hamiani a également déploré que le risque industriel soit beaucoup moins assumé par les détenteurs de financements qui, en raison de l’environnement peu favorable à l’investissement industriel, préfèrent la sphère commerciale nettement plus sûre.

Toutefois, le président du FCE a reconnu qu’à travers le plan d’actions annoncé par Abdelmalek Sellal (soutien à la PME/PMI, mise en place de davantage de facilités, une meilleure organisation, la réhabilitation du service public…), le nouveau gouvernement «était sur la bonne voie» pour la relance de la machine productive. Avec un accès plus facile au foncier et aux financements, la création déjà lancée des 42 zones industrielles et une fluidité des procédures, Réda Hamiani espère la mise en place (enfin) de l’environnement favorable à l’industrialisation : «Mais, nous n’en sommes aujourd’hui qu’aux intentions, nous attendons les actes», a-t-il relevé en soulignant les lenteurs administratives dans la mise en œuvre des décisions.

La loi de finances 2013, le président du FCE a estimé qu’elle était «empreinte de sagesse et raison», puisque l’Etat n’a inscrit aucun nouvel investissement et donné la priorité aux contrats déjà entamés. Il a également salué «la stabilité des cadres juridique et fiscal» puisqu’aucun nouvel impôt ni nouvelle taxe n’ont été introduits.

Le responsable du FCE a également plaidé pour une politique régionale équilibrée pour attirer les investisseurs dans les wilayas qui ne jouissent pas de capacités industrielles: «Selon une enquête statistique, une vingtaine de wilayas sur les 48 avaient un potentiel industriel. Il faudra mettre en place des mesures incitatives pour attirer les investisseurs dans les autres wilayas.»

A propos des 3.000 entreprises lourdement endettées auprès des banques, que la dernière Tripartite a décidé de secourir à travers l’amortissement, Réda Hamiani a indiqué que 1.800 dossiers avaient été examinés par les institutions financières et que, par ailleurs excellente, l’opération s’est toutefois révélée inégale selon les banques.


 

Environnement, marchés informels… : Des citoyens moins sales ou une gouvernance plus propre ?

par Belkacem Ahcene-Djaballah

Epoustouflant ! En quelques semaines, pour ne pas dire bien moins, nos villes et villages sont devenus (presque) propres. En tout cas, pour ce qui est du «visible». Par on ne sait quel coup de baguette magique, les collectivités locales (aidées, paraît-il, par des associations et des comités de quartiers, tout d’un coup réveillés… à l’approche des élections locales) ont fait un travail intense et immense. Débarrasser les rues, les ruelles, les chemins campagnards… de ses tas d’ordures qui y étaient parfois depuis des semaines et des mois, entravant la bonne circulation des personnes, mettant en danger les passants et, surtout, susceptibles de nuire à la santé des populations. Sans parler de l’image extérieure globale ternie du pays : riche, mais à société sale.

Par on ne sait quel coup de baguette magique, les services concernés ont débarrassé, parfois à coups de bulldozers, les trottoirs de bien des quartiers de ce que l’on appelle le «marché informel». Certes, il rendait bien des services aux populations, surtout les plus pressées et les moins nanties, avec la disponibilité de produits certes bas de gamme mais à des prix bas, mais sa présence rendait intenable, sinon infernale la vie des (petits) commerces établis, contrôlés et «imposés». Sans parler de l’image extérieure globale ternie du pays : riche, mais à économie mafieuse. On ne sait comment tout ce changement a commencé. Est-ce la brutale invasion de moustiques «inconnus» dans la région de Rouiba, une invasion qui avait obligé, les travailleurs, de la SNVI entre autres, pourtant des «durs à cuire», à cesser de travailler quelque temps, tant les «envahisseurs» étaient décidés à occuper entièrement et totalement le terrain et les ateliers. Pour peu, on aurait vu certains de nos analystes , au nationalisme sourcilleux, accuser «la main de l’étranger» qui chercherait ainsi à «saboter» les efforts de relance de l’industrie mécanique nationale… alors que la raison était à chercher tout près, dans un oued «pourri», comme beaucoup de nos oueds, traversant sur 1 km l’usine, qui servait, depuis des années, sans que quiconque ne s’en inquiète, de dépotoir de toutes les saletés du coin, déversées par les habitants et surtout par les usines.

Est-ce la difficulté, de plus en plus visible, pour toute industrie ou commerce algérien légal, pour tout produit authentiquement national de se faire une «place au soleil» dans un pays devenu gros consommateur de tout. Est-ce le changement de gouvernement avec, à sa tête, un vieux routier de l’Algérie profonde, passé par tous les échelons de l’Administration locale… et à qui on ne «la fait pas». Peut-être les trois conjugués!

La catastrophe sanitaire frappait, désormais, non aux portes des bidonvilles (bof !), mais à la porte de nos plus beaux outils de production, ce qui est intolérable, n’est-ce pas.

Mais l’amour, du Premier ministre, pour le net, le propre et le clean (comme l’eau qu’il a géré assez longtemps) ne suffit pas en Algérie, pays au service public devenu, au fil du temps et de l’incompétence officialisée, labyrinthique et incompréhensible, rendant fou tous les citoyens raisonnables et faisant perdre au pays du temps, de l’énergie et des sommes folles. Il fallait aussi de la détermination et de l’action concrète dans des domaines qui, quoi que l’on dise, et on le sait bien, nécessitent plus de volonté que de moyens, plus de régularité (dans l’intervention des personnels chargés ou payés pour ce faire) , plus d’engagement (des services de sécurité), moins de tolérance et de démagogie populiste (toujours cette «peur», devenue panique, des manif’ et des émeutes de quartiers, et le souci de récup’ politicienne). Et, surtout, ne pas hésiter à agir dans des domaines certes terre à terre mais, en réalité, bien plus stratégiques que tous les beaux et longs discours sur les réformes, la nouvelle stratégie industrielle, l’adhésion ou non à l’OMC, les alliances politiques, le football professionnel… et même le quatrième mandat du Président Bouteflika….

On a enfin compris que pour réussir les grands projets, le citoyen, où qu’il soit, doit d’abord et avant tout, être «bien dans sa peau et dans sa tête», heureux dans sa ville et son village, dans son quartier, dans son douar, dans sa famille, dans son travail, dans sa ville. Se sentir libre et en sécurité,… même s’il est au chômage et sans logement. Avec, toujours de l’espoir en un lendemain certes difficile, comme partout ailleurs, mais peut-être bien meilleur… Mais, cela ne peut se réaliser que par l’existence de services publics de qualité (postes, hôpitaux, police et services de sécurité, justice, transports, hygiène, services d’état-civil, stades et cercles culturels…) et au fonctionnement sans trop de couacs…

La nouvelle gouvernance a bien commencé, bien plus propre ou bien moins sale, c’est selon, que celles qui l’ont devancé… on attend avec impatience et angoisse, la suite après les (prochains?) changements dans les cercles étatiques comme ceux des walis, des chefs de daïras, etc. et après les élections locales ! En espérant, ici, voir les citoyens, par leur vote, lors des prochaines élections locales, donner un grand et bon coup de balai…. «devant leurs portes»… et respecter, chaque matin, le travail ingrat des «éboueurs de la terre».

PS: L’institut Abbassa a réalisé une enquête nationale en 2007(elle date, c’est vrai, mais dans certains domaines, les résultats ont empiré alors que dans d’autres, assez rares, la situation s’est objectivement nettement améliorée) sur «l’Algérien dans sa ville». 5186 sondés dont 57,3% d’hommes (Extraits. Source: www.almanachdz.com/habitat/étudesetanalyses) : Pourcentage de mécontents (seulement très et plutôt) pour chacun des services : APC : 57,7% / Daïra : 50,6% / Wilaya : 47,4% / Services hospitaliers: 55,1% / Impôts, Administration fiscale: 35,7% / Douane : 20,4% / Police : 26,9% / Gendarmerie: 21,8% /Tribunaux, Justice : 32,5% / Services de sécurité en général : 28,5% / Protection civile: 15,5% / Sécurité sociale: 32,1% / Poste : 29,2% / Téléphonie fixe:14,8% / Téléphonie mobile: 11,1% / Opgi: 33,2% / Sntf : 28,3% / Air Algérie: 29,2% / Maisons de jeunes: 38,5% / Centres culturels :39,8% / Mouvement associatif: 39,3%.