La gendarmerie enquête sur le foncier à Oran

LES INVESTIGATIONS ONT DEBUTE CETTE SEMAINE

La gendarmerie enquête sur le foncier à Oran

Le Quotidien d’Oran, 15 février 2005

En application des dernières instructions du ministre de la Justice, garde des Sceaux, M. Tayeb Belaïz, la gendarmerie nationale mène depuis le début de cette semaine, une enquête sur le foncier agricole à travers la wilaya d’Oran.

Selon le groupement de la gendarmerie nationale, cette enquête a été enclenchée suite à une réquisition du parquet général, dans le souci de faire la lumière sur les défaillances constatées par les responsables des services concernés, et plus précisément sur le détournement des terres agricoles de leurs vocations initiales en les transformant en assiettes pour la construction. La première phase de l’enquête consiste à recenser toutes les assiettes foncières agricoles, avant de dresser un état des lieux et d’en déterminer les responsabilités. Les dossiers d’exploitation agricole à travers la wilaya d’Oran, comme c’est le cas dans d’autres wilayas, seront, sans exception, passés au peigne fin conformément aux instructions du ministre de la Justice. Les enquêtes des services de la gendarmerie nationale seront concentrées sur les exploitations agricoles individuelles et collectives, EAI et EAC. Il s’agit, selon la gendarmerie nationale, de juger de la conformité des attributions avec les dispositions de la loi. Aussi, les personnes physiques ou morales ayant acquis des terres agricoles et qui par la suite les ont détournées de leur vocation agricole, seront poursuivies en justice. Les services de la police judiciaire (gendarmerie et police), conformément aux instructions du ministre, devront transmettre des rapports périodiques de leurs enquêtes aux parquets généraux qui, à leur tour, transmettront des comptes rendus à leur tutelle. Une première enquête a été déclenchée en 1999 et a duré une dizaine de mois. Les investigations, à l’époque, ont concerné 8.000 agriculteurs, dont 2.000 avaient détourné des exploitations de leur vocation initiale, notamment à Aïn El-Turck, Boutlélis, Misserghin, Sidi Chami, Es-Sénia et Bir El-Djir, indique-t-on au niveau de la direction des Services agricoles DSA. Le responsable de la DSA, cité par l’APS, a affirmé, pour sa part, que de graves «lacunes, caractérisées par des attributions contraires à la réglementation et des détournements de terrains agricoles, ont été constatées depuis 1994».

L’ouverture de ces enquêtes s’inscrit en droite ligne des orientations du gouvernement qui a chargé le ministre de la Justice de mettre en mouvement l’action publique, pour mettre au grand jour toutes les irrégularités dans ce domaine.

Le 23 janvier dernier, M. Tayeb Belaïz avait instruit les procureurs généraux près les cours d’Alger, Oran, Constantine et Blida d’ouvrir des enquêtes préliminaires sur les détournements des terres agricoles et les transactions illicites s’y rapportant. Les Cours sus-citées ont été instruites pour ouvrir des enquêtes «sans délais». Il s’agit de mettre à nu toutes les transactions effectuées en violation de la loi n° 87-17, modifiée et complétée, déterminant le mode d’exploitation du domaine national.

Pour le bon déroulement des enquêtes, tous les services qui gravitent autour du secteur, notamment la DSA, les Domaines, les services d’Enregistrement, ont été à leur tour instruits pour faciliter la tâche aux enquêteurs. Invité d’une émission de la radio nationale, à la fin du mois de janvier, le ministre de l’Agriculture avait réitéré la volonté de l’Etat de préserver les terres agricoles, qu’elles soient du domaine privé ou public. «La terre appartient à l’Etat», avait souligné dans ce contexte le ministre, affirmant que l’Etat veille à la préservation de la vocation agricole de la terre, propriété de tous les Algériens, en la prémunissant de l’urbanisation anarchique. «Nous condamnons les transactions frauduleuses» qui ont dévié des terres de leur vocation initiale, a dit le ministre en signalant au passage que rien que pour la Mitidja, plus de 1.200 ha ont été détournés de leur vocation première, lors de quelque 500 «transactions illégales». Dans ce contexte, il a mis en avant la volonté de l’Etat de sauver les vergers de la Mitidja et des autres régions du pays grâce à l’application rigoureuse de la loi, dévoilant que des centaines de dossiers litigieux sont entre les mains de la justice. La surface agricole utile (SAU) a grimpé de 8,2 millions d’ha à 8,6 millions d’ha, dont 30% représentent le domaine de l’Etat, qui est géré par des exploitants agricoles dans le cadre de loi 87/19, laquelle avait donné le ton aux réformes actuellement en préparation pour le secteur.

Le ministre a signalé à l’occasion que deux avant-projets de loi sont au stade d’élaboration, l’un concerne, pour la première fois, l’orientation agricole qui s’inscrit dans le cadre des réformes et de la mondialisation, et le second avant-projet se rapporte au foncier agricole.

Djamel B.