Création de 400 000 emplois

CRÉATION DE 400.000 POSTES D’EMPLOI

Tayeb Louh a du pain sur la planche

L’Expression, 30 Juillet 2009

La stratégie du dispositif qui devrait permettre de relever ce défi aurait dû entrer en action au mois de juin 2009.

Comment réduire le chômage alors que la crise économique mondiale bat encore son plein? Le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale a sa petite idée sur le sujet. Il l’a annoncée en personne et en grande pompe. «Selon les estimations, la mise en oeuvre de cette stratégie permettra de réduire le taux de chômage à moins de 10% à l’horizon 2009-2010 et à moins de 9% durant la période 2011-2013», avait déclaré Tayeb Louh lors d’une journée d’information sur l’emploi qui s’est tenue à Alger au mois de mai 2008.
Le dispositif en question, dont seuls les contours ont été esquissés, devait entrer en action il y a maintenant plus d’un mois. Il a pour objectif la création de près d’un demi-million de postes de travail chaque année. Deux mois après cette sortie médiatique très remarquée du ministre du Travail, soit le 11 juillet 2008, les cours de l’or noir allaient commencer par battre de l’aile, passant de 147 dollars le baril de pétrole à 32,40 dollars au mois de décembre de la même année pour approcher de nouveau aujourd’hui la barre des 70 dollars. Or la bonne santé de l’économie algérienne reste tributaire à plus de 98% de ses exportations en hydrocarbures. Sa croissance incontournable pour notamment mener une politique volontariste de l’emploi n’est réaliste qu’à ce prix. Celui du baril de pétrole qui peut permettre à la balance commerciale de dégager un excédent et qui mettrait sur orbite des projets de cette envergure. Et c’est donc, dans la foulée d’une économie mondiale, qui s’enfonçait dans une violente récession jamais connue depuis 80 ans, que le ministre du Travail faisait part de son projet dont les mesures qu’il préconisait et dont on ignore les détails les plus subtils et les plus pointus, «tendent à permettre à la société algérienne de produire plus qu’elle ne consomme», assurait-il. L’initiative est certes plus que louable mais elle risque d’être fortement contrariée par une conjoncture économique très peu favorable. Le projet du gouvernement en matière de politique de l’emploi n’a pas subi de correctifs, à notre connaissance, malgré tous ces aléas et les faibles performances de l’économie nationale. A titre d’exemple, les recettes engendrées par les exportations ont brutalement chuté de 46,47% pour les six premiers mois de l’année 2009 par rapport à la même période l’année dernière.
De son côté, la balance commerciale n’enregistre qu’un petit milliard de dollars de bénéfice à la fin du mois de juin 2009 alors qu’elle plafonnait à près de 20 milliards de dollars pour les trois premiers mois de l’année 2008. L’inflation a fait un bond à 4,8% tandis que les rapports de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international annoncent une croissance qui ne dépassera pas les 2,1% pour l’économie algérienne en ce qui concerne l’année en cours. Des indices macroéconomiques guère favorables à des créations d’emploi tous azimuts, selon les experts en la matière mais qui ne semblent pas inquiéter outre mesure le ministre du Travail qui avait pourtant dénoncé au mois de mars 2008 la maigre efficacité des anciens dispositifs mis en oeuvre par l’Etat dans le cadre du recrutement. «Le taux de recrutement dans le cadre des anciens dispositifs ne dépasse pas les 12%.» avait fait remarquer Tayeb Louh à l’époque. Il faut toutefois reconnaître que l’effort financier consenti par l’Etat, particulièrement en faveur de l’emploi des jeunes et du développement des petites et moyennes entreprises, est colossal: 42,5 milliards de dinars.
Cependant, des milliers d’entre elles disparaissent chaque année. D’après les chiffres fournis par le président du Conseil national consultatif pour la promotion de la petite et moyenne entreprise plus de 2000 ont connu la faillite durant les six premiers mois de l’année 2007.
«L’environnement dans lequel évoluent les petites et moyennes entreprises algériennes les poussent tout droit vers le péril» a fait constater l’expert international et universitaire Mourad Preure. Avec des chiffres du chômage constamment controversés, et une conjoncture économique des plus incertaines, il faut se rendre à l’évidence que Tayeb Louh est au pied du mur.

Mohamed TOUATI