Ghlamallah: “Aucune personne n’a faim en Algérie”

Ghlamallah persiste et signe

“Aucune personne n’a faim en Algérie”

Par : Salim Koudil, Liberté, 11 mai 2010

Cette sortie du ministre démontre encore une fois qu’il n’a sûrement pas l’habitude de faire lui-même son marché.

Encore une fois Ghlamallah Bouabdallah sort une de ses phrases qui fera jaser plus d’un. Après son “il n’y a pas de pauvres en Algérie, ce n’est qu’une invention des médias”, qu’il avait lancé le 26 août dernier, voilà le ministre des Affaires religieuses et des Waqfs qui revient à la charge. C’était hier matin, au forum d’El Moudjahid. S’étalant sur la nécessité pour tous les Algériens de verser la zakat, Ghlamallah montrait son étonnement devant le manque d’“engouement” constaté par son département : “Aucune personne n’a faim en Algérie donc, logiquement, on aurait dû avoir la zakat de 36 millions de personnes”. En se fiant à “son” propre calcul, le représentant du gouvernement estime ainsi que le chiffre devrait être 3,6 milliards de DA (zakat el Fitr est fixée en 2009 à 100 DA). Cette sortie du ministre démontre encore une fois qu’il n’a sûrement pas l’habitude de faire (s’il le fait bien sûr) son marché en dehors de celui de Ben Aknoun ou d’Hydra. Faut-il lui rappeler qu’à Alger, et dans toutes les wilayas du pays, beaucoup de personnes ont choisi comme domicile fixe les bennes à ordures.

Avec un discours de “tendance” économique, Ghlamallah s’étalera également longuement sur les vertus des dispositions de son département pour “fructifier” la zakat. Il ira même jusqu’à comparer les banques à des… “juifs ou chrétiens”. C’était en réponse à une question lui demandant s’il n’y avait pas d’intérêt “quand les sommes de la zakat sont mises dans un compte bancaire”. La réplique a été rapide “si vous avez un voisin juif ou chrétien, est-ce que vous ça vous empêcherait de lui faire confiance en lui laissant votre argent !” Et d’ajouter : “Le plus important c’est de trouver un lieu sûr.” Il n’omettra pas toutefois de préciser que “ nous ne payons pas d’intérêt à la banque”.

Ghlamallah annoncera également la création “avant la fin 2010” d’une institution “qui se consacrera totalement à la zakat”. Pour la réaliser il affirmera qu’“elle sera basée sur une organisation économique et scientifique en collaboration avec des ulémas en économie et des universités”. La comparaison avec “ce que font les autres pays musulmans” est pour lui évidente ; à ce sujet il vantera le “système” de la zakat pratiqué en Iran alors que pour l’Azerbaïdjan “ils ne sont pas aussi organisés que chez nous”. Au passage, il n’omettra pas d’indiquer que “la zakat entière suffit pour tous les besoins sociaux”, en fustigeant “le capitalisme avec son tu travailles ou tu crèves”. La réalité du terrain est néanmoins bien différente de ces slogans. Le fonds de la zakat a été initié dès 2003. Il a récolté l’année dernière la somme de 0,88 milliard de dinars. “C’est toujours très peu puisque des experts en économie affirment qu’on pourrait arriver jusqu’à 2 400 milliards de dinars” ! Un chiffre tout de même hallucinant. Pour comparaison, le budget du ministère de la Défense (421 726 569 000 DA pour 2010), soit le plus élevé, est presque six fois inférieur !