Rétroactivité de l’instruction Ouyahia sur les sociétés étrangères d’importation

Rétroactivité de l’instruction Ouyahia sur les sociétés étrangères d’importation

Djoudi entretient la confusion

El Watan, 12 mai 2009

Ya-t-il reculade au niveau du gouvernement à propos de la mesure obligeant les sociétés étrangères d’importation implantées en Algérie à contracter un partenaire national à hauteur de 30% du capital ? Les déclarations officielles sont contradictoires.

Après avoir annoncé, dans une déclaration à la très officielle agence APS, à partir de Washington(USA) le 27 avril dernier, que ladite mesure n’a pas d’effet rétroactif sur les sociétés créées avant le 1er mars dernier, voila que le même ministre, Karim Djoudi, premier argentier du pays, affirme le contraire. « Il y a eu confusion », a-t-il estimé hier en marge de la cérémonie de signature à Alger de protocoles d’accord entre l’Office national des statistiques (ONS) et certains organismes publics. « C’est la mesure qui concerne les sociétés étrangères d’importation établies en Algérie dont le capital devrait être ouvert à un partenaire algérien à hauteur de 30% qui a un effet rétroactif et non pas celle relative à la détention par les sociétés nationales de 51% du capital des projets d’investissement étranger », tente-t-il de rectifier. Confusion ou volte-face du gouvernement ? Rien n’est moins sûr.

Le ministre des Finances aura attendu presque deux semaines pour mettre les points sur les « i » alors qu’il pouvait le faire par voie de communiqué. Son collègue au gouvernement, El Hachemi Djaâboub, ministre du Commerce, avait déjà balayé d’un revers de la main les informations selon lesquelles l’instruction du premier ministre, Ahmed Ouyahia, n’avait pas d’effet rétroactif. « La presse a mal interprété la déclaration du ministre des Finances, Karim Djoudi », avait-t-il estimé, lors d’une visite d’inspection au port d’Alger, le 9 mai dernier. Celui-ci avait brandi la menace d’interdiction d’activité aux sociétés étrangères qui « n’auront pas un associé algérien à hauteur de 30% », après le premier janvier 2010. Le ministre des Finances a rappelé hier que « le conseil de gouvernement a examiné et approuvé un décret exécutif obligeant l’ensemble des sociétés étrangères d’importation à s’associer à un Algérien au moins à 30%, avant échéance ».

Avec ce nouveau revirement du gouvernement, cela risque encore de donner du grain à moudre aux 1600 opérateurs étrangers activant dans le circuit de l’importation en Algérie. D’ailleurs, il faudrait s’attendre à la création de moins en moins de sociétés, d’autant plus que ladite mesure est jugée draconienne par les mêmes opérateurs. Après la « bonne nouvelle » de Washington, ils devront revoir désormais leur copie. Par ailleurs, le gouvernement semble ne pas être inquiet des mauvais signaux que renvoie brutalement l’économie nationale. « Aujourd’hui, nous avons les capacités de conduire notre programme de développement. Il y aura, bien sûr, moins de revenus. Mais nous allons continuer grâce aux mesures qui ont été prises pour faire face à la crise économique mondiale », a rassuré M. Djoudi. Pourtant, certains indices économiques ne prêtent guerre à l’optimisme en ce début 2009.

Les exportations algériennes ont sensiblement baissé de 42,7% durant le premier semestre 2009, alors que les recettes fiscales ont chuté de 19% durant la même période. Idem pour les réserves de change qui, malgré une hausse sensible, ont perdu de leur rentabilité, comme souligné par le gouverneur de la Banque d’Algérie. En dépit de ces mauvais signaux, le premier argentier du pays reste des plus optimistes. « Nous avons établi une loi de finances sur la base d’un baril de 37 dollars et nous avons un Fonds de régulation des recettes de près de 44% du PIB », explique-t-il. Affirmant que le gouvernement est en train d’agir avec « prudence », il note toutefois qu’« on va continuer le même rythme de dépense ». Le ministre fera l’éloge des mesures prises par le gouvernement pour contrer les effets de la crise économique mondiale. Il s’agit, selon lui, de la réduction de la dette interne et externe et la constitution d’une épargne publique avec le Fond de régulation des recettes.

Par Hocine Lamriben