La justice veut comprendre «un enrichissement soudain» : Khalifa jugé demain en France

La justice veut comprendre «un enrichissement soudain» : Khalifa jugé demain en France

par Yazid Alilat, Le Quotidien d’Oran, 1er juin 2014

De nouveau, l’ex-golden boy algérien, Abdelmoumen Rafik Khalifa, incarcéré à la prison d’El Harrach après une longue cavale britannique, sera au centre d’un procès au tribunal correctionnel de Nanterre (Hauts-de-Seine) à Paris. C’est en septembre dernier que ce tribunal avait renvoyé au 2 juin 2014, c’est à dire demain lundi, l’affaire de l’ex-patron de Khalifa Bank et Khalifa Airways, entre autres sociétés qu’il a créées. En France, et plus spécifiquement à Paris, il est poursuivi par le tribunal correctionnel de Nanterre pour «banqueroute et détournement de fonds». La justice française veut, in fine, comprendre un enrichissement soudain. Le renvoi de l’affaire, selon des sources judiciaires, est dû à «une question prioritaire de constitutionalité» (QPC) que la défense d’un des prévenus, Rachid Chemmah, avait soulevée. Ce procès concerne autant le fondateur du groupe Khalifa que dix autres personnes, dont son ex-femme Nadia Amirouchen, d’ex-représentants du groupe en France, un notaire et un avionneur. En fait, outre les «malversations» reprochés au groupe Khalifa, la justice française le poursuit ainsi que ses collaborateurs dans le sillage de la chute du groupe et de ses filiales françaises dont Khalifa Rent Car en 2003, «des délits de banqueroute par dissimulation ou détournement d’actifs». Plus concrètement, il s’agit de la vente ou de la cession dans des circonstances et des conditions empreintes d’opacité de plusieurs véhicules de luxe appartenant aux sociétés Khalifa et de la villa «Bagatelle» à Cannes. Cette villa somptueuse où l’ex-golden boy organisait des soirées glamour avec Gérard Depardieu et des stars du «show-biz» français, avait été achetée par la compagnie aérienne Khalifa Airways en juillet 2002 pour environ 36 millions d’euros. Elle a été cédée pour…16 millions d’euros une année après. La justice française lui reproche par ailleurs la ré-immatriculation de trois avions de sa compagnie aérienne, d’une valeur d’environ 1,7 million d’euros chacun, au profit d’une autre compagnie. L’Algérie n’ayant pas donné suite à la demande de la justice française de ‘lui prêter» Khalifa Abdelmoumen pour les besoins de ce procès, l’audience se passera donc en l’absence du principal prévenu. «On aimerait que ce procès donne les clés pour comprendre l’ascension fulgurante de M. Khalifa», indique une source judiciaire française citée par l’AFP. «Mais les débats risquent d’être décevants en l’absence du principal prévenu. Lui seul a les réponses», ajoute la même source selon laquelle «Alger ne veut pas d’un grand déballage public à Nanterre sur les circonstances réelles dans lesquelles cette énorme escroquerie, qui a ruiné des milliers de personnes sans qu’aucun contrôle ne soit exercé, a été mise en place». Pour autant, «on assiste ici à un mélange de reproches qui ont du sens et d’autres qui sont fantasmés», estime de son côté Me Jean-Yves Le Borgne, avocat d’un des prévenus. Selon lui, les trois avions n’ont pas été dissimulés: ils ont été vendus mais sont restés dans le giron du groupe. Arrêté et finalement écroué à Londres en 2007, Rafik Khalifa Abdelmoumen avait été extradé à Alger le 24 décembre dernier. Depuis, il attend la réouverture de son procès en Algérie où il avait été condamné par contumace à la réclusion à perpétuité.