Alger-Abuja-Pretoria ou les Etats pivots de l’Afrique
Abdelaziz Bouteflika copréside la haute commission mixte
Alger-Pretoria : des liens historiques aux accords stratégiques
LaTribune, 7 octobre 2004
De notre envoyé spécial à Pretoria Amar Rafa
Les travaux de la quatrième session mixte algéro-sud-africaine se sont déroulés mardi dernier à Pretoria, sous la coprésidence des chefs d’Etat des deux pays, Abdelaziz Bouteflika et Thabo M’beki. La réunion a été préparée par une série d’activités au niveau des experts et sanctionnée principalement par l’adoption d’un plan d’action pour l’année 2005.Néanmoins, plusieurs mesures ont été proposées pour la dynamisation des échanges entre les deux pays. Il s’agit de deux projets d’accord dans le domaine de l’éducation et de l’enseignement supérieur, de quatre projets de mémorandum, d’entente entre les Chambres de commerce des deux pays, de la Banque d’Algérie et de la South Reserve Bank, ainsi qu’un projet dans le domaine de la petite et moyenne entreprise. Un projet de plan d’action 2004-2006 dans le domaine des sports figure également dans ce chapitre.Après la proposition de l’Algérie, ce sont, en effet, 6 groupes de travail (au lieu de 9) qui sont à pied d’œuvre en matière de dynamisation des échanges entre les deux pays, si l’on y ajoute celui relatif à la défense et à la justice, pour lequel l’Algérie se montre disposée, pour peu que son partenaire montre une insistance à son sujet. L’Afrique du Sud et l’Algérie ont inscrit au chapitre politique la question du Sahara occidental au sujet de laquelle le président Bouteflika a indiqué que «la reconnaissance de la RASD par l’Afrique du Sud a un impact hautement positif sur la question».Lors de son discours prononcé devant la Haute Commission bilatérale algéro-sud-africaine, M. Bouteflika a situé le contexte de sa tenue au lendemain de l’adoption de la Charte africaine de la lutte antiterroriste et à la veille de l’inauguration à Alger du Centre de recherche africain pour la lutte antiterroriste. Deux faits majeurs qui ont leur impact sur l’impulsion de la lutte contre ce fléau. Sahara occidental, Irak, autant de sujets de concertation entre les deux chefs d’Etat.Après avoir constaté que les courants d’échange entre les deux pays se développent progressivement, le président de la République s’est dit, toutefois, déçu par le nombre réduit de projets inscrits au titre de cette session et a incité les deux parties à en augmenter le rythme et en soutenir la croissance. Il relèvera également la nécessité d’identifier «les besoins et moyens respectifs pour faciliter la réalisation de divers projets dans de multiples domaines d’intérêt des économies» des deux pays. Les opportunités de coopération de partenariat et d’investissement existent dans les secteurs de la science, de la technique, de l’industrie et des nouvelles technologies de l’information et de la communication, ainsi que dans le domaine des ressources humaines.Il devait ensuite appeler à surmonter les contraintes à l’investissement et le développement des échanges dans le cadre bilatéral. Dans ce contexte, M. Bouteflika indiquera que le forum des hommes d’affaires algéro-sud-africain et celui sur les nouvelles technologies de l’information, qui se réunissent en marge des travaux de la Haute Commission mixte, devraient accorder une attention particulière à la promotion de l’investissement.Thabo M’beki, pour sa part, a longuement insisté sur les liens historiques qui unissent les deux pays, notamment sur la révolution algérienne qui a constitué une source d’inspiration pour le combat libérateur du peuple d’Afrique du Sud. Cette histoire qui a lié les deux peuples hier et qui définit les rapports actuels est à la base du partenariat stratégique entre l’Afrique du Sud et l’Algérie, a relevé, entre autres, Thabo M’beki. Ce dernier, qui s’est ensuite appuyé sur l’exemple du développement des nations européennes au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, a indiqué que les pays pauvres auxquels nous appartenons doivent dépendre d’eux-mêmes pour assurer leur développement. Dans cet ordre d’idées, Mme Zuma, la ministre des Affaires étrangères de la RSA, a rappelé que la quatrième session de la commission bi-nationale se passe en même temps que le 50e anniversaire de la révolution algérienne et le 10e anniversaire de la liberté et de la démocratie en Afrique. Ainsi, elle énumérera dans ce chapitre les activités culturelles commémorant le 50e anniversaire de la révolution algérienne qui sont programmées du 4 au 7 octobre aux côtés d’autres activités comme le Forum des hommes d’affaires. A cette occasion, le président Bouteflika a lancé un appel aux investisseurs sud-africains pour qu’ils surmontent les difficultés créées par la bureaucratie, les invitant à prendre part aux grands projets lancés par l’Algérie conjointement avec le Nigeria, notamment le gazoduc et la transsaharienne qui relient les deux pays. Il répondra aux doléances des opérateurs sud-africains, qui se plaignaient des barrières douanières, des opérateurs algériens et du manque de financement en affirmant que ces écueils seront levés par l’adhésion de l’Algérie à l’OMC et l’accord d’association avec l’Union européenne.Le président Bouteflika a clôturé hier sa visite dans ce pays qu’il quittera pour le Nigeria.
A. R.
Alger-Abuja-Pretoria ou les Etats pivots de l’Afrique
Jeudi 7 octobre 2004
Par Abdelkrim Ghezali
L’axe Alger-Abuja-Pretoria se dresse désormais comme une colonne vertébrale solide pour porter le rêve immense de l’Afrique qu’est le projet du Nepad. Ces trois pays occupent des positions géopolitiques qui sont le nord, le centre et le sud de l’Afrique. Ils disposent tous trois d’atouts socioéconomiques et politiques qui en font les Etats pivots des trois régions et les Etats piliers pour toute l’Afrique. Les trois chefs d’Etat, M’beki, Obasanjo et Bouteflika, ont initié et parrainé un projet à la mesure du rêve des Africains. Contrairement au rêve de l’«Union arabe», l’Union africaine est en train de se construire sur des bases concrètes et non affectives, encore moins mythiques. Tout comme l’Union européenne qui s’est bâtie sur les accords de l’acier et du charbon, l’Afrique a finalement pris conscience de ses richesses inexploitées et pillées et de l’indigence des discours pompeux. Son projet d’union continentale commence par un terrassement infrastructurel ambitieux mais possible pour que le toit superstructurel devienne possible aussi. Le sous-sol africain est extrêmement riche en ressources énergétiques, mais le continent ne dispose pas d’infrastructures lui permettant de les exploiter au maximum.Les zones de production, de consommation et d’exploitation sont très éloignées géographiquement, un développement des infrastructures sous forme de pipeline est donc nécessaire. La réalisation de deux pipelines est estimée à 7 milliards de dollars. Aujourd’hui, le taux d’électrification en Afrique est de 30% (deux fois moins que la moyenne mondiale). Le potentiel hydroélectrique n’est utilisé qu’à 6% de ses capacités.C’est pourquoi le Nepad met en place deux grands projets qui ont pour but la réhabilitation du barrage d’Inga et le renforcement des lignes à haute tension. L’un des objectifs du Nepad est le développement d’un réseau routier en Afrique afin de faciliter les échanges notamment commerciaux, améliorant ainsi les approvisionnements et l’acheminement des produits vers les marchés. Des investissements ont été réalisés afin de réhabiliter des chemins de fer existants. Des projets de construction sont actuellement à l’étude dans le but de réaliser un rail transafricain de 8 000 km. En Afrique, 95% du commerce extérieur se fait par voie maritime ou fluviale mais le continent n’est pas pour autant suffisamment équipé et compétitif dans ce domaine. Le Nepad soutient la modernisation et la multiplication des dessertes maritimes car ce système de transport est indispensable au développement commercial du continent. (investissement entre 40 et 100 millions de dollars). Il s’agit là de projets phares devant permettre à l’Afrique de devenir une communauté économique intégrée qui compte essentiellement sur ses capacités et moyens propres même si l’apport extérieur des partenaires du Nepad est vital dans cette conjoncture difficile pour le berceau de l’humanité.
A. G.
Bouteflika à Abuja
Trois projets d’envergure au menu
Jeudi 7 octobre 2004
De notre envoyé spécial à Pretoria Amar Rafa
Le président de la République Abdelaziz Bouteflika a quitté hier Pretoria (Afrique du Sud) pour Abuja (Nigeria) où il coprésidera, avec son homologue nigérian Olusegun Obasanjo, la 3ème Haute commission bilatérale de coopération algéro-nigériane. Outre l’examen de l’ensemble des domaines de coopération et de partenariat traditionnels entre l’Algérie et le Nigeria, un «accent particulier» sera accordé par les deux parties à l’état d’avancement des trois grands projets. Premier projet, le gazoduc transsaharien qui s’étend sur environ 4 500 km, dont 1 300 se trouvent au Nigeria et 2 500 en Algérie. Il permettra l’exportation de 25 milliards m3 de gaz par an vers l’Europe et son coût est évalué à 7 milliards de dollars. Second projet, l’axe routier Alger-Lagos dont l’achèvement est prévu pour le troisième trimestre 2005. Troisième projet d’importance, la liaison par fibres optiques. Cette dernière suivra le tracé du gazoduc et demande des investissement évalués à 63,3 millions de dollars.Les présidents Bouteflika et Obasanjo poursuivront, à cette occasion, leurs entretiens sur «les questions bilatérales et d’intérêt commun notamment celles qui touchent à la paix, à la sécurité et à la stabilité du continent». Les entretiens entre M. Bouteflika et son homologue nigérian M. Obasanjo, qui assure la présidence tournante du Comité des chefs d’Etat et de gouvernement, chargé de la mise en œuvre du NEPAD, porteront également sur ce dossier dans la perspective de la tenue, à Alger, du prochain Sommet des différents mécanismes de mise en œuvre et de suivi de ce programme africain. Entre autres dossiers à l’étude par la Haute commission mixte, il y a lieu de noter, dans le but d’insuffler une nouvelle dynamique aux relations bilatérales, un accord sur la non-double imposition, un accord sur le transport routier avec notamment la transaharienne ainsi qu’un autre sur le transport maritime. Au titre des actions de coopération entre les deux Etats, les deux parties examineront plusieurs questions dont les problèmes liés à l’émigration clandestine, la mise en place d’un conseil d’affaires mixte ainsi que la tenue régulière de forums d’affaires.
A. R.