Procès Sonatrach 1 : Une semaine de vacances à 100 000 euros et des comptes bancaires bien garnis

Procès Sonatrach 1 : Une semaine de vacances à 100 000 euros et des comptes bancaires bien garnis

par M. Aziza, Le Quotidien d’Oran, 5 janvier 2015

C’était une journée difficile, hier, pour le président directeur général du groupe algéro-allemand Contel Funkwerk, Al Ismail Djaafer Mohamed Réda, auditionné par la partie civile (Trésor public et Sonatrach) et par le procureur général sur certaines zones d’ombre, sur lesquelles l’accusé n’a pas pu apporter des éclaircissements convaincants.

Malgré le refus des avocats de la défense de la constitution du Trésor public comme partie civile, le représentant mandaté par ce ministère public est entré en lice pour interroger quelques accusés concernés par les contrats de télésurveillances et d’équipements électroniques pour la sécurisation des sites pétroliers, au sud du pays.

Le représentant du Trésor public a demandé à Al Ismail, le patron de Contel, de lui expliquer pourquoi il a offert des services et des avantages gratuitement aux enfants de Mohamed Meziane, l’ex-PDG de Sonatrach.

Le représentant du Trésor public voulait savoir pourquoi Al Ismail a présenté une pré-étude à Sonatrach et pourquoi il avait organisé un symposium à Sheraton, pour la présentation des équipements de Contel Funkwerk «gratuitement». Et d’enchaîner «Pourquoi, avez-vous accordé 200 actions à Faouzi Meziane, et 480 actions à Meziane Réda, les deux fils de l’ex-PDG de la Sonatrach, Mohamed Meziane, sans qu’ils payent un seul centime ?»

L’intervenant tire la conclusion en demandant à Al Ismail «vous avez peut-être essayé de baliser le terrain pour récupérer en double, ce déficit financier de l’entreprise, une fois que vous réussirez à décrocher des contrats auprès de Sonatrach». Le mis en cause lui répond que les études et le symposium étaient en fait une carte de visite de l’entreprise et que ça fait partie du marketing, «c’est en fait un investissement dont les résultats seront récoltés par la suite».

A Al Ismail qui avait, dès le début de son audition lors de ce procès, indiqué que sa stratégie consistait à conclure des transactions, des contrats en dinars algériens, la partie civile demande pourquoi donc, il bénéficie d’un transfert d’argent en devises, en euro ? En lui signifiant que l’entreprise allemande Funkwerk a versé plus que 4 millions d’euros, sur son compte domicilié en France. Il répond en affirmant qu’il s’agit de frais de services offerts à l’entreprise allemande.

La représentant de Sonatrach revient pour poser la question, comment l’entreprise allemande Funkwerk lui a accordé un prêt de 6 millions d’euros, versé à son compte domicilié en France, alors que «selon les propos d’Al Ismail» l’entreprise a enregistré des pertes de 2 millions d’euros de 2006 à 2009, dans les cinq contrats signés avec Sonatrach ?

D’UN MARCHE DE 30 MILLIONS DA A 500 MILLIONS DA GRACE A SONATRACH

Un représentant de Sonatrach a demandé à Al Ismail de démontrer sur la base des chiffres quelle était la situation de son entreprise avant de décrocher auprès de la Sonatrach des marchés. Il répond qu’il avait des marchés d’une moyenne de 30 millions de Da, après c’était autour de 300 millions à 500 millions.

Maître Selleni, représentant également de la Sonatrach, a demandé des explications détaillées sur le partage des bénéfices, et sur la distribution des dividendes entre les différents partenaires et le mode opératoire. Al Ismail lui explique que les deux entreprises, son entreprise Contel et l’entreprise Allemande, ne perçoivent pas de bénéfices, mais le groupement Contel de droit algérien refacture seulement les équipements vendus à la Sonatrach, et l’entreprise allemande a une part de 70 % et Contel Algérie a 30 % de parts du marché.

Maitre Sellini revient pour lui demander d’expliquer pourquoi il a refusé de réduire son offre qui était 40 % plus chère. Le mis en cause répond qu’il a réduit son offre deux fois, «j’ai réduit à 15 % puis à 11,4 %». Et de préciser que son offre était très avantageuse en matière de qualité. Le procureur général lui repose la question autrement, quelles sont les caractéristiques spécifiques des caméras de télésurveillance de Funkwerk. Il répond avec des spécificités techniques de résistance. Le procureur général lui signifie qu’il y a meilleur dans le monde en citant les appareils de Bosch, à résistance très élevée au choc et à la chaleur.

Maître Selleni revient à la charge en interrogeant Al Ismail, «pour quel genre de consulting vous perceviez de la part de l’entreprise allemande, des primes mensuelles de 30 000 euros, pour une durée de 24 mois ? Et comment l’entreprise allemande vous octroie un prêt de 1,6 million d’euros pour la création d’une entreprise commerciale en France, sans qu’il y ait un quelquonque document prouvant que vous allez créer cette entreprise ?».

100 000 euros pour une semaine de vacances d’hiver

Le procureur général a interrogé Al Ismail sur 100 000 euros versés en deux tranches à un étranger dont il a cité le nom, pour qu’il lui organise une semaine de vacances d’hiver, afin de profiter de la neige. Enfin, le procureur lui a demandé, «est-ce que vous avez eu la possibilité auparavant (avant la signature de contrat avec la Sontrach) de profiter de la neige avec une somme pareille ?»

Les interventions de la partie civile et du procureur général durant le procès, ont été précédées par l’interrogatoire du fils de l’ex-PDG du CPA, Hachemi Maghaoui, Yazid Meghaoui, qui a déclaré devant la cour qu’il n’a aucun lien, ni de près, ni de loin avec les contrats signés avec Sonatrach.

Le juge Mohamed Reggad est intervenu pour lui citer une dizaine de comptes bancaires qui lui appartenaient et dont certains appartenaient à sa femme et à sa petite fille. Des comptes bancaires en Algérie et en France, dont quatre d’entre eux ouverts chez Société Générale, en France, d’un montant global de 230 000 euros.