L’Algérie maintient le cap des subventions, le lobbying pour les supprimer reste sans effet

L’Algérie maintient le cap des subventions, le lobbying pour les supprimer reste sans effet

Ahmed Ferki, Maghreb Emergent, 24 septembre 2013

Nouvelle charge contre les subventions des produits de base en Algérie. Mais l’aisance financière permet au gouvernement de botter en touche, et d’éviter d’aborder le sujet avant les présidentielles d’avril 2014.

Le lobbying contre les subventions massives des produits de base se fait pressant en Algérie, mais il reste sans effet sur le gouvernement. Celui-ci botte en touche pour rejeter les pressions diverses, et maintient la ligne de conduite adoptée depuis une décennie. Selon des sources parlementaires, la loi de finances pour 2014 devrait reconduire l’ensemble des mesures de soutien des prix, malgré les critiques émanant parfois de membres du gouvernement.
Lundi, un expert financier, Abderrahmane Benkhalfa, a de nouveau sonné la charge contre les subventions, qu’il a qualifiées de contre-productives. Ancien délégué général de l’ABEF (Association des banques et Etablissements Financiers), M. Benkhalfa, pourtant considéré comme proche du gouvernement, a vivement critiqué les subventions, affirmant même que la contrebande aux frontières est le résultat direct de cette politique de soutien des prix. « Lutter contre la contrebande commence par une révision de la subvention », a-t-il dit.

Subventionner la production

Selon lui, le gouvernement doit apporter « plus de subvention à la production, moins de subvention à la consommation ». En l’état actuel de l’économie algérienne, « subventionner la consommation équivaut à subventionner les importations », a déclaré M. Benkhalfa. Pour lui, l’Algérie ne tire « aucun bénéfice de la subvention des carburants. Cela provoque seulement une explosion des importations de véhicules » et « nourrit la contrebande ».
En outre, l’Algérie doit accélérer la mutation de son économie, qui se fait à un rythme trop lent, selon M. Benkhalfa. Il faut sortir d’une économie où l’investissement public, notamment dans les infrastructures, est dominant. C’était une étape nécessaire, mais il faut la dépasser, a-t-il déclaré.

30% du PIB consacrés aux transferts sociaux

Sur un budget de 6.000 milliards de dinars(75 milliards de dollars) pour 2014, 4.000 milliards devraient être consacrés au fonctionnement. C’est « trop élevé », a-t-il déclaré, même s’il s’est félicité que la fiscalité ordinaire ait dépassé la fiscalité pétrolière depuis quatre ans. Les organisations patronales algériennes, appuyées par la plupart des experts, ont fait de la révision des subventions une de leurs revendications récurrentes, mais le gouvernement reste imperturbable. Même s’il lui arrive de critiquer les subventions, en insistant sur les gaspillages qu’elles provoquent, le ministre des finances Karim Djoudi et le premier ministre Abdelmalek Sellal réaffirment régulièrement qu’il est hors de question d’y toucher. Le gouvernement veut éviter tout risque d’explosion sociale à l’approche des élections présidentielles de 2014.
La loi de finances pour l’année en cours prévoit 1.400 milliards de dinars (18 milliards de dollars) de transferts sociaux, selon des chiffres publiés par l’APS. En 2012, plus de 200 milliards de dinars avaient été consacrés aux subventions des produits de base, notamment le lait, les céréales, le sucre et les huiles alimentaires. Selon le ministère des finances, la dépense sociale budgétisée représente près du quart du budget de l’Etat et 13% du PIB. Avec les subventions non budgétisées, ce taux atteint les 30% du PIB. Les produits énergétiques absorbent à eux seuls pour 10,59 milliards de dollars (800 milliards de dinars) de subventions.