Au moment où l’Algérie négocie son adhésion à l’OMC

Au moment où l’Algérie négocie son adhésion à l’OMC

Le secteur commercial reste précaire

Le Quotidien d’Oran, 23 novembre 2002

Au moment où les négociations de l’Algérie avec l’Organisation mondiale du commerce (OMC) prennent une option de non-retour, le secteur économique et commercial subit plus sévèrement les conséquences de sa propre précarité. L’Inspection centrale des enquêtes économiques et de la répression des fraudes signale, dans un document récent, que «dès 1995, on a assisté à l’émergence d’opérateurs privés versés dans l’activité d’importation réservée jusque-là aux entreprises publiques, dont le nombre a été démultiplié».

Ce passage du monopole de groupes étatiques à des groupes privés, quasiment incontrôlables, a eu des conséquences fâcheuses quant au manque à gagner pour le Trésor public. La cupidité des uns conjuguée à la faiblesse de l’Etat, son incapacité manifeste à jouer son rôle de régulateur et l’impréparation de ses structures de contrôle fiscal et douanier aggrave la situation. Cela donne toutes les raisons à l’économie parallèle de croître en toute impunité et influencer considérablement le marché ordinaire. Les services centraux de contrôle économique vont jusqu’à parler d’une «menace de l’équilibre socio-économique».

Le contrôle tel qu’effectué par des services pas toujours qualifiés, ou ne disposant pas suffisamment des moyens requis, montre déjà l’ampleur de la saignée. En moyenne, chaque année, les services de contrôle, de la répression des fraudes et de la concurrence déloyale effectuent un demi-million d’interventions. Elles sont sanctionnées par près de 100 mille procès-verbaux constatant diverses infractions: la fermeture administrative de 5 à 6 mille locaux commerciaux, des saisies conservatoires de marchandises pour un montant supérieur à 20 milliards de centimes, défaut de facturation d’une valeur se situant entre 3 et 4 milliards de centimes, blocage aux frontières de quelque 30 mille tonnes de marchandises. De plus, en moyenne annuelle, il est décidé d’analyser dans les laboratoires pas moins de 10 mille échantillons de produits suspectés d’être non conformes aux règles d’hygiène.

Ces bilans chiffrés sur le contrôle économique et la répression des fraudes constituent le tableau noir de la réalité. Ils auraient pu être certainement plus astronomiques si la détection des irrégularités en matière fiscale et commerciale était plus efficace. Pour ce faire, la première recommandation reste toujours la révision de l’arsenal juridique, en tête le code du commerce, ainsi que «la réorganisation des services de contrôle pour une meilleure adaptation au contexte de l’économie de marché». Mais aussi de résorber ce commerce informel par l’«intégration» du plus grand nombre possible de commerçants au noir dans le circuit normal. Selon les propres statistiques du ministère, ils sont au moins un million de personnes à activer dans l’illégalité totale. Est-ce à dire que l’assouplissement des démarches pour l’obtention du registre de commerce va dans ce sens ?

Pour rendre ce contrôle économique plus conforme aux normes internationales, au ministère du commerce, il est réclamé l’«orientation de l’outil de contrôle vers la lutte contre les différentes manifestations de la fraude commerciale», citant notamment le défaut de facturation, la falsification, la tromperie, la contrefaçon et l’exercice illégal d’activités commerciales et artisanales.

Sur le plan institutionnel, existent en projet la mise en place de quelques structures comme l’Agence nationale de sécurité alimentaire (dédiée à la défense des droits des consommateurs), un centre de formation et de perfectionnement des agents de contrôle, «l’institution d’un système d’intéressement des personnels pour une plus grande motivation» et la mise à disposition des agents de «moyens de contrôle renforcés» afin d’«assurer à la fois la mobilité des agents de contrôle et la pertinence de l’outil analytique».

Salim Bouakkaz